Jim Hawkins T3 – À crocs et à sang

Larguez les amarres moussaillons pour un ultime baroud d’honneur, avec l’adaptation flamboyante de l’île au Trésor, Jim Hawkins, par Sébastien Vastra.

1745, sur l’île où Flint a enterré son trésor

Perché sur un gigantesque Banian, après avoir liquidé ses acolytes, le Capitaine Flint dessine sa carte au trésor et y ajoute un code pour faire bonne mesure. De retour au bateau, le vieux Ben lui demande où sont passés les matelots descendus à terre avec lui ? En lieu de réponse, il jette le vieux singe à la flotte et largue les amarres…

10 ans plus tard, Jim a retrouvé Ben sur l’île. Dans sa cahute, il raconte son isolement et passe un deal. Il aidera le jeune homme si son retour est assuré.

Pendant ce temps, le Capitaine Smollet, Trelawney, le docteur et ses amis se sont barricadés dans le fortin. Dressant un drapeau, Silver, qui a pris la tête des pirates, vient parlementer. Apprenant que Jim a disparu, il tente de leur faire croire qu’il est leur prisonnier et sont prêts à l’échanger contre la carte aux trésor. Mais Jim, bien vivant et libre, surgit soudain ! Kong John Silver change alors de tactique et lance ses pirates à l’assaut du fortin…

Jim Hawkins : une aventure graphique de longue haleine

Il y a un peu plus de 6 ans paraissait le premier tome de l’adaptation de l’île au trésor de Stevenson, orchestré par Sébastien Vastra. Une énième fois, me direz-vous ? Certainement, mais cette dernière avait tout pour se faire remarquer. Ayant bien digéré les adaptations précédentes de tout type (littérature, BD, ciné…), Sébastien Vastra nous offrait la quintessence des aventures de pirate. Sous un dessin anthropomorphique précis et expressif, il posait les bases d’une trilogie flamboyante.

Il faut dire qu’il prend son temps, l’ami Vastra. Il lui aura fallu près de 10 ans pour achever sa série, amoureusement scénarisée et dessinée, celle qui nous fera prendre la mer et naviguer en compagnie de son jeune héros, Jim Hawkins jusqu’à l’île au trésor du Capitaine Flint.

Il est donc venu le temps d’un dernier voyage graphique pour vérifier si la série a tenu toutes ses promesses…

Tout va être dit

Pas d’inconnu, ce dernier tome est un aboutissement. Après le souffle épique de l’aventure qui s’invitait dans la vie du jeune Jim Hawkins (tome 1), le long voyage maritime qui révélait les intentions de la troupe de pirates mené par le complexe Kong John Silver (tome 2), ce dernier chapitre nous débarque enfin sur l’île, le but du voyage.

À l’approche du dénouement, les alliances se sont forgées. Qui aura sa part du butin ? Qui détiendra la carte ? Qui sera capable de la déchiffrer ? Les chiens (et les autres animaux de tout poils) sont lâchés pour un conflit à coup de griffes, de boulets de canon, de sabres et de dents…

Et quand la situation semble sous contrôle, il faut encore prendre la route pour trouver ce fameux trésor, dans une aventure digne des plus dangereux et tordus pirates que les Caraïbes aient connus…

Jim Hawkins : une aventure autant extérieure qu’intérieure

Qu’est-ce qui fait que le récit de Stevenson trouve toujours autant d’échos ? Certes, la qualité de l’adaptation de Sébastien Vastra et son coup de génie d’une version animalière n’y sont pas étrangers, mais ce n’est pas tout. En nous faisant vivre le récit à la place du jeune Jim Hawkins, il renforce les thèmes sous-jacents à ce récit épique.

Jim Hawkins part à la recherche de l’aventure, de l’or, mais ce qu’il découvre dépasse largement ce côté matérialiste. Le côté sombre de l’humanité lui apparaît, via les meurtres et la traîtrise dont sont capables les pirates. Il découvre aussi que la plus grande liberté, c’est celle de suivre ses rêves, son instinct. L’aventure lui laissera des cicatrices, mais nourrira son expérience personnelle, le trésor que chacun de nous peut atteindre s’il se laisse entraîner par ses envies de découvertes. Comment ne pas souscrire à ce grand élan humain et fondamental ?

Graphisme de légende

Avec ce dernier tome, le voyage s’achève. Plus de grands paysages maritimes, mais une île exotique aux multiples dangers. Sébastien Vastra met en scène une fois de plus cette nouvelle arène avec une force graphique étonnante. Que ce soit dans les branches démesurées d’un gigantesque Banian, dans des cavernes bourrées de pièges, ou sur une montagne d’or, on se croirait dans un film à grand spectacle.

Les personnages sont expressifs en diable. Le jeu d’acteur et les visages rendent les émotions avec beaucoup de réalisme. Tout,  je dis bien tout, est sublimé par un travail tout en finesse. Entre le dynamisme d’un dessin animé et la finesse d’une BD franco-belge, Sébastien Vastra clôture sa série de la meilleure façon. 

Vous avez dit Anthropomorphisme ?

La particularité de cette adaptation est le pari pour Sébastien Vastra de traiter ses personnages de façon animalière. Bien sur, le genre n’est pas nouveaux. Entre le magnifique Blacksad de Juanjo Guarnido, le subtil De cape et de Crocs de Masbou ou Le Châteaux des animaux de Félix Delep pour ne citer qu’eux, les exemples ne manquent pas, malgré la difficulté de l’exercice.

Très à l’aise en anatomie humaine (il continue à travailler sur ce sujet…), Sébastien Vastra compose ses chimères (têtes d’animaux, corps mixés humains et animaux) avec une belle qualité. Bien sur, plus les animaux sont proches des formes humaines, plus l’exercice se passe aisément. Le corps de gorille de Kong John Silver et celui de lionceaux de Jim en sont les exemples les plus réussis. Pour le requin Fat Shark, le résultat est plus mitigé.

Un des pièges de l’exercice est de tomber dans la facilité des émotions humaines qu’on attribue culturellement aux animaux. Éviter le renard pour un personnage rusé ou un loup pour un personnage sanguinaire, Sébastien Vastra joue bien avec ces codes. Fat Shark est un méchant, mais Hands, le zèbre pirate tatoué, est aussi torturé et violent.

Des extras pour fêter la fin

Si vous êtes fans de la série, sachez que les éditions Ankama ont édité à la demande de l’auteur un superbe coffret pour réunir vos petits trésors. Vendu avec le tome 3, le coffret illustré du portrait des deux personnages en “miroir” contient un fac-similé de la fameuse carte aux trésor. Et pour les fans-fans (ou ceux qui s réveillent en retard), Ankama a réalisé  une édition augmentée pour fêter les 15 ans de la marque. Voilà, vous n’avez plus aucun excuse pour ne pas craquer, bande de moules.

Article posté le samedi 08 mai 2021 par jacques

  • Jim Hawkins, tome 3 : A crocs et à sang
  • Auteur : Sébastien Vastra
  • Editeur : Ankama
  • Prix : 15,90 €
  • Parution : 23 avril 2021
  • ISBN : 9791033511441

Résumé de l’éditeur : Le trésor de Flint ne semble plus très loin pour Jim Hawkins. Mais Kong John Silver n’a qu’un seul objectif : récupérer la carte. Une carte convoitée qui n’a pourtant pas révélé tous ses secrets. À mesure que progressent les deux camps, les phénomènes étranges se multiplient : et si un esprit habitait l’île ? Et si le fantôme de Flint protégeait encore son or ? Et après tout, y a -t-il réellement un magot ? Si trésor il y a, reste à savoir lequel de Silver ou Jim le découvrirait le premier…

À propos de l'auteur de cet article

jacques

Designer Digital, je lis et collectionne les BD depuis belle lurette. Ex Rédacteur en chef d’Un Amour de BD, j’aime partager ma passion pour ce média, et faire découvrir les pépites que je croise. Passionné par la narration sous toutes ses formes, je suis persuadé qu’une bonne BD a autant de qualités qu’un autre produit culturel (film, livre, disque…) et me fais fort de vous l’expliquer.

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