Le chemin de vie de Salomon et Moïse se poursuit dans Les Frères Rubinstein : les Fils de Sion. Le rêve américain pour Salomon en 1936. Le cauchemar du quotidien au camp de Sobibor pour Moïse, en 1943. Nouveaux feuillets dans cette épopée de la diaspora juive au XXe siècle proposés par Luc Brunschwig, Etienne Le Roux, Loïc Chevalier et Elivre de Cock à travers ce 4ème album de la série publiée chez Delcourt.
Quand l’audace porte ses fruits
C’est la récompense pour Salomon Rubinstein. Il a réussi à rentrer dans l’industrie du cinéma américain, et pas par la petite porte… Il réalise un film témoignage des jours passés en détention pour une agression qu’il n’a pas commise des années auparavant. La célèbre Warner Bros accepte de produire Une enfance volée. La première est un succès.
Ce film lève le voile sur les sacrifices auxquels Salomon a dû consentir pour permettre à son jeune frère Moïse de poursuivre ses études. Ce qui ne va pas sans ajouter de la culpabilité à celle que ce-dernier porte déjà en lui…
Toutefois, cette réussite sera source d’inquiétude pour Salomon car la Warner Bros souhaite organiser une campagne de promotion en Europe. Hors en France, Salomon risque un retour à la case prison pour s’en être évadé…
En parallèle, nous suivons de nouveau Moïse au camp de Sobibor. Les prisonniers réalisent peu à peu qu’ils seront peut-être les prochains à entrer dans les hangars de la mort. Leur faut-il attendre avec résignation ce moment fatal ou entrer en action, concrétiser leur rêve d’un retour à la liberté et s’engager ?
Les frères Rubinstein en quête de résilience
La question de la violence sous toutes ses formes est omniprésente. Violences envers les enfants, violences cachées, violences sexuelles envers les femmes. Violences honteuses dans tous les cas mais pour lesquelles l’espoir de guérir les traumatismes associés reste possible. Une bobine de laine à démêler pour retrouver le fil d’Ariane dans le labyrinthe de la vie.
Hasard des rencontres ? ou absence de hasard peut-être, le monde est si petit…
Plusieurs personnages apparaissent par touche mais leur symbolique est puissante. Tel ce gardien du centre de détention pour enfants qui a fait carrière au bagne à Cayenne. Quand on a connaissance des conditions de détention en Guyane, on ne peut craindre que le pire pour les jeunes du centre de Mettray.
Les Fils de Sion : un espoir de liberté ?
Ce dernier album des Frères Rubinstein poursuit le décryptage des différentes facettes de l’antisémitisme dans les années 1930 et 1940, par-delà les frontières. Le pays des libertés par excellence, les Etats Unis, est loin d‘être épargné. Tous les milieux sont concernés. Nombreux sont ceux qui doivent modifier prénom ou nom pour ne plus être confrontés aux diverses discriminations existantes. Avec parfois une double peine pour certains personnages. La notion d’identité déjà abordée dans les précédents albums reste très présente.
Mais dans tous les cas l’amour et l’art se rejoignent pour cicatriser les blessures de l’âme, se débarrasser de l’esprit de vengeance. Et retrouver la lumière.
De nouveau, Brunschwig, Le Roux et Chevallier nous proposent un album d’une forte intensité. Les émotions sont au rendez-vous ! Et le talent d’Elvire de Cock également ! L’amplitude de sa palette de coloriste ne cesse de surprendre. Rouge sanglant pour les scènes évoquant une mort violente, bleu turquoise et sable chaud pour les lieux susceptibles d’apporter le renouveau. Du gris, souvent, comme pour rappeler que rien n’est blanc ou noir.
Et toujours cette note finale pour maintenir le suspense et donner l’envie de connaître la suite ! Vivement le prochain tome…
- Les Frères Rubinstein T4 – Les Fils de Sion
- Auteur : Luc Brunschwig
- Dessinateurs : Étienne Le Roux et Loïc Chevallier
- Coloriste : Elvire De Cock
- Editeur : Delcourt
- Prix : 15,95 €
- Parution : 1 juin 2022
- ISBN : 9782413043768
Résumé de l’éditeur : L’odyssée des deux frères se poursuit entre le Paris des années 30, gangréné par la montée d’un fascisme français et le camp d’extermination de Sobibor, où chaque instant résonne comme un écho entre passé et avenir.
1936. Les Frères Rubinstein assistent à la première du film que vient d’écrire Salomon. Moïse découvre le combat des Sionistes. Un combat perdu d’avance, puisque 7 ans plus tard, les nazis sont sur le point d’achever leur mission exterminatrice
À propos de l'auteur de cet article
Sophie Gateff
Chez Sophie, la bande dessinée, c'est une affaire de famille. Avec ses deux enfants (Gabriel et Léna), ils aiment les polars mais aussi les récits jeunesse. Des chroniques à plusieurs pour vous faire découvrir des pépites.
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