Varsovie, Varsovie

Pour sa deuxième bande dessinée, publiée chez Marabulles, l’auteur-réalisateur Didier Zuili signe un bel album consacré à la tragédie du ghetto de Varsovie, Varsovie Varsovie.

L’ARCHIVISTE DU GHETTO

Né à Paris en 1958, Didier Zuili est un auteur qui mène à la fois un travail de dessinateur et de réalisateur de films (près d’une vingtaine de documentaires et de fictions courtes réalisées pour la télévision entre 2004 et 2017).  « Varsovie, Varsovie », signé chez Marabulles, est son second album de bande dessinée.

Il lui a fallu, dit-il, trois années pour mener à bien son projet, à savoir raconter une partie de la tragédie du ghetto de Varsovie, à travers l’évocation d’Emmanuel Ringelblum, cet historien juif polonais (1900-1944 ) qui se fit enfermer dans le ghetto pour réaliser une sorte de  » journal collectif  » qui serait la mémoire des événements commis par les nazis à leur encontre.

Avec un groupe d’intellectuels baptisé Oyneg Shabbes, l’archiviste compila, regroupa des témoignages « pour ne pas laisser des faussaires écrire l’histoire « .

RÉSISTANTS HÉROÏQUES

L’auteur de ce one shot saisissant aime à rappeler qu’il n’a rien inventé. Fidèle au travail de mémoire de Ringelblum, il rend compte de moments historiques forts comme la visite de Himmler dans le ghetto en janvier 1943 jusqu’au combat héroïque, en avril de la même année, de ceux qui surent tenir tête aux nazis pendant plus d’un mois avant d’être liquidés.

Parquées comme des bêtes dans des conditions plus que précaires, près de 400.000 personnes s’entassèrent sur 307 hectares. Ce sont aussi ces tranches d’histoire, à travers le regard croisé de plusieurs personnages, Jonasz, Shaïa, Yentl, fictifs ou ayant réellement existé, que Didier Zuili nous donne à voir.

Les travaux de Ringelblum et de ses amis  avaient été dissimulés dans des boîtes de métal dans trois caches dont deux seulement auraient été retrouvées à ce jour.

DES TABLEAUX EXPRESSIFS

 » Nous ne savons pas qui survivra de notre groupe d’Oyneg Shabbes, écrivait Emmanuel Ringelblum en juin 1942, ni à qui il appartiendra d’éditer les matériaux rassemblés. Cependant, il reste évident pour nous tous que nos efforts, notre sacrifice, notre vie dans la terreur constante n’auront pas été inutiles… »

Pas inutile non plus cet album didactique, enrichi à la fin d’une contribution de l’historien Georges Bensoussan, « 1939-1943, le ghetto de Varsovie ». Le trait de Didier Zuili, parfois fragile, sait aussi être efficace. Le crayonné, le choix des couleurs font de cet album un travail de mémoire intéressant à plus d’un titre…

Article posté le lundi 12 juin 2017 par Jean-Michel Gouin

Varsovie Varsovie de Didier Zuili (Marabulles) décrypté par Comixtrip le site BD de référence

 

  • Varsovie, Varsovie
  • Auteur : Didier Zuili
  • Editeur : Marabulles
  • Prix : 17, 95 €
  • Parution : mars 2017
  • Résumé de l’éditeur : cette fiction prend naissance dans la résistance du ghetto de Varsovie qui aboutira à la révolte d’avril 1943. Elle s’appuie sur l’histoire d’Emmanuel Ringelblum, militant social et politique, homme de sciences qui entrepris la rédaction collective d’un journal, véritable arme de résistance, dans des bidons de lait en fer enfouis sous terre. Ces archives, 27 000 pages et documents rassemblés en 1669 dossiers, retrouvés en 1946 et 1950, dites « archives Ringelblum » font aujourd’hui partie du Patrimoine Mondial de l’Unesco. Le personnage central, l’historien Emmanuel Ringelblum, décide de rester à Varsovie bien qu’il ait les moyens de fuir la Pologne. Avec ses amis du collectif Oyneg Shabbes, il veut sauver de la destruction, des millions de témoignages écrits qui racontent l’histoire des habitants du ghetto. Ils sont traqués par les nazis qui ont appris l’existence du collectif. Parmi ces « archives », il y a le journal du jeune Jonasz Heller, coursier dans le ghetto, qui après avoir sauvé la jeune Yentl Perlmann, décide de rentrer dans la résistance. VARSOVIE, VARSOVIE est aussi l’histoire d’un retour : 75 ans après, Yentl Perlmann, rescapée du ghetto revient à Varsovie, dans un collège pour aller à la rencontre des jeunes générations et témoigner.

À propos de l'auteur de cet article

Jean-Michel Gouin

Passionné par l'écrit, notamment l'histoire, la littérature policière et la bande dessinée, Jean-Michel Gouin est journaliste à Poitiers.

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