Albert Londres doit disparaître

Voici 90 ans, le 16 mai 1932, disparaissait dans un tragique accident le grand reporter Albert Londres. Il avait 47 ans. Avec Albert Londres doit disparaître, édité chez Glénat (collection Treize Étrange), les auteurs, Frédéric Kinder (scénario), Borris (dessin) et Brice Follet (couleur) ont décidé de revenir sur les six derniers mois du journaliste. Une période pendant laquelle il menait une enquête en Chine.

Albert Londres, un prix prestigieux

Quand on parle d’Albert Londres aujourd’hui, on pense automatiquement au Prix qui porte le même nom. Ce prix a été crée en 1932 par Florise Martinet-Londres, à la mort de son père. Il a été remis pour la première fois en 1933. Il récompense les “meilleurs grands reporters francophones de moins de quarante ans”. Maintenant il se décline en trois catégories : le Prix de la presse écrite, le Prix audiovisuel (depuis 1985) et le Prix du livre (depuis 2017).

Mais qui était Albert Londres, cet homme qui a consacré sa vie aux voyages et à l’information ?

Albert Londres, un illustre « inconnu »

Albert Londres est né en 1884 à Vichy (Allier). Il débute tout d’abord en écrivant des poèmes puis commence à écrire des articles sur le travail de l’Assemblée nationale en 1906. C’est en 1914, avec le début de ma Première guerre mondiale, qu’il devient reporter de guerre pour le journal Le Matin. Son premier fait d’arme, un reportage sur le bombardement par les Allemands de la cathédrale de Reims. Désirant être au plus près des combats, il part dans les Dardanelles (détroit turc entre la mer Égée et la mer de Marmara) pour le compte d’un autre quotidien, le Petit Journal.

S’en suivront après guerre de nombreux reportages. En 1920 en Russie soviétique, en 1922 en Asie (Japon, Chine, Inde), en 1923 en Guyane pour dénoncer l’horreur du bagne de Cayenne. Mais Albert Londres s’est aussi intéressé en 1924 au Tour de France, pour dénoncer les conditions de course de ceux qu’il appelle Les forçats de la route. Ainsi qu’aux conditions d’internement des malades dans les hôpitaux psychiatriques en France. L’Argentine, Le Sénégal et le Congo belge, les Balkans seront ses dernières destinations avant qu’il n’entame son ultime voyage en Chine en 1932.

Un album pour retracer sa dernière enquête

Albert Londres doit disparaître retrace les derniers mois de la vie du journaliste, alors qu’il embarque en décembre 1931 pour la Chine, plus exactement Shanghai. La ville est une concession qui comporte des habitants de nombreuses nationalités.

Il débarque là-bas, fin janvier 1932, alors que le conflit sino-japonais fait rage. Le Japon a annexé l’année précédente la Mandchourie et contrôle dorénavant ce territoire appelé Mandchoukouo (1932 -1945). Quelques jours après son arrivée, l’armée nipponne bombarde Shanghai. Cet épisode est relaté dans l’album sous les mots d’Albert Londres, que l’on peut lire en écriture manuscrite, comme pour la différencier du reste du scénario.

Un dernier voyage pour informer

Albert Londres avait prévu que ce voyage soit le dernier. Celui-ci ayant décidé de se consacrer à la rédaction de ses mémoires et à sa fille. Comme lors de ses précédents reportages aux quatre coins du monde, il a décidé de lever le voile sur un sujet sensible. Un trafic d’armes organisé par l’armée française au profit de l’armée rouge de Mao, le tout rétribué en opium !

Pour cela, Albert Londres retrouve Monsieur Pou, un interprète rencontré lors d’un précédent séjour en Chine.

Mais la venue de ce fouineur, que rien n’arrête, n’est pas du goût de tous et surtout pas de l’Amirauté française en poste à Shanghai. Ni de la pègre marseillaise qui trempe dans ces malversations. Ni de l’armée de Mao qui a besoin d’armes pour mener à bien sa révolution communiste.

Albert Londres, un journaliste aventurier

Comment ne pas se laisser embarquer par cet album qui mêle aventure, fiction et réalité, Extrême-Orient, courage et détermination, disparition ? Les auteurs Frédéric Kinder (scénario), Borris (dessin, auteur de Charogne) et Brice Follet (couleur, auteur de Tine et Junior) nous font découvrir ses derniers mois. Mais surtout les risques pris par celui qui aura permis au journalisme de conquérir ses “lettres de noblesse”.

Ce récit est incroyable, Albert Londres agit tel un agent secret avec comme arme, sa seule plume.
Les dessins, d’une beauté et d’une tonalité très sobres, accompagnent parfaitement bien cette époque. Quand les grands trajets se faisaient à bord de paquebots et les messages étaient transmis par télégrammes ou cablogrammes.

Un cahier documentaire permet d’en savoir plus sur la mort accidentelle d’Albert Londres le 16 mai 1932.
Il avait pris place à bord d’un navire qui a pris feu dans le golfe d’Aden. De quoi alimenter toutes sortes de suppositions.

“Le poids des mots, le choc des dessins” pour ce bel hommage à un homme dont on célèbre les 90 ans de sa disparition.

Article posté le mercredi 08 juin 2022 par Claire Karius

Albert Londres doit disparaître de Frédéric Kinder, Borris et Brice Follet chez Glénat
  • Albert Londres doit disparaître
  • Scénariste : Frédéric Kinder
  • Dessinateur : Borris
  • Coloriste : Brice Follet
  • Éditeur : Glénat, collection Treize Étrange
  • Prix : 17,50 €
  • Parution : 11 mai 2022
  • ISBN : 9782749309323

Résumé de l’éditeur : Le secret de son dernier reportage. Quand, en décembre 1931, Albert Londres embarque pour la Chine, nul ne sait vraiment ce qu’il part y faire. Aucun journal ne l’y a envoyé et ses concurrents se demandent ce qu’il va bien pouvoir rapporter comme scoop alors que Shanghai est au coeur du conflit sino-japonais. Après ses reportages qui ont fait grand bruit sur le bagne de Cayenne, sur la traite des Blanches en Argentine ou sur le traitement indigne des internés en hôpitaux psychiatriques, c’est un trafic d’armes et d’opium qu’Albert Londres va mettre au jour en Asie. Mais les révélations que s’apprête à faire le journaliste, « de la dynamite » de son propre aveu, dérangent en plus haut lieu, à commencer par l’amirauté de la Marine française, qui est impliquée dans ce trafic (qui sera connu plus tard sous le nom de French Connection !). Aussi, sa disparition dans le naufrage du Georges Philippar à son retour de Chine en mai 1932 laisse planer le doute sur le caractère accidentel de sa mort. Surtout quand on sait que ses amis, les époux Lang-Willar à qui il s’était confié sur le contenu de son reportage, vont périr accidentellement avant de pouvoir faire éclater au grand jour ce scandale d’État. Entre biopic et fiction, Albert Londres doit disparaître est une proposition possible de Frédéric Kinder et Borris sur la fin tragique de celui qui, aujourd’hui encore, est considéré comme le premier grand reporter de l’Histoire.

À propos de l'auteur de cet article

Claire Karius

Passionnée d'Histoire, Claire affectionne tout particulièrement les albums qui abordent cette thématique, mais pas seulement. Elle aime également les lectures qui savent l'émouvoir et lui donnent espoir en l'Homme et en la vie. Elle partage sa passion de la bande dessinée dans l'émission Bulles Zégomm sur Radio Tou'Caen et sur sa page Instagram @fillefan2bd.

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