Aya de Yopougon 7

Quel bonheur de retrouver Aya et ses amis dans le 7e opus d’Aya de Yopougon ! Douze ans après la fin du dernier tome, Marguerite Abouet et Clément Oubrerie agrègent leur talent pour mettre en scène ce fabuleux récit choral dans Yop City, un quartier populaire d’Abidjan. Dêh…

Aya de Yopougon, merveilleux récit choral au cœur d’Abidjan

Un peu avant 2005, Marguerite Abouet propose à Clément Oubrerie de la suivre dans l’aventure Aya de Yopougon. Cette écrivaine née à Abidjan et qui a grandi à Yopougon s’installe avec sa famille à Paris alors qu’elle à douze ans. Pour Aya, elle n’a pas besoin de chercher très loin pour son récit. Elle l’ancre dans ses souvenirs d’enfance. Si elle est plus proche d’Akissi la petite sœur de l’héroïne, elle brode autour de sa magnifique galerie de personnages pour livrer un récit choral addictif et drôle.

Cette belle comédie tourne autour d’Aya et de ses amies Bintou et Adjoua. Les trois ont 19 ans lorsque le premier album s’ouvre. Les lecteurs découvrent alors leurs familles respectives qui se connaissent mais également d’autres protagonistes. Comme dans un soap – ici extrêmement bien écrit contrairement à ceux brésiliens – il y a des rires, des pleurs, des amours, des déchirures, des complots ou de la triche. On navigue d’une histoire à l’autre, toujours avec Aya comme lien.

Yop City, quartier populaire

Yopougon, alias Yop City pour « faire comme dans les films américains » est également un personnage à part entière. Ce quartier bouillonne, résonne, vit à cent à l’heure et devient l’écrin des folles aventures d’Aya de Yopougon. Tout est ouvert, tout le monde se connaît et tout le monde interagit ensemble.

Les dialogues d’une grande justesse sont ciselés à merveille pour faire rire les lecteurs. Les situations cocasses s’enchaînent sans oublier des thématiques contemporaines. Le récit de Marguerite Abouet aborde des enjeux actuels : travail, précarité, études, corruption, politique, adultère ou homosexualité. Débutée à la fin des années 1970, l’intrigue se poursuit donc dans la décennie suivante. Ce 7e volume se déroule sous la présidence de François Mitterrand.

Starlette, stage, études et rejet

Dans ce 7e opus d’Aya de Yopougon, l’on retrouve Innocent et son compagnon Sébastien à Paris. Le premier qui n’a ni emploi ni papiers découvre la cause de ses semblables proches de l’expulsion de la France. Bintou est devenue une starlette. Depuis qu’elle est la vedette de la série télé Gâteuse de foyer, elle est harcelée par des fans. Ne séparant pas l’artiste du rôle, elle est menacée de mort par ses femmes prêtes à tout pour rendre l’honneur des hommes.

Moussa à peine sorti de prison continue d’être entretenu par ses parents et d’être le petit patron de la Solibra. Solibra qui doit accueillir Aya pour un stage d’études. Elle y retrouve son père, mais aussi Grégoire, toujours prêt à embobiner les gens.

Et enfin, il y a Albert le frère d’Adjoua qui avait avoué son homosexualité à ses parents. Plus rien ne va pour lui, il est rejeté.

Douze ans à attendre Aya de Yopougon

Même s’il y a ce moment d’attente de douze ans, on a l’impression que cela ne fut pas si long que cela. Comme si les personnages d’Aya de Yopougon nous avaient attendu, comme s’ils n’avaient pas bougé de l’endroit où on les avait laissé.

On prend toujours autant de plaisir à suivre ces aventures rocambolesques. Comme le confie Marguerite Abouet : « Aya, c’est une toile de fond drôle, vivante, émouvante et bienveillante. J’aime peindre les Ivoiriens et leur folie avec humanité et humour. C’est parce que l’humour fait vraiment partie de la vie des Ivoiriens. »

Avec ses 800 000 exemplaires vendus des six premiers tomes et ses traductions en quinze langues, Aya de Yopougon est une vraie réussite. Il semblait logique que les deux auteurs se remettent à écrire. « C’est moi qui ai demandé à Marguerite quand est-ce qu’elle raconterait la suite de l’histoire d’Aya. Car après une longue et nécessaire coupure, le désir est revenu de mon côté de ma replonger dans cet univers », explique Clément Oubrerie.

Il faut souligner que le long métrage d’animation d’Aya de Yopougon sorti en 2013 leur a demandé trois ans de réalisation. Les deux se sont beaucoup impliqués au sein de ce projet produit par Autochenille Production (Le chat du rabbin, Petit vampire). Le dessinateur a aussi utilisé  ce temps entre 2013 et aujourd’hui pour imaginer d’autres histoires comme Les royaumes du Nord, A mains nues ou encore Voltaire amoureux.

Une suite tout de suite ?

Si l’on ne sait pas comment va réagir le public, l’ancien comme le nouveau, avec ce septième opus d’Aya de Yopougon, les auteurs ne savent pas non plus s’il y aura une nouvelle suite à la série. En attendant, les lecteurs peuvent aussi lorgner du côté d’Akissi, la série centrée sur la petite soeur d’Aya mise en image par Mathieu Sapin sur un scénario de Marguerite Abouet mais également Commissaire Kouamé de la même scénariste et Donatien Mary.

Reste ce nouveau tome, riche, prenant et très drôle. Aya est un univers que l’on aime et on le dit : courez acheter les 7 volumes d’Aya de Yopougon, ça se dévore comme un bon poulet braisé, dêh !

Article posté le dimanche 18 septembre 2022 par Damien Canteau

Aya de Yopougon 7 de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie (Gallimard BD)
  • Aya de Yopougon, tome 7
  • Scénariste : Marguerite Abouet
  • Dessinateur : Clément Oubrerie
  • Editeur : Gallimard BD
  • Prix : 18 €
  • Parution : 14 septembre 2022
  • ISBN : 9782075163989

Résumé de l’éditeur : Comme si on ne les avait jamais quittés, on retrouve les personnages hauts en couleur et la verve ivoirienne qui ont fait le succès de la saga. À Yopougon, les problèmes vont bon train ! Aya tente de concilier un stage à la Solibra et sa relation compliquée avec Didier… mais surtout, elle s’engage dans la lutte pour les droits des étudiants de l’université de Cocody ! De son côté, Albert, rejeté par sa famille, galère pour se loger. Et ce n’est rien comparé à Bintou, devenue la star détestée de la série « Gâteuse de foyer » ! Quant à Inno, exilé en France et sans-papiers, il n’est pas au bout de ses peines car « Paris est dur comme caillou ». Mais tous comptent prendre en main leur destin, quitte à mener une petite révolution !

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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