Weng Pixin, autrice singapourienne, raconte dans N’en parlons plus, l’histoire de cinq jeunes filles de la même famille de 1908 à 2032. Édité par Motus, cet entremêlement de récits résonnent les uns les autres pour offrir une fresque familiale et historique délicate et de grande valeur.
Cinq femmes, cinq destins
Bi est une jeune fille dont le prénom signifie Jolie en singapourien. Dans sa famille maternelle, il y a Kuan son arrière-grand-mère, Mèi sa grand-mère, Bing sa mère et Rita sa fille imaginaire.
Bi avait 15 ans en 1998, la première citée 15 ans en 1908, la deuxième en 1947, la troisième en 1972 et sa fille aura 15 ans en 2032.
Weng Pixin tisse ainsi des liens entre ces cinq jeunes adolescentes en racontant, en parallèle, leur vie, comme une grande fresque s’étalant sur 124 années. Une belle manière de découvrir également les us et coutumes de Singapour sur ce siècle.
Travail aux champs, femmes au foyer et émancipation
Kuan, en 1908, n’avait pas trop le choix. Pour aider sa famille habitant en Chine, elle devait travailler dans les champs. Impossible de nourrir de nouvelles bouches si elles ne mettaient pas la main à la patte. Pire, alors toute petite, elle est séparée de ses parents pour être au service d’une famille bourgeoise de Singapour.
Mèi, en 1947, passe son temps à coudre, à vider les toilettes et est même harcelée par son propre père. Son salut, elle le devra à un gentil voisin.
Bing, en 1972, n’a pas trop de chance. Mèi, sa mère, est détestable. Toujours fatiguée, elle s’en prend souvent à sa fille qui doit s’occuper de ses frères et soeurs.
Bi, en 1998, est une adolescente en révolte contre ses parents. Si elle se rend régulièrement au lycée, elle se retrouve alitée dans un hôpital à cause de mots de ventre.
Rita, en 2032, la vie semble plus douce pour elle. Elle aime que sa mère lui raconte sa vie et celles de ses aïeules. Enfin, une adolescente qui se préoccupe de l’histoire familiale.
N’en parlons plus : secrets et non-dits dans la faille de Bi
Weng Pixin est un autrice singapourienne née en 1983. Elle suit les cours aux beaux-arts du collège des arts de Lasalle à Montréal.
Publié par les éditions Motus, N’en parlons plus a beaucoup d’ambitions. Notamment celle de décrire la vie de cinq jeunes adolescents de la même famille mais au même âge. Elle peut ainsi dresser le portrait de femmes singapouriennes à différentes époques de l’Histoire de ce pays.
La mémoire est aussi très importante dans son album. Celle qui se transmet, celle qui s’efface aussi parce qu’il y a de lourds secrets et des non-dits. Pour avancer, pour développer sa propre identité, il est toujours important de savoir d’où l’on vient, de connaître ses racines et c’est ce que l’autrice a voulu aussi développer dans N’en parlons plus.
L’on découvre aussi la place des femmes dans une société patriarcale figée. Travailler, se marier avec un bon parti sans jamais se plaindre pour les plus anciennes. Puis l’on découvre l’évolution de cette place des femmes, l’émancipation par l’école et l’instruction.
N’en parlons plus est une belle bande dessinée sur l’héritage de femmes dans une même famille ; un bel album à partir de 12 ans dans un très joli format à l’italienne.
- N’en parlons plus
- Autrice : Weng Pixin
- Traductrice : Stéphanie Menu
- Éditeur : Editions Motus, collection Bulles Bottes Boutons
- Prix : 17 €
- Parution : 19 mai 2022
- ISBN : 9782360111152
Résumé de l’éditeur : Cinq générations de jeunes filles d’une même famille nous livrent ici leur histoire. Entre la Chine et Singapour, de 1908 à 2032, les secrets s’installent et les non-dits se creusent. Mais la dernière génération fera tout voler en éclats. Car c’est en brisant les silences et en interrogeant notre passé que l’on apprend à mieux se connaitre et à avancer.
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.
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