Bloguer sous les bombes

En 2012, l’auteur israélien Asaf Hanuka (Valse avec Bachir, entre autre) participait à un débat au festival d’Angoulême. Son titre: « Créer sous les bombes ». Titre adéquat: il suffit d’aller sur son blog, bilingue anglais/hébreu, pour s’en rendre compte.

Inspiré entre autre par Guy Delisle, Asaf Hanuka y dessine sa vie de famille dans un pays en guerre tiède perpétuelle. Ça change un peu des blogs girly ou des blogs de mamans, quoi. Un peu, mais pas tellement. Et c’est ce décalage permanent entre un quotidien auquel on peut facilement s’identifier (père de famille, problèmes d’argent, de santé, moments de crise ou de tendresse, addictions aux nouvelles technologies…) et une réalité que l’on ne voit le plus souvent qu’à la télévision (menaces d’attentats, bombes, peur de la bombe atomique, peur de la mot, peur de tout…) qui rend le blog passionnant.

Passage raté du web au papier

Asaf Hanuka a sorti deux albums tirés de ce travail de blogueur: KO à Tel Aviv, et KO à Tel Aviv, tome 2. Le problème, c’est que ce travail perd tout son sel en passant du web au papier. Déjà, le format choisi est trop grand. S’il était peut-être nécessaire pour certaines histoires en plusieurs cases, il devient totalement disproportionnés pour les images stand-alone, qui sont pourtant la partie la plus intéressante du travail d’Asuf Hanuka.

Et surtout, dépouillées de leur contexte web, ces images et ces histoires apparaissent bien moins intéressantes. Sans les quelques lignes de textes qui les accompagnaient sur le blog, certaines sont à la limite du compréhensible. D’autres souffrent cruellement d’être déconnectés de l’actualité, à l’inverse de ce qui se passe sur le blog. Le rapport titre/image, primordial sur le blog, passe aussi au second plan sur le papier. Et surtout, il n’y a pas la proxité avec l’auteur, ce petit quelque chose en plus qui fait qu’on peut lui laisser un commentaire, dialoguer avec lui… Bref, se sentir proche de l’humain, plus que du dessinateur. Dommage. A réfléchir pour KO à Tel Aviv 3, peut-être?

Article posté le lundi 01 septembre 2014 par Thierry Soulard

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À propos de l'auteur de cet article

Thierry Soulard

Thierry Soulard est journaliste indépendant, et passionné par les relations entre l'art et les nouvelles technologies. Il a travaillé notamment pour Ouest-France et pour La Nouvelle République du Centre-Ouest, et à vécu en Chine et en Malaisie. De temps en temps il écrit aussi des fictions (et il arrive même qu'elles soient publiés dans Lanfeust Mag, ou dans des anthologies comme "Tombé les voiles", éditions Le Grimoire).

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