Profitant d’une permission sur une île du Pacifique, deux marins désertent. Sans réellement le savoir, ils se retrouvent au milieu de la tribu des Taïpi, réputée cannibale. Stéphane Melchior, accompagné aux dessins de Benjamin Bachelier, adapte le roman d’Herman Melville, Taïpi un paradis cannibale aux éditions Gallimard.
DU BATEAU…
Au large des Iles Marquises. Marins sur un baleinier, Tom et Toby, n’en peuvent plus : ils souhaitent par tous les moyens, déserter. Malgré les mises en garde du vieux Barney, ils attendent d’être de l’Ile Nuka-Hiva pour fuir. Après un accueil pluvieux de la part de Moouanna, le roi des Téii et du contre-amiral Dupetit-Thouars, ils mettent les voiles vers le cœur de la forêt.
… A LA TRIBU DES TAÏPI
Dans leur besace, Tom et Toby emportent seulement du tabac, du pain, des biscuits, un coupe-chou et des couteaux. Arrivés en haute d’une colline, ils partent vers l’Ouest pour échapper aux Taïpi. Après une longue journée de marche, tout va pour le mieux; les deux déserteurs sont heureux. Mais un incident survient : Tom est foudroyé sur place par une douleur à la jambe. Une plaie surgit et s’infecte. Est-ce un serpent ?
En descendant vers la vallée, ils croisent alors le chemin d’un homme et d’une femme nus. Ils l’ignorent mais ce sont des Taïpi..
UNE ILE PAS SI HOSPITALIÈRE QUE CELA
En choisissant d’adapter le roman d’Herman Melville – une autobiographie de l’auteur dont le titre en anglais est Narrative of a Four Months’… Typee : A Peep at Polynesian Life … publié en 1846 – Stéphane Melchior a eu une riche idée. Cette histoire construite comme un récit d’aventure porche de la fable, retiendra l’attention des amateurs de voyage et d’exotisme. Se déroulant au XIXe siècle, elle se rapproche aussi des récits et voyages des grands explorateurs du XIVe siècle. De la découverte des coutumes au quotidien des villageois, tout est fait pour captiver le lecteur.
Il y glisse aussi de la tension et du suspens – les Taïpi feront-ils de leur deux invités, leur repas ? – mais aussi un brin d’humour bienvenu afin de préserver des espaces de respirations dans cette histoire qui flirte avec la comédie dramatique.
Les relations entre ces êtres proches de la nature qui ont su évoluer sur plusieurs siècles vers la sérénité et Toby & Tom dits « civilisés » sont portant agréables et cordiales. Les quiproquos s’enchainent – les deux déserteurs ne savent pas qu’ils sont dans cette tribu cannibale – mais les liens sont plus forts que la barrière de la langue ou leurs coutumes si différentes.
UN TRÈS BEL HOMMAGE A ASTERIX
Le lecteur observera le clin d’oeil malicieux du duo Melchior-Bachelier à Astérix dans la page 35. En effet, Tom et Toby se décrivent par des mimes aux Taïpi comme les deux gaulois l’ont fait auparavant lors de leur rencontre avec les indiens dans La grande traversée, vingt-deuxième album de l’univers créé par René Goscinny et Albert Uderzo.
Le scénariste des Royaumes du Nord (avec Clément Oubrerie, Fauve Jeunesse à Angoulême 2015) travaille de nouveau avec Benjamin Bachelier après le remarquable et très remarqué Gatsby le magnifique.
UNE AMBIANCE ET DES PAYSAGES ENCHANTEURS
Pour Taïpi, Benjamin Bachelier s’éloigne du style graphique entrevu dans le très bon Ulysse Wincoop (avec Marion Festraëts) pour proposer un trait vif, jeté et nerveux proche de l’esquisse ou du crayonné. Il dévoile des planches équilibrées au découpage d’une grande intelligence. Le dessinateur – qui débuta dans l’animation et l’illustration – restitue admirablement l’ambiance chaleureuse insulaire et met en scène avec talent les paysages enchanteurs des Iles Marquises.
- Taïpi, un paradis cannibale
- Scénariste : Stéphane Melchior, d’après le roman de Herman Melville
- Dessinateur : Benjamin Bachelier
- Editeur : Gallimard, collection Fétiche
- Prix : 20.90€
- Parution : 11 mai 2016
Résumé de l’éditeur : 1841. Un baleinier accoste aux Marquises, avec à son bord Tom et Toby, qui ne rêvent que de déserter. Profitant d’une permission, et malgré les mises en garde sur les dangers de l’île, les deux hommes s’enfoncent dans la jungle. Rien ne se passe comme prévu et la fuite dans cette nature luxuriante vire au cauchemar. D’autant que les fugitifs se retrouvent bientôt aux mains de la tribu Taïpi, réputée cannibale…
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.
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