Que la bête fleurisse

Aux éditions Cornélius, le premier album d’un jeune auteur  qui nous transporte dans l’univers des baleiniers du siècle dernier. Envoûtant.

LA DERNIERE MISSION

« Après plusieurs heures de poursuite parfois dramatique, si la baleine n’arrivait pas à s’écharper, ou à briser les pirogues, ses multiples blessures finissaient par amener sa mort. Le jet de ses évents diminuant d’intensité, se colorait de sang. La bête « fleurissait » disaient les pêcheurs… » Cet extrait des souvenirs de Louis Lacroix, capitaine au long cours, que Donatien Mary a choisi de mettre en exergue de son album permet de situer le décor de son histoire. L’océan, un bateau, et un équipage en quête de son gagne-pain , les baleines. Nous sommes probablement au 19 e siècle. Jusque là, rien de forcément original. On pense à Moby Dick ou à Jules Verne et aux récits d’aventure maritimes qui ont pu bercer nos enfances de lecteurs…

JOURNAL DE BORD

Ici, c’est autre chose. Une campagne de chasse qui ne démarre pas, faute de baleine, un équipage qui s’ennuie, qui boit et se bagarre. Le narrateur, conmme en voix off, c’est le capitaine, qui raconte la situation à travers des fragments de son carnet de bord. Ici, pas de phylactères mais de temps à autres, au fil des pages, des indications sur l’état d’esprit des marins. Un jour, surig on ne sait d’où, arrive sur le bateau un certain Stubb, harponneur de son état, qui semble doté d’un pouvoir étrange et bienenu, celui d’attirer à lui les baleines. Tout est alors transcendé. De fantômatique, la pêche devient miraculeuse, remplissant de tonneaux de graisse les caleses du navire…

GRAVURE SUR CUIVRE

L’histoire de l’équipage, bientôt sous la coupe de Stubb, se double de celle de ces dents de cachalot gravées de dessins mystérieux qu’on dépose à la porte de la cabine du capitaine. On y voit d’étranges scènes qui préfigurent la fin tragique de cette aventure. Pas de dialogues donc, mais un récit qui passe insensiblement du réalisme  au fantastique et offre au lecteur plusieurs niveaux  de lecture, plusieurs interprétations possibles. Ce procédé narratif assez rare se double d’une originalité graphique. L’auteur a utilisé la gravure sur cuivre pour réaliser ses cases. Le résultat? Un tourbillon d’eaux fortes grisées qui vous emporte loin, très loin, sur l’océan des songes…

Article posté le vendredi 28 novembre 2014 par Jean-Michel Gouin

  • Que la bête fleurisse
  • Auteur : Donatien Mary
  • Editeur : Cornélius
  • Prix : 22,50€
  • Sortie : 16 octobre 2014

Résumé de l’éditeur: Sur le pont d’un baleinier, l’équipage scrute l’horizon, plongé dans une attente mortifère. Malgré des semaines en mer et la certitude de tenir le bon cap, les proies ne se montrent toujours pas. Désespéré, le capitaine est sur le point d’abandonner cette désastreuse campagne de chasse, quand la découverte au pas de sa porte d’une dent de cachalot gravée coïncide avec l’apparition d’un banc de baleine. La chasse commence et la chance semble tourner. Les baleines sont là tous les matins, les cales se remplissent de graisse et régulièrement le capitaine trouve une nouvelle dent, ornée de créatures marines fantastiques.

À propos de l'auteur de cet article

Jean-Michel Gouin

Passionné par l'écrit, notamment l'histoire, la littérature policière et la bande dessinée, Jean-Michel Gouin est journaliste à Poitiers.

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