Brillant élève, Shigeo doit aller vivre chez son père pendant les longues vacances d’été. Le base-ball chevillé au corps, le trentenaire s’entraîne dur pour intégrer l’équipe professionnelle de Tokyo Giants. Cette passion à des années-lumière de la vie de l’écolier parviendra-t-elle à rapprocher ces deux êtres qui ne se connaissent pas vraiment ? Les éditions Kana dévoilent le premier volet du triptyque de Taiyô Matsumoto, Le rêve de mon père, l’un de ses premiers mangas publiés dans les années 90. Un petit bijou !
Aller vivre chez un père inconnu
Shigeo Hanada est heureux puisque s’ouvrent devant lui les vacances d’été, moment de repos mais aussi de révisions de ses cours. Elève studieux et brillant de CE2, il habite seul avec Kaori sa mère à Tokyo. Leur vie semble des plus douces. Mais le rêve d’un été agréable s’évanouit lorsque sa maman lui annonce qu’il doit aller vivre chez son père pendant ces vacances.
« C’est une blague ? Je n’ai aucune envie de vivre avec ce gaga de base-ball ! »
Son père, Hanao, trentenaire a quitté le foyer familial il y a quelques années pour s’adonner à sa passion du base-ball. Il s’entraîne dans un petit club de la banlieue de la capitale japonaise dans le but un jour d’intégrer l’équipe professionnelle des Tokyo Giants.
Les premiers pas délicats de la cohabitation
Pestant de tout son être, Shigeo doit faire sa valise et se rendre chez Hanao. Dès son arrivé, le jeune garçon remet son père à sa place et met une grande distance avec lui. Il veut même l’appeler Tonton puisque jusqu’à présent, il ne s’est jamais occupé de lui.
Dès le lendemain matin, Hanao réveille son fils en fanfare : il l’emmène courir. Un véritable calvaire. De retour à la maison et devant un repas, le garçon de huit ans est sans pitié pour son géniteur et lui explique qu’il n’a ni la carrure, ni la santé, ni le talent pour devenir joueur pro de base-ball. Pire, il lui dit: « Applique-toi si tu veux être un bon père ! »
Le rêve de mon père : pour se redécouvrir
Tendre et drôle, l’histoire de Taiyô Matsumoto nous touche par son intelligence et son universalité. Prépublié au Japon en 1992 dans la revue Big Comics Spirit des éditions Shôgakukan, Le rêve de mon père est donc l’une des premières séries éditées du mangaka japonais.
Né en 1967, Taiyô Matsumoto a remporté le concours Comic Open Contest qui lui a ouvert les portes du magazine Comic Morning de Kôdansha puis celle de Morning où il publie Straight, un manga déjà sur le base-ball en 1988. Arrivent ensuite Zero puis Hana Otoko (Le rêve de mon père). La célébrité, il la doit à la série Amer Béton (100 000 exemplaires de vendus, une pièce de théâtre). Puis, il lance Comic Are ! un magazine où il réalise Frères du Japon. Viennent ensuite Ping-Pong en 1996, Gogo monster, Number Five, Le samouraï bambou (Prix culturel Osamu Tezuka en 2011) ou encore Sunny, merveilleuse série sur l’enfance en sélection à Angoulême en 2015 (Prix Micheluzzi de la meilleure série de bande dessinée étrangère) et plus récemment Les chats du Louvre (2 volumes chez Futuropolis).
Génial auteur de manga, Taiyô Matsumoto livre avec Le rêve de mon père, un de ses récits les plus personnels (avec Sunny, plus autobiographique). Ce seinen pour les plus de 16 ans est prévu en trois volumes. Il met en lumière les difficultés des relations humaines dans une famille éclatée. D’un côté un garçon intelligent qui ne pense qu’à réviser et de l’autre un père qui fut absent pour lui et qui se rêve en joueur de base-ball. Les passes-d’arme et les pics sont fréquentes dès le début du manga, ce qui apporte de l’humour à l’histoire. En jouant sur les bons mots, le petit garçon fait payer au trentenaire son absence dans son éducation.Il faut dire que Shigeo considère son géniteur quasiment comme un parasite de la société, bête et qui ne vit que pour un passe-temps sans intérêt. Deux univers qui doivent composer ensemble pendant un mois. Enfant renfermé, Shigeo doit alors s’ouvrir aux autres par la passion envahissante de Hanao.
Un trait réaliste somptueux
Que l’on ne s’y méprenne pas, le base-ball n’est que la toile de fond de Le rêve de mon père. Ce sport sert la relation père/fils du manga.
Le trait réaliste de Taiyô Matsumoto est somptueux. Son dessin est singulier et original, n’existe nulle part ailleurs dans le monde du manga et il est reconnaissable d’un simple coup d’œil. Audacieux, son graphisme est novateur et très vivant.
Le rêve de mon père : titre majeur et fondateur de Taiyô Matsumoto. Une série qui permet d’entrer en douceur dans l’univers singulier de ce mangaka important au Japon.
Il est à noter que Taiyô Matsumoto sera l’invité d’honneur du prochain Festival BD d’Angoulême en 2019. Une rétrospective de 200 originaux, Dessine-moi un enfant, sera présentée dans la cité angoumoisine.
- Le rêve de mon père, volume 1/3
- Auteur : Taiyô Matsumoto
- Editeur : Kana, collection Made In
- Parution : 21 septembre 2018
- Prix : 12.70€
- ISBN : 9782505072195
Résumé de l’éditeur : Shigeo est un élève très studieux qui vit seul avec sa mère. Alors que les vacances d’été débutent, il est contraint d’aller vivre chez son père, Hanao. Ce dernier est un trentenaire qui a quitté le foyer pour devenir joueur de base-ball professionnel dans l’équipe des Tokyo Giants. Tout oppose ce père rêveur qui est resté un grand enfant et son fils, plus terre-à-terre, qui ne pense qu’à ses études. Finalement, il se pourrait bien que Shigeo découvre que l’apprentissage de la vie ne se fait pas qu’à l’école…
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.
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