Superman Lost

Le temps est relatif. Il ne s’écoule pas à la même vitesse partout, tout le temps. Et c’est sur ce principe que Christopher Priest et Carlo Pagulayan ont bâti une histoire complète de dix épisodes pour Superman. Une histoire ambitieuse sur le fond et constante sur la forme. On ne peut qu’applaudir Superman Lost, publié par Urban Comics.

Superman Lost : le PTSD est-il plus fort que le fils de Krypton ?

Un soir, Superman est appelé à l’aide. La Ligue de Justice doit intervenir sur une crise. Quelques heures plus tard, Loïs se réveille et trouve Clark en tenue dans le salon, comme sous le choc. Bruce Wayne ne tarde pas à arriver. Car en fait, si quelques heures ont passé pour eux, ce sont plus de vingt années qui se sont écoulées pour Clark. Mais qu’a-t­-il vécu entretemps et pourra-t’il se remettre de son traumatisme ?

DC mise sur le respect des dessinateurs

Un premier bon point à signaler, qui est la force de DC par rapport à Marvel en ce moment : la constance graphique. Carlo Pagulayan réalise les dix épisodes, avec quelques incursions de la part de partenaires venant la plupart du temps illustrer des décalages temporels. Vous verrez à la lecture. Pagulayan, avec son trait réaliste, précis et fermé, incarne un visage du dessin comic-book mainstream moderne. Son dessin est parfaitement lisible, simple à comprendre. Il choisit avec attention les détails qu’il propose et les masses sombres qui permettent un encrage léger qui laisse une belle place aux couleurs. Superman Lost ne déçoit jamais du point de vue des graphismes.

Superman Lost : l’histoire qui met Superman sur le divan

Superman Lost extrait 2Qu’en est-il de l’histoire ? Superman Lost, c’est un concept audacieux bien tenu jusqu’à la fin. Imaginez donc le traumatisme d’un héros qui a mis vingt ans à retrouver la Terre. Une Terre qui elle, n’a évolué que de quelques heures. Le décalage potentiel est immense. Christopher Priest et Pagulayan jouent avec le syndrome post-traumatique assez légitime après une telle épreuve.

Une grande force de ce récit, c’est de jouer autant avec les petits détails qu’avec la grande fresque cosmique. Clark, après des décennies dans l’espace, retient son souffle en permanence pour économiser son oxygène. Ses collègues de boulot deviennent de véritables étrangers. On croit au mal-être de Clark. On vibre avec lui. Et dans le même temps, grâce aux flashbacks, les deux co-scénaristes développent l’immensité de l’univers et s’amusent des ficelles scénaristiques employées par leurs confrères pour ne pas tenir compte de cette immensité dans les récits cosmiques.

Être auteur de comic-book et jouer avec la continuité

Superman Lost est un récit tout à fait accessible pour qui ne suit pas avec assiduité l’univers DC. Mais pour les autres ? Cette mini-série se déploie dans la continuité classique DC. En tous cas rien ne vient contredire cette affirmation. Mais la trame principale du récit ne développe pas du tout cette absence de vingt ans pour le personnage de Clark. Alors ? Alors les deux auteurs se montrent malin. Sans rien divulgâcher, dites-vous qu’ils tiennent compte de ce paradoxe et que vous aurez votre réponse. Certains la trouveront facile, d’autre maline. Elle n’enlève en tous cas rien à la grandeur d’âme de Superman.

Superman Lost : un bon feuilleton d’aventure humaine

Car finalement, tout le propos de Superman Lost, c’est bien de savoir si le symbole d’espoir et de grandeur d’âme que représente le personnage peut tenir face au traumatisme. On appréciera au passage l’utilisation du personnage de Lex Luthor en antagoniste secondaire mais toujours autant plein de sens pour le héros. Superman est-il toujours le plus grand des héros ? La réponse dans le dernier chapitre de cette histoire.

Superman Lost est donc une belle aventure de Superman moderne, accessible à toutes les lectrices et lecteurs. C’est une déclaration d’amour au personnage et à ce qu’il représente, grâce à deux auteurs qui savent transmettre cette passion aux autres.

Article posté le dimanche 01 décembre 2024 par Yaneck Chareyre

Superman Lost
  • Superman Lost
  • Scénaristes : Christopher Priest, Carlo Pagulayan
  • Dessinateurs : Carlo Pagulayan, Lee Weeks, Will Conrad, Dan Jurgens, José Luis
  • Encreurs : Jason Paz, Joe Pradon, Julio Ferreira, Jonas Trindade
  • Coloristes : Jéromy Cox, Elizabeth Breitweiser
  • Traducteur : Jérôme Wicky
  • Éditeur USA : DC Comics
  • Éditeur France : Urban Comics
  • Date de publication France : 12 avril 2024
  • Nombre de pages : 248
  • Prix : 25€
  • ISBN : 9791026828945

Résumé éditeur : Lois Lane et Clark Kent filent le parfait amour, dans un appartement normal, avec leurs petites habitudes de couple normal. Clark enfile certes collants et cape de temps à autre pour sauver le monde, mais à part ça, tout est des plus ordinaires à Metropolis. Jusqu’au jour où Superman rentre à la maison, après une mission de routine… Debout au milieu du salon, il garde son costume, montrant tous les signes extérieurs d’un trouble de stress post-traumatique, et déclare : « Je suis parti… 20 ans. »
SUPERMAN : LOST, une maxi-série de dix numéros scénarisée par Christopher PRIEST, à qui l’on doit un run de Black Panther chez Marvel, mais également des passages sur la JUSTICE LEAGUE et DEATHSTROKE.

À propos de l'auteur de cet article

Yaneck Chareyre

Journaliste , critique et essayiste BD depuis 2006.

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