Les larmes du héros de George Rémi démontrent la solidarité du monde dessiné avec la population de la capitale belge après les attentats de ce matin.
Dans Bruxelles frappée au cœur, meurtrie, désemparée, débordée, recroquevillée sur sa terreur, sur l’horreur, les premières réactions du net se sont traduites, comme à Paris en janvier et en novembre, par des dessins. L’une des armes de base pour ne pas succomber à la tentation de la peur, mais aussi pour hurler sa tristesse et sa solidarité.
Tintin et Milou en pleurs, le Capitaine Haddock en colère
Et comme par hasard, mais justement ce n’est pas par hasard, les toutes premières images qui sont apparues sur les réseaux sociaux représentaient – plus ou moins copiés, plus ou moins détournés – un jeune homme en pleurs, reconnaissable à sa houpette blonde ; ou son compagnon, un marin barbu éructant contre les lâches et les assassins ; voire son petit chien blanc, un fox-terrier, lui aussi en larmes.
Personnages universels et auteur Belge
Tintin, le capitaine Haddock, Milou font depuis (très) longtemps figures de héros universels. L’oeuvre de leur créateur, George Rémi a été analysée, décortiquée dans tous les sens et à chaque fois pour dire combien ces personnages parlaient aux lecteurs du monde entier. Eh bien, oui et non : car ne l’oublions pas, Hergé est Belge. Une fois ! Bruxellois même, parlant le « brusseleir » de sa grand-mère, originaire d’Etterbeek (commune de la capitale au même titre que Molenbeek, par exemple) comme Quick et Flupke, gamins des Marolles (avec sa place et son marché aux puces) peuvent en témoigner. Tintin est belge, lui aussi, né natif du Petit XXе, supplément d’un grand quotidien de la capitale fédérale du « plat pays qui est le sien ».
L’image symbolique du héros en larmes
Cette image symbolique du héros de papier pleurant (souvent avec des larme rouges et jaunes, couleurs du drapeau national) choisie en guise d’hommage par les dessinateurs-internautes (comme beaucoup, Sfar a aussi représenté le Manneken-piss) est tirée de la page 5 de l’album Tintin au Tibet. Ces larmes-là ont déjà servi : on se souvient peut-être de l’image agrandie de Milou hurlant… à la mort qui avait été utilisée à la page Une du journal Libération pour annoncer le décès de George Rémi (en 1983).
Quand Tintin pleure, le monde entier souffre avec la Belgique
En ces heures tragiques, abominables, le premier réflexe des dessinateurs du net est donc d’associer naturellement à la douleur et la peine collective, celui qui représente le mieux, à leurs yeux, le symbole universel (on y revient) de la Belgique. Quand Tintin pleure, c’est parce que c’est tout le royaume qui souffre. Et quand Tintin pleure, le monde entier souffre avec la Belgique. La solidarité par le dessin. Grâce à Hergé.
À propos de l'auteur de cet article
Erwann Tancé
C’est à Angoulême qu’Erwann Tancé a bu un peu trop de potion magique. Co-créateur de l’Association des critiques de Bandes dessinées (ACBD), il a écrit notamment Le Grand Vingtième (avec Gilles Ratier et Christian Tua, édité par la Charente Libre) et Toonder, l’enchanteur au quotidien (avec Alain Beyrand, éditions La Nouvelle République – épuisé). Il raconte sur Case Départ l'histoire de la bande dessinée dans les pages du quotidien régional La Nouvelle République du Centre-Ouest: http://www.nrblog.fr/casedepart/category/les-belles-histoires-donc-erwann/
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