Aurora #1 – Phénomènes –

Lorsque l’on découvre une série dirigée par le tandem Bec/Raffaele, on sait pertinemment que celle-ci ne sera pas à mettre entre toutes les mains. Tant leur terrain de jeu implique les thèmes de la violence et de l’angoisse avec un savoir-faire qui n’est plus à prouver, Aurora ne déroge pas à la règle. Pour ce premier tome qui en comptera six, l’intrigue se développe autour d’un phénomène exceptionnel : l’apparition d’une immense aurore boréale qui entoure toute la surface de la Terre durant 24 heures. Avec une conséquence inquiétante pour les 222 000 enfants qui naîtront ce même jour. 

UNE VIOLENCE INCONTRÔLABLE

2046. Francfort, Allemagne et Khorat, nord-est de la Thaïlande. Dans ces deux villes très éloignées l’une de l’autre vont pourtant se dérouler au même moment des événements aussi irraisonnés que sanglants. Un homme et deux femmes vont littéralement perdre tout contrôle et, comme s’ils étaient habités, commettre des actes d’une extrême violence qui finiront dans un bain de sang.

NAISSANCE DES ENFANTS DE L’AURORE

Une vingtaine d’années auparavant, c’est en Antarctique puis en Inde que nous retrouvons trois jeunes femmes prêtes à accoucher. Parmi elles, deux deviendront des personnages récurrents de ce premier tome. La troisième aura probablement son importance dans la suite de la série.

Pour l’heure, chacune d’entre elles est en train de mettre au monde son enfant lors d’une journée pas comme les autres. Car dans le même temps, un spectacle unique et éphémère est en train de figer le monde entier : une gigantesque aurore boréale rouge entoure la surface de la Terre.

C’est lors de ce phénomène qui durera vingt-quatre heures que naîtront Viktoria et Jackichand comptant parmi les 222 000 bébés baptisés symboliquement : les enfants de l’Aurore.

LE COMPORTEMENT INQUIÉTANT DE JACKICHAND

Pendant les onze années qui suivront ce jour spécial, nous allons suivre l’évolution de certains d’entre eux. Au travers notamment de Jackichand dont le comportement intrigue autant qu’il inquiète. Doté d’une intelligence hors norme, le garçon semble dépourvu de toute empathie. Pire, son arrogance envers les membres de son entourage provoque des situations dérangeantes qui interpellent de plus en plus sa mère.

À l’image des attitudes d’autres enfants nés ce fameux jour, Jackichand ne montre aucune expression sur son visage. Comme si rien ne paraissait l’émouvoir. Si on peut discerner une faiblesse, elle se traduit dans son sommeil. Le seul moment où on le sent plus fébrile lorsque ses rêves semblent inlassablement lui marteler quelques mots qui résonnent comme le chemin qu’il devra suivre.

Jackichand et Viktoria finiront par se rencontrer. Ils se rendront vite compte du lien qui les unit. Et tout laisse à penser qu’ils seront des éléments clés dans le déroulement de l’intrigue.

UNE COLLABORATION TOUJOURS REMARQUABLE

Si l’on devait définir en un mot le résultat de l’association Christophe Bec et Stefano Raffaele, il suffit de se pencher sur leurs précédentes associations mémorables pour que l’emploi du terme alchimie soit une évidence. Après Pandémonium, Sarah ou encore Spider, les deux hommes collaborent de nouveau avec Aurora, une série qui comptera six tomes.

UNE INTRIGUE INTENSE SERVIE PAR UN DÉCOUPAGE MAÎTRISÉ

Phénomènes est le titre de cette première partie. Et qui dit première partie, dit mise en place de l’intrigue. Dès la première planche se dégage une atmosphère houleuse qui n’offrira aucun répit tout au long de l’album. Habitué des scènes qui marquent les esprits, le scénariste d’Aurora détaille une nouvelle fois des séquences d’une violence parfois à la limite du soutenable. Celle qui s’étend sur cinq pages, est d’une saisissante intensité. Habillée par le message Run Hide Tell, entrevue plusieurs fois, et qui accentue un peu plus l’impuissance de réaction face à cet inqualifiable bain de sang.

Outre ces quelques passages justifiant les intentions destructrices des enfants de l’Aurore, d’autres aspects sont à mettre au crédit de Christophe Bec. Il y a ce découpage d’une réelle efficacité. Qu’il soit dynamique, ou plus sobre quand les scènes l’imposent, il permet une lecture agréable pour son rythme équilibré. Renforcé par une transition parfaite entre chaque séquence, le récit de ce premier tome d’Aurora se déroule en toute fluidité.

L’ATOUT PUISSANCE DE S. RAFFAELE

Et bien qu’il soit aussi bon dessinateur (Sanctuaire) que scénariste, Christophe Bec a choisi celui avec qui la magie opère à chaque fois pour illustrer Aurora. Stefano Raffaele est comme toujours, d’une belle justesse graphique. Dès cette couverture accrocheuse où il donne tous les éléments importants qui se développeront dans l’album, le reste n’est que réussite de bout en bout. Par ses cadrages des visages en gros plan permettant de ressentir au plus près les émotions des personnages, ou bien les passages précédemment évoqués qu’il dessine avec son trait si réaliste. Stefano Raffaele apporte une puissance dans le récit dont l’apogée se révèle dans l’imposante double page représentant l’aurore boréale.

LE ROUGE SANGLANT DE Stéphane PAITREAU

Si la colorisation dans un album est souvent importante pour bonifier les ambiances voulues, celle d’Aurora est primordiale tant le rouge est un critère phare du récit. Pour cet exercice, Stéphane Paitreau a, lui aussi, apporté sa pierre à l’édifice. L’une des trois couleurs primaires qu’on associe naturellement au symbole du feu et du sang, est brillamment utilisée. Mais le coloriste donne aussi les nuances idoines selon les pays visités ou les scènes décrites.

AURORA : FRUIT DE L’IMAGINATION FANTASTIQUE DE C. BEC

Pour la petite histoire, la naissance des enfants de l’Aurore est arrivée comme une évidence un matin au réveil, dans les pensées du scénariste de Prométhée. Christophe Bec tenait un sujet qu’il n’a pas réfléchi, mais qui est venu spontanément à lui. Aurora est-il le fruit de l’abondante imagination d’un auteur expert dans le genre fantastique ? C’est probablement l’un des ingrédients. Mais encore faut-il avoir la maitrise technique nécessaire pour que la structure scénaristique accompagne efficacement l’idée de départ. Et avec C. Bec, on a toujours cette agréable sensation quand on s’imprègne de ses créations : il sait où il va et qu’on aime la destination finale ou pas, il donnera tout pour nous faire apprécier le voyage. Et, accompagné des deux membres de son équipage, nous suivrons avec envie les cinq autres étapes !

Article posté le lundi 03 avril 2023 par Mikey Martin

Premier tome d'Aurora, série Fantastique de Christophe Bec & Stefano Raffaele (Soleil), décrypté par Comixtrip, le site BD de référence.
  • Aurora, Tome 1 : Phénomènes
  • Scénariste : Christophe Bec
  • Dessinateur : Stefano Raffaele
  • Coloriste : Stéphane Paitreau
  • Éditeur : Soleil
  • Prix : 15,95 €
  • Parution : 18 janvier 2023
  • Pages : 68
  • ISBN : 978-2302092068

Résumé de l’éditeur : Lorsque s’alignent les huit planètes de notre système solaire, les Enfants de l’Aurore passent à l’action, avec une coordination inexplicable, dans un but de domination et d’asservissement de l’espèce humaine. Leurs caractéristiques de naissance en font des êtres froids et calculateurs. Ceux qui refusent de se soumettre deviennent des proies, les Enfants de l’Aurore se révélant des exterminateurs d’une efficacité terrifiante.

À propos de l'auteur de cet article

Mikey Martin

Mikey, dont les géniteurs ont tout de suite compris qu'il était sensé (!) a toujours été bercé par la bande dessinée. Passionné par le talent de ces scénaristes, dessinateur.ice.s ou coloristes, il n'a qu'une envie, vous parler de leurs créations. Et quand il a la chance de les rencontrer, il vous dit tout !

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