Les éditions Delirium prolongent les fêtes en publiant Grandville – Noël, la suite de la géniale série de Brian Talbot. Enfilez votre redingote, mettez votre chapeau melon, car il neige et l’inspecteur LeBrock n’attendra pas !
Grandville, Noël : Le blaireau de la farce.
Alors que nous avions laissé notre blaireau préféré de Scotland Yard dans le milieu troublé de l’Art parisien, nous le retrouvons quelques mois plus tard au moment des fêtes de fin d’année.
Mais c’est bien connu : il n’y a pas de vacances pour les braves ! Et alors que dans toutes les chaumières, on prépare Noël avec impatience, l’inspecteur LeBrock accepte d’enquêter sur la disparition de la nièce de Mrs Doyle, sa logeuse. Bien vite, ses investigations l’amènent à porter son attention sur une mystérieuse secte à la tête de laquelle trône Apollon, une licorne immaculée.
Noël : ses cadeaux, ses guirlandes et ses disparitions inquiétantes.
Au programme de ce nouvel opus, point de vieil homme en rouge. Mais à la place, nous aurons droit à du fanatisme, des meurtres de masse, des enlèvements, des désirs d’extermination fascistes mais tout de même un peu de folklore.
On l’aura compris, bien loin du simple épisode de Noël, le très talentueux Brian Talbot va profiter de l’occasion pour développer l’univers qu’il a inventé. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est d’une richesse qu’on ne soupçonnait pas.
Grandville Noël : Jingle bêle.
Et comme toujours avec cette formidable série, le plaisir se développe par vagues successives. Au départ, on est happés par l’univers peuplé d’animaux anthropomorphes et de quelques êtres humains, les « pâtes à pain ». Puis, avec un engouement incontestable, on suit une intrigue parfaitement construite dans les rues de ce Paris alternatif. Et comme toujours, les références sont nombreuses. Mais la série avançant, elle se font plus discrètes ou plutôt, finissent par se fondre dans le paysage.
Ainsi, la relecture de l’album accompagnée des notes finales est un moment de lecture exquis. Brian Talbot y fait montre de sa grande culture et de la minutie avec laquelle il élabore ses œuvres. Ne perdant jamais l’occasion de dévoiler son goût pour la culture française, il comble les lecteurs de l’hexagone. Le fait est qu’il est difficile de retenir un sourire quand, par exemple, LeBrock fait la rencontre d’un détective humain à la mèche hirsute, répondant au nom de Chance et tirant plus vite que son ombre.
Mais ce n’est pas tout.
Noël, ses joies et ses mystères.
En effet, les premiers tomes portaient notre attention sur les personnages et l’univers immédiat dans lequel ils évoluent. Désormais ce dernier opus explore des horizons bien plus profonds et troubles. Le fait est que bien vite, on se rend compte que le thème de Noël, pourtant malicieusement introduit dès le titre, ne sera paradoxalement qu’un prétexte. Ainsi, en mettant de côté le folklore moderne, Brian Talbot préfère s’intéresser aux divers mythes qui lui sont associés. De cette manière, l’image christique, portée par l’emblématique personnage d’Apollon, mais aussi la conception païenne de la fête vont petit à petit introduire une réflexion qui rappelle les heures les plus sombres du XXème siècle. Rapidement, on comprend que les enjeux que souhaite aborder le scénariste dépassent la simple disparition d’une fillette. Et finalement, la réflexion humaniste de Brian Talbot touche autant au but qu’elle réconforte.
Désormais, la sortie de chaque tome de Grandville est un événement. C’est bien simple, chaque volume lu semble le meilleur de la série… jusqu’à ce qu’on découvre le suivant. Cette année, le plus beau cadeau de Noël est sorti en janvier. Il a pour titre Grandville – Noël et il porte le logo Delirium !
- Granville – Noël
- Auteur : Bryan Talbot
- Traducteur : Philippe Touboul
- Éditeur : Delirium
- Prix : 22 €
- Parution : 19 janvier 2024
- ISBN : 9782493428325
Résumé de l’éditeur : Noël approche mais il n’y a pas de répit pour l’inspecteur LeBrock de Scotland Yard. Alors qu’il enquête sur une disparition, la piste qu’il suit le mène à une secte religieuse en plein essor, où un messie licorne charismatique et ses acolytes, déjà responsables de meurtres de masse aux Etats-Unis, sont sur le point de mener une croisade pour le nettoyage ethnique des « pâtes-à-pain » de l’Empire français, surnom péjoratif donné aux humains par le reste de la population anthropomorphe. De retour à Grandville et en l’absence de son fidèle compagnon Ratzy, il fait équipe avec Chance Lucas, détective de l’agence Pinkerton. Là, il va se heurter à la fois aux fanatiques du culte et aux terroristes humains, découvrant au passage les traces d’une vielle conspiration religieuse… « Il y a deux cents ans, l’Angleterre perdit la guerre contre Napoléon. Comme le reste de l’Europe, elle fut envahie par la France et la famille royale fut guillotinée ». Bienvenue dans un monde où l’Empire Français règne sans partage depuis son opulente capitale rebaptisée Grandville.
À propos de l'auteur de cet article
Victor Benelbaz
Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.
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