L’inspecteur LeBrock est de retour dans un troisième tome inédit en France. Grandville, l’excellente série de Bryan Talbot, n’a pas livré tous ses secrets et les éditions Delirium nous permettent de poursuivre l’aventure.
Grandville – Bête Noire : L’Empereur est mort !
Il y a plus de deux siècles, Napoléon a vaincu l’Angleterre. Son Empire s’est étendu au-delà de l’entendement. Et en lieu et place de Paris, une cité au nom éloquent devint le fer de lance de l’Empire. Il s’agit de Grandville. Mais désormais, Napoléon XII, dernier du nom, n’est plus. Nul doute que des luttes intestines vont faire rage pour conquérir le pouvoir.
Et pourtant, c’est dans un milieu inattendu que les premiers signes apparaissent.
Panique dans les milieux artistiques.
En effet, le célèbre peintre figuratif Gustave Corbeau a été retrouvé mort dans son atelier. Peu d’indices… Si ce n’est qu’il travaillait à la réalisation d’une fresque monumentale à la gloire du conseil révolutionnaire. À qui profite le crime ? À Auguste Rodent qui a récupéré le projet faramineux ? Aux opposants à la cause révolutionnaires ? À la nouvelle vague, groupe de peintres ayant décrété la mort de l’art figuratif ? Les pistes sont nombreuses, mais l’inspecteur détective LeBrock de Scotland Yard veille. Et, la tâche promet d’être lourde, même pour ses larges épaules de blaireau. Car oui, dans Grandville, de nombreux protagonistes sont des animaux.
Grandville : l’autre chef d’œuvre animalier.
Ainsi, à l’image de Blacksad, le chef d’œuvre de Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido, Grandville met en scène des animaux anthropomorphes. Et chaque espèce est choisie avec minutie pour fait écho au caractère du personnage. Rats, blaireaux, chats, crapauds, gorilles et même girafes vont donc se retrouver dans ménagerie dirigée de main de maître par le malicieux francophile Bryan Talbot (Némésis).
Une bande dessinée à l’accent français.
Le fait est que le charme de Grandville provient en partie de l’univers créé, astucieux assemblage mêlant Art nouveau et Steampunk. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le scénariste, en véritable amoureux de la France connaît son sujet. En effet, au détour de chaque page, chaque case presque, on repère une référence à la culture française avec une nette attirance vers les milieux artistiques. Et en parallèle de la passionnante intrigue policière, on prend un réel plaisir à chercher les clins d’œil qui nourrissent l’univers de manière impressionnante. Les notes exhaustives ajoutées en fin de volume viendront d’ailleurs compléter d’éventuels oublis.
Avec tous ces éléments, Grandville aurait de quoi ravir bon nombre de lecteurs. Et pourtant, les attraits de l’œuvre sont encore nombreux.
Un polar sous influence.
Après un premier tome influencé par l’univers de Quentin Tarantino, un second aux accents hitchcockiens, Bête Noire apparaît comme un hommage aux films de James Bond. Ainsi, les situations et les méchants surtout font régulièrement entendre la célèbre musique de John Barry. Ernst Stavro Blofeld est de retour sous les traits du machiavélique Baron Aristote Crapaud, le bien nommé. Et avouons-le le coup fait mouche.
Avec Bête Noire, troisième opus de Grandville, Bryan Talbot fait une fois de plus preuve de son formidable talent. Cette œuvre d’une richesse étourdissante se présente indéniablement comme un chef d’œuvre de la bande dessinée. Et on ne remerciera jamais assez les éditions Delirium de nous donner la chance de la découvrir en français.
- Granville – Bête Noire
- Auteur : Bryan Talbot
- Traducteur : Philippe Touboul
- Éditeur : Delirium
- Prix : 22 €
- Parution : 08 septembre 2023
- ISBN : 9782493428240
Résumé de l’éditeur : Le peintre Gustave Corbeau vient d’être assassiné en plein coeur de Grandville et la police fait appel à Lebrock pour résoudre l’affaire. A peine lancé dans l’enquête c’est au tour d’Auguste Rodent, grand rival de Corbeau, de se faire occire ! Mais qui peut bien en vouloir ainsi aux grandes figures de la peinture figurative ? Y aurait-il un intérêt politique à bouleverser ainsi le monde de l’art ? Est-ce que cela rentrerait dans un complot bien plus vaste ? Toute ressemblance avec un monde peuplé par les humains serait-elle fortuite ? «Il y a deux cents ans, l’Angleterre perdit la guerre contre Napoléon. Comme le reste de l’Europe, elle fut envahie par la France et la famille royale fut guillotinée ». Bienvenue dans un monde où l’Empire Français règne sans partage depuis son opulente capitale rebaptisée Grandville.
À propos de l'auteur de cet article
Victor Benelbaz
Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.
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