Grandville

L’inspecteur LeBrock de Scotland Yard est chargé d’enquêter sur une vagues de crimes et de suicides à Grandville, la capitale de l’empire français. Depuis le triomphe de Napoléon sur l’Angleterre, cette dernière fait partie intégrante du vaste royaume français. Bryan Talbot dévoile les aventures de LeBrock dans un récit polar steampunk qui pulse, édité dans une superbe version par Delirium. Génial !

Grandville, capitale de l’empire français

«Il y a deux cents ans, l’Angleterre perdit la guerre contre Napoléon. Comme le reste de l’Europe, elle fut envahie par la France et la famille royale fut guillotinée.» La famille royale britannique fut guillotinée et Napoléon devint l’empereur de quasiment toute l’Europe. Mais pour préserver sa tranquillité, il y a peu, le nouveau souverain Napoléon XII a accordé une petite partie d’indépendance à l’Angleterre.

Depuis, les anarchistes et indépendantistes multiplient des attentats dans la République socialiste de Grande-Bretagne mais également à Grandville.

Blaireau mais pas trop

L’un d’entre eux, Raymond Leigh-Otter, réussit à fuir la police française en semant le chaos derrière lui. Mais quelque jours plus tard, l’homme est retrouvé gisant dans une flaque de sang, un revolver en main.

L’inspecteur-détective de Scotland Yard LeBrock est dépêché sur place pour l’enquête. Il est accompagné de son adjoint, l’inspecteur Ratzi. Rapidement ses conclusions sont claires. Ils doivent se rendre à Grandville pour éclaircir ce qui ressemble à un meurtre.

Une affaire politique mystérieuse

A Grandville, LeBrock et Ratzi se rendent aux Folies Bergères, un lieu fréquenté par Leigh-Otter. Le détective interroge alors Sabrina, proche du défunt mais également Sarah Blairow, la grande actrice.

Ils sont alors interrompus par des hommes de main des services français. L’inspecteur-détective demande à la célèbre comédienne de se cacher en attendant d’y voir plus clair…

Grandville, une très belle édition

Publié en version originale par Vintage en 2009 et deux ans plus tard en France chez Milady, Grandville est un très grand album de Bryan Talbot. Cette édition de Delirium bénéficie d’une postface de l’auteur mais surtout de ses commentaires sur cinq pages et d’un cahier iconographique. Non seulement le lecteur peut découvrir les intentions de Bryan Talbot, mais aussi ses références, ses hommages ou clins d’œil nombreux dans son album.

De Spirou, à Maus de Spieglman, de Gustave Doré à Bécassine de Pinchon, de Manet à Mucha, de Tintin à Jacques-Louis David, il explique chacun de ses « emprunts » à la culture.

Robida en majesté

L’auteur de Louise Michel et Némésis le sorcier fait aussi appel à Albert Robida, l’illustrateur de nombreux récits de proto science-fiction ou d’un Tarzan avant Edgar Rice Burroughs avec Voyages très extraordinaires de Saturnin Farandoul dont Alex Baladi s’est inspiré pour imaginer Saturnine.

Bryan Talbot y fait donc souvent référence dans Grandville, notamment pour ses personnages mais également pour la fameuse Tour Robida ayant un rôle important dans son récit.

Steampunk et uchronie

Grandville c’est un excellent polar, un récit qui pulse, qui dézingue à tour de bras. Une vraie aventure steampunk où les machines volantes rivalisent avec les armes de guerre aux mains des malfrats et de la police. Bryan Talbot met en scène un Paris Art déco dans une uchronie intelligente. Les artistes de cette période sont là, telle Sarah Bernhardt.

Il y a aussi les complots et les intrigues politiques et financières qui entrent en jeu dans son intrigue. En cela, Grandville se glisse dans les pas de Sherlock Holmes de Guy Ritchie mais aussi dans ceux de Quentin Tarantino.

Dans Granville, l’Anthropomorphisme au sommet

Quant au dessin, il fera penser à Blacksad ou encore Mouse Guard de David Petersen, des références pour Grandville. Mais il remercie également Jean Ignace Isidore Gérard, illustrateur français connu sous le nom de J.J. Grandville et adepte du zoomorphisme. Car les animaux de Grandville sont anthropomorphes. Et ce genre est magnifique sous les pinceaux de Bryan Talbot. S’il utilise une méthode traditionnelle pour dessiner et encrer, il rehausse ses couleurs grâce à Photoshop, d’où ce très beau mélange.

LeBrock est un blaireau comme Sarah Blairow, Ratzi est un rat, Napoléon est un lion, le ministre de la guerre est un rhinocéros, et ainsi de suite. Tous les personnages sont très bien campés.

Délirium a eu une excellent idée de proposer aux lecteurs français Grandville, tant ce premier volet est génial ! On attend avec hâte le deuxième tome de cette excellente série de Bryan Talbot.

Article posté le lundi 13 février 2023 par Damien Canteau

Grandville 1 de Bryan Talbot (Delirium)
  • Granville
  • Auteur : Bryan Talbot
  • Traducteur : Philippe Touboul
  • Éditeur : Delirium
  • Prix : 22 €
  • Parution : 03 février 2023
  • ISBN : 9782493428134

Résumé de l’éditeur : « Il y a deux cents ans, l’Angleterre perdit la guerre contre Napoléon. Comme le reste de l’Europe, elle fut envahie par la France et la famille royale fut guillotinée. » Bienvenue dans un monde où l’Empire Français règne sans partage depuis son opulente capitale rebaptisée Grandville. Mais la situation est loin d’être idyllique : les beaux quartiers au faste sans pareil de la Belle Epoque peinent à dissimuler les fissures d’un Empire qui commence à vaciller, en Europe comme dans ses lointaines colonies. La contestation sociale gronde de plus en plus fort, exacerbée par les attentats des groupuscules anarchistes et les tensions ravivées avec le voisin Anglais. C’est dans ce contexte explosif que l’inspecteur LeBrock de Scotland Yard arrive dans la capitale de l’Empire pour tenter d’enquêter sur une mystérieuse vague de crimes et de suicides. Mais le fil qu’il va commencer à dérouler risque bien de le mener face à des ennemis extrêmement puissants aux intérêts vitaux pour l’Empire.

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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