Hope

La seconde guerre mondiale a laissé des traces et ce n’est pas Mallory Hope qui dira le contraire. Il a vu la mort de près et ne sera plus jamais le même. Revenu au pays pour exercer le métier de détective privé, il verse désormais dans la magie noire ; rarement pour le meilleur, et presque toujours pour le pire.

Hope, scénarisé par Guy Adams et dessiné par Jimmy Broxton, est une œuvre de qualité mêlant polar noir et occultisme.

LE PRIVÉ

A une époque où les enfants stars fleurissent aussi vite qu’ils se fanent, celui que tous les studios s’arrachent a disparu. Il s’agit de Joey Fabrizzi, plus connu sous le nom de Buster Ritz. Pour le retrouver, Hope, un privé de Los Angeles est engagé.

Désabusé, cynique, sensible au charme des blondes énigmatiques et porté sur la boisson, le personnage s’inscrit dans la plus pure tradition des privés tels qu’on les connaît depuis Philip Marlowe, incarné par Humphrey Bogart.

De fait, les codes des films des années 40-50 sont parfaitement exploités et le lecteur les repère avec une certaine satisfaction, désireux de connaître le fin mot de l’histoire, à la recherche du moindre indice. Le premier étant bien entendu le héros éponyme.

A NEW HOPE.

Hope… « Espoir » … Rarement un nom a été aussi mal porté, car cet anti-héros, imbibé de whisky, hanté par son passé, possède une arme aussi terrifiante que destructrice : la magie noire.

Sans en être une pâle copie, Mallory Hope rappelle immédiatement et par bien des aspects John Constantine, le maître de la magie noire et du sarcasme. Mais Hope possède sa part d’originalités et des qualités qui lui sont propres.

Pendant la guerre, Hope a découvert l’art occulte, à moins que ce ne soit l’inverse…

Là où la mort rôde et s’incarne pour accompagner quiconque s’aventure sur les champs de bataille, il l’a aperçue, sous la forme d’un être gigantesque, encapuchonné et portant un masque à gaz. Depuis, ils ne se sont plus quittés.

Bien loin d’être un simple prétexte au développement d’une ambiance ésotérique, cette originalité permet à Guy Adams de développer par touches successives un univers subtilement alternatif.

DU SILENCE ET DES OMBRES.

Le scénariste britannique est un habitué du paranormal puisqu’il a officié à de nombreuses reprises sur la licence de Doctor Who.

Pourtant, dans Hope, point de voyage à travers l’espace-temps, mais plutôt une uchronie saupoudrée de sorcellerie.

En effet, pour gagner la guerre, l’Amérique a eu recours à la magie noire ; ce faisant, elle a vendu son âme au diable, ou à quelque chose qui lui ressemble. Et le prix à payer est élevé, si élevé que la réalité a été subtilement modifiée. Les États-Unis et ses symboles ne sont plus exactement ceux qu’on connaît.

Ainsi, meurtri par la pratique répétée des arts occultes, le cœur du président Roosevelt n’a pas tenu jusqu’en 1945 et c’est Wallace qui a pris sa place à la tête de la plus grande puissance du monde. Carole Lombard, la célèbre actrice n’a pas tragiquement disparu dans un accident d’avion et son union avec Clark Gable a donné naissance à un enfant. Les légendes Montgomery Clift et Rock Hudson ont pu partager l’affiche d’un même film : les Reines de Cisco…

Ces nombreux indices sont disséminés avec habileté au fil des pages.

Par ailleurs, loin d’être indispensables à l’intrigue, ils contribuent à l’élaboration d’un univers ingénieusement parallèle tout en invitant le lecteur curieux à retrouver ces modifications historiques.

Dès lors, entre une intrigue retorse et cette chasse aux indices uchroniques, la lecture de Hope devient bien vite captivante.

BLACK IS BLACK.

Pour donner vie à cette histoire à l’odeur de soufre, Guy Adams est accompagné de Jimmy Broxton (Sex & Violence).

Dès les premières cases, l’ambiance envoûtante propre à la fin des années 40 se fait ressentir et on est irrésistiblement happés par une aventure parfaitement illustrée, jouant à la perfection avec l’esthétique des polars noirs hollywoodiens. Le style réaliste, associé au noir et blanc, est parfaitement maîtrisé et sert avec brio l’intrigue.

Avec Hope, les éditions Delcourt livrent ce qu’on espère être le premier tome d’une longue série 2000AD. L’intrigue originale de Guy Adams est parfaitement portée par les magnifiques dessins de Jimmy Broxton. Un deuxième tome devrait sortir d’ici peu outre-manche, espérons qu’il parviendra jusqu’à nous.

Article posté le lundi 06 juillet 2020 par Victor Benelbaz

Hope de Guy Adams et Jimmy Broxton (Delcourt)
  • Hope
  • Scénariste : Guy Adams
  • Dessinateur : Jimmy Broxton
  • Editeur : Delcourt
  • Parution : 27 mai 2020
  • Prix : 12.50 €
  • ISBN : 9782413023975

Résumé de l’éditeur : Dans un Los Angeles d’après guerre alternatif où la magie noire fait partie du paysage, Mallory Hope est un détective privé épuisé par les forces occultes auxquelles il fait appel et hanté par un sombre passé. Lorsqu’on lui confie une affaire de kidnapping, qui lui rappelle la disparition de sa propre fille, il est déterminé à aller jusqu’au bout.

À propos de l'auteur de cet article

Victor Benelbaz

Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.

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