Sex & Violence

Beaucoup de violence parsemée de sexe. Non, le titre de cette nouvelle publication aux éditions Glénat, n’est pas trompeur. Sex & violence regroupe cinq histoires toutes scénarisées par Jimmy Palmiotti et/ou Justin Gray. Ces deux auteurs réputés chez DC Comics s’entourent de plusieurs dessinateurs pour mettre en images leur imagination sulfureuse, sanguinaire et oppressante. A l’exception d’un, ces mini-récits donnent une impression de déjà-vu mais avec ce mérite non négligeable : celui d’être cohérent et efficace. Du vieux bonhomme cherchant à venger la mort mystérieuse de sa petite-fille, jusqu’à cet homme dont est détaillée toute l’évolution qui le poussera à devenir un meurtrier insatiable, il convient de préciser que le degré d’intensité varie en fonction de l’intrigue relatée. Sex & Violence ne bouleverse pas les codes, mais reste à découvrir ne serait-ce que par sa diversité graphique.

DU BON…

Et cela commence parfaitement bien avec Pornland Oregon. Les deux auteurs sont accompagnés de Jimmy Broxton au dessin. Ce dernier, avec ses cases remplies de visages en gros plan, des cadrages bien sentis et des couleurs rouge-orangées, relate parfaitement l’ambiance glauque de l’histoire. Celle d’un grand-père (qu’on a peut-être du mal à trouver aussi vieux), qui a pour unique objectif la vengeance. Trouver ceux qui lui ont envoyé ce film dévoilant les dernières heures sordides de sa petite fille, et les faire payer avec toute la souffrance qu’ils méritent. L’avantage de tous ces récits graphiques, c’est qu’ils sont courts et vont, pour la plupart, à l’essentiel. C’est le cas dans cette première aventure de Sex & Violence. Un beau trio pour un polar sombre.

… ET DU MOINS BON

On continue à New-York avec Girl in a Storm où le duo semble moins inspiré. Une femme flic et dépressive dépeint son quotidien dans les rues de la ville qui ne dort jamais. Elle fait son boulot, protège son coéquipier marié avec qui elle a eu une aventure, et se morfond dans son appartement qui appartenait jadis à son père. La soirée salvatrice viendra quand elle découvrira deux voisines lesbiennes en face de son immeuble. Commencera alors un un jeu empreint de voyeurisme camouflé par une conscience professionnelle. Pour aboutir à… rien de très original… le dessin très « carré » de Juan Santacruz, habitué des héros Marvel, n’aide pas à insuffler un semblant d’enthousiasme.

VITE FAIT, BIEN FAIT

Onze planches suffiront à Romina Moranelli pour illustrer Daddy Issues. Jimmy Palmiotti, seul aux commandes, n’a besoin que de trois personnages et une caravane. Dans un huis-clos prenant, on suivra Rick, entrant dans cet étroit habitat en compagnie de Becky, dans le but de bien finir la soirée. Seulement elle n’y habite pas toute seule. Son ado de fille, Marsha, se trouve là, allongée sur la banquette, la jambe plâtrée. La nuit passe et Rick commettra une seule erreur : celle de ne pas être parti dès que le soleil s’est levé… Brillamment mise en valeur par la dessinatrice, cette histoire semble tout droit sortie de cette fameuse série des années 80, Le Voyageur où il ne manque plus que l’auto-stoppeur comme narrateur.

CHIENNE DE VIE

Red Dog Army est certainement le récit graphique le plus surprenant des cinq proposés. Justin Gray nous plonge dans le contexte de la 2e Guerre mondiale. En Russie. Youri Chlonski, dresseur de chiens dans un chenil, vit à l’abri des balles avec sa femme. Victime de sa bonne réputation, l’armée soviétique vient le chercher sans option de refus pour l’aider à entraîner des chiens à accomplir une mission bien particulière : devenir de véritables bombes canines. Youri étant un homme intègre, ne se sent inévitablement pas à sa place dans ce projet ordonné par Staline à l’encontre des nazis. Il n’est jamais aisé de retranscrire des scènes de guerre. Cette violence où parfois beaucoup de soldats morts sont représentés dans une seule et unique case. Rafa Garres réussit brillamment l’exercice. Jusqu’à la fin, la pression est à son comble et ce, en partie, grâce à l’émotion graphique rendue par son auteur.

LA JUSTICE DANS TOUS SES ÉTATS

On termine très fort avec Filter. Pour cette ultime nouvelle signée Palmiotti, c’est la dessinatrice Vanesa R. Del Rey qui est chargée de donner vie en images au destin de Nico Gallo. Au fur et à mesure qu’avance l’histoire, on peut trouver, à quelques détails près, des similitudes avec un célèbre héros de série TV… Nico connaît sa première pulsion une nuit où rien ne prêtait à commettre cet acte irréparable. La machine est lancée. La justice est omniprésente et proclamée jusqu’à l’extrême. Avec un remarquable rendu graphique accentuant la tension perpétrée par le personnage principal, Filter est une réussite dans tous les domaines.

Sex & Violence est une véritable mise à mal pour le commun des mortels. Tous tiraillés, les protagonistes se dévoilent à travers leurs vices. Les lecteurs avertis et spécialistes de ce genre passeront un bon moment sans connaître de nets effets de surprise. La plus grande satisfaction résulte de la découverte de quelques bons, très bons dessinateurs.

 

Article posté le lundi 02 mai 2016 par Mikey Martin

Sex & Violence, un one shot où tout est dans le titre et décrypté par Comixtrip le site BD de référence
  • Sex & Violence
  • Auteurs : Jimmy Palmiotti & Justin Gray
  • Dessinateur : Collectif
  • Editeur : Glénat
  • Prix : 15,50 €
  • Parution : novembre 2015

Résumé de l’éditeur : avec Sex & Violence, plongez dans un torrent de stupre et de fougue à travers cinq histoires indépendantes mais partageant des thèmes communs. Au menu : la quête de vengeance d’un grand-père à travers la communauté du porno à Portland Oregon ; la fascination obsessionnelle d’une femme-flic de la police de New York pour un couple lesbien ; une rivalité malsaine entre une mère et sa fille aussi séduisantes l’une que l’autre ; l’histoire d’une unité spéciale de l’Armée rouge pendant la seconde guerre mondiale ; et le bilan d’un assassin sur les choix violents et meurtriers qu’il a fait dans sa jeunesse et qui ont changé sa vie pour toujours. En bref : cinq visions de ces thèmes, sexe et violence, qui fascinent et dérangent l’humanité depuis toujours, pour un ouvrage sans concessions à réserver à un public averti.

À propos de l'auteur de cet article

Mikey Martin

Mikey, dont les géniteurs ont tout de suite compris qu'il était sensé (!) a toujours été bercé par la bande dessinée. Passionné par le talent de ces scénaristes, dessinateur.ice.s ou coloristes, il n'a qu'une envie, vous parler de leurs créations. Et quand il a la chance de les rencontrer, il vous dit tout !

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