Au pied du mystérieux massif de la Dent du Chat, un petit village dort paisiblement… Exception faite d’un groupe d’enfants en guenilles. Parmi eux La Blanchette se questionne sur la véracité des légendes qu’elle a entendues sur le pic. Elle ne sait pas encore qu’elle s’apprête à trouver les monstrueuses réponses à ses questions et bien plus encore. Fabien Vehlmann et Jean-Baptiste Andreae proposent un premier conte glaçant pour débuter cette nouvelle série-monde, La Cuisine des Ogres, chez Rue de Sèvres.
Trois-Fois-Morte
La Blanchette est une jeune fugueuse qui vit dans la rue avec quelques compagnons d’infortune. Maladroite mais de bonne volonté, elle est souvent mise à l’écart et ostracisée à cause de sa couleur de cheveux. Ceux-ci, devenu blanc suite au décès de sa mère, sont source de nombreuses rumeurs à son sujet.
« Ses cheveux étaient normaux avant… ça lui est venu en une seule nuit, juste après la mort d’sa daronne. »
S’ils se méfient d’elle, ses camarades, en revanche, se laissent facilement appâter par un panier de victuailles découvert un soir au détour d’une allée. Pris au piège par une créature encapuchonnée nommée Grince-Matin, ils sont kidnappés sous les yeux de la Blanchette. Seule et impuissante, elle tente de réveiller sans succès un village qui n’a que faire des orphelins des rues. Bien heureusement le chevalier de Sainte-Ombre, va la prendre sous son aile. Attiré par la possibilité de redorer son blason, il file tout droit vers la Dent du Chat, le repère des ogres.
C’est ici que la Blanchette, vendue avec ses amis comme ingrédients à l’ogre Beauregret, découvre ce qui arrive aux enfants disparus. Jetée la première dans “l’écorcheuse-désosseuse-batteuse”, hachée, mijotée, écrasée, elle échappe contre toute attente à la mort et gagne alors le surnom de Trois-Fois-Morte.
Ne pas se laisser abattre
C’est dans les entrailles de la Dent du Chat que Trois-Fois-Morte rencontre Brèche-Dent, un jeune korrigan avec un adorable cheveux sur la langue. Habitué du Lac à Vaisselle, celui-ci gagne sa vie en ramenant la porcelaine sur la berge. C’est un travail ingrat et risqué, puisqu’un kraken rôde et se montre de plus en plus affamé.
Bien déterminée à sauver le reste de ses camarades toujours enfermés chez Beauregret, Blanchette décide de retourner en cuisine. Elle comprend rapidement qu’elle ne peut pas grand-chose contre les barreaux magiques de leur cage. En revanche elle décide de revenir régulièrement grappiller les restes des ingrédients haut-de-gamme du chef cuisinier et observer ses amis engraisser à vue d’œil.
Plonger dans le passé pour mieux comprendre le présent
La jeune héroïne vole donc allègrement les ogres et se découvre par la même occasion un certain talent pour la cuisine. C’est l’arrivée du fils de Minos, redouté de tous car impossible à contenter à table, qui va lui permettre de mettre ses capacités et son sang-froid à l’épreuve.
Ce face à face avec le minotaure va non seulement lui offrir le respect des ogres, mais aussi une occasion de s’exprimer en public. L’échange qu’elle va avoir avec cette créature crainte et abhorrée est aussi profond que déchirant. Leurs passés et leurs traumatismes s’entrechoquent, laissant foule et lecteurs sidérés. Les véritables monstres ne sont peut être pas ceux qui se terrent au creux d’une montagne.
Une figure féminine puissante
La Blanchette possède une énergie vitale incroyable. C’est un personnage inspirant qui, s’il semble effacé au début du récit, prend en consistance et en charisme au fur et à mesure de l’avancement de l’histoire. De victime de ses propres camarades à sauveuse d’un royaume il est loin de n’y avoir qu’un pas et c’est avec résilience et persévérance que la jeune héroïne trace son chemin.
Son acolyte, l’inquiet et attachant korrigan Brèche-Dent, sera le sujet de la prochaine histoire de La Cuisine des Ogres. Si sa manière de survivre à la Dent du Chat est tout à fait différente de celle de Trois-Fois-Morte, la mystérieuse raison de son arrivée et de son installation au Lac à Vaisselle à de quoi nourrir notre curiosité. Le monde est dur avec les enfants et cet univers fantastique nous le rappelle avec justesse et poésie.
La Cuisine des Ogres : Un duo prometteur
Ce conte aux allures de cauchemar fantasmagorique est illustré avec brio par Jean-Baptiste Andreae. Après MangeCoeur, La Confrérie du crabe ou encore Azimut, on peut dire qu’il est un habitué des figures enfantines et des créatures, qu’elles soient oniriques ou cauchemardesques. L’univers impitoyable imaginé par Fabien Vehlmann prend donc vie sous le trait fin et extravagant du dessinateur pour nous offrir une expérience de lecture unique.
- La cuisine des ogres – Trois-fois-morte
- Scénariste : Fabien Vehlmann
- Dessinateur, coloriste : Jean-Baptiste Andréae
- Éditeur : Rue de Sèvres
- Date de publication : 13 mars 2024
- Nombre de pages : 84
- Prix : 20€
- ISBN : 9782810202683
Résumé de l’éditeur : A l’intérieur du mystérieux massif que l’on appelle « La Dent du Chat » vivent des ogres. Fin gourmets, leurs mets délicats se composent néanmoins d’ingrédients quelque peu inhabituels… Lorsqu’une jeune orpheline nommée Blanchette se fait capturer avec d’autres enfants pour être emmenée au cœur du cratère et servir de dîner à ses imposants habitants, le cauchemar s’installe. Hachée, mijotée, écrasée : celle qu’on surnommera « Trois-fois-morte » met la faucheuse au défi : grâce à son courage (et un peu de chance), elle survit à tous les dangers et obstacles qui s’imposent à elle. Avec l’aide du jeune korrigan Brèche-Dent, elle va devoir redoubler d’inventivité pour survivre à cet enfer et sauver ses amis.
À propos de l'auteur de cet article
Coline Drouhaud
Étudiante dans un Master recherche spécialisé dans la bande-dessinée, Coline est une vraie touche-à-tout. Elle ne rechigne jamais devant de nouvelles découvertes, même si elle garde un goût prononcé pour les univers horrifiques et de science-fiction. Elle écrit chez Comixtrip depuis 2024 pour partager sa passion aux plus nombreux.
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