Dans une aéroport, une annonce cherchant quelqu’un parlant arabe fait réagir une jeune femme. Cette femme, c’est l’autrice Naomi Shihab Nye. Dans La porte A4, elle relate cette histoire vraie, pleine de compassion et de gentillesse, portée par le très joli dessin d’Enzo.
Une annonce entêtante
Aéroport d’Albuquerque au Nouveau-Mexique. Le vol de Naomi est retardé de quatre heures. Le temps sera-t-il long ? Non, la jeune femme prend le temps de flâner.
“Si quelqu’un à proximité de la porte d’embarquement A4 comprend l’arabe, prière de vous y rendre immédiatement.”
Alors qu’elle entend cette annonce répétée plusieurs fois au micro, Naomi s’y rend. Ça tombe bien, c’est sa future porte d’embarquement.
Vieille femme cherche réconfort
A la porte A4 se trouve une vieille femme à genou éplorée. Elle est paniquée depuis qu’elle a appris que le vol était retardé.
“Chou dah a, chou beddek, habibti ? Estani chowaya, men fadlek, chou bet saoui ?”
De ses simples mots familiers, la vieille dame palestinienne est rassurée. Il faut dire qu’elle avait peur de manquer son rendez-vous médical du lendemain à El Paso.
“Tout va bien, lui ai-je dit.”
La porte A4, des mots pour réconforter
Il n’y a pas d’effusions ni de grandiloquence dans La porte A4. Juste des mots, de simples mots pour réconforter une vieille femme perdue par l’annonce d’un vol retardé.
Cette simple scène, Naomi Shihab Nye l’a vécue. La romancière palestino-américaine est connue aux États-Unis pour avoir reçu les prestigieux prix Lifetime Achievement Awards du Texas Institute of Letters et du National Book Critic Circle.
Naomi Shihab Nye a voulu relater cette tranche de vie que l’on pourrait qualifier de simple. Pas vraiment simple, parce qu’elle montre que des mots peuvent aider. La gentillesse, l’entraide et la bienveillance sont ici mises en lumière dans un album entre la bande dessinée et le livre illustré.
Retisser le lien social
Ça nous arrive souvent de discuter avec des inconnu.es dans une file d’attente. Par quelques mots, par un trait d’humour, nous entamons une bribe de dialogue avec des personnes que l’on ne reverra jamais. C’est toute l’humanité dans ces moments éphémères que La porte A4 a voulu démontrer par la connivence entre deux femmes qui ne se connaissaient pas quelques minutes auparavant.
Les mots permettent de tisser un lien social qui par moment peut se distendre. Les lecteurs tombent sous le charme de cette vieille femme palestinienne. Avec son vêtement traditionnel et ses grosses lunettes, on sent une mamie que l’on aimerait prendre dans nos bras.
De la force des petits gâteaux
En plus d’un langage familier, d’une voix à l’autre bout d’un téléphone, les gâteaux de cette petite mamie réchauffent le cœur des touristes en mal d’attente.
La porte A4, c’est un livre qui redonne le sourire. Un album qui pose un regard comme nos yeux d’enfant sur ce duo de femmes. Elles ne sont pas exceptionnelles, elles sont des anti-héroïnes mais la puissance du propos simple nous émerveille et nous émeut.
Enzo et la porte A4
Pour accompagner l’histoire de Naomi Shihab Nye, il fallait un dessin chaleureux. C’est le trait d’Enzo qui a été choisi. L’illustrateur montréalais sublime cette scène de gentillesse par un dessin d’une grande douceur.
Les enlacements, les mains qui se rejoignent et les regards complices sont magnifiés dans de grandes illustrations idéales pour les enfants à partir de 4 ans. Le dessin est sobre et d’une grande efficacité.
Laissez-vous embarquer vers La porte A4 : un lieu de bienveillance et de douceur. Une jolie surprise éditée par D’eux.
- La porte A4
- Scénariste : Naomi Shihab Nye
- Dessinateur : Enzo
- Traductrice : Christiane Duchesne
- Éditeur : D’eux
- Prix : 18€
- Sortie : 22 mars 2024
- Pagination : 40 pages
- ISBN : 978-2925347019
Résumé de l’éditeur : Je flânais dans l’aérogare d’Albuquerque après avoir appris que mon vol était retardé de quatre heures quand j’ai entendu une annonce : «Si quelqu’un à proximité de la porte d’embarquement A-4 comprend l’arabe, prière de vous y rendre immédiatement.»
Par les temps qui courent, il y a de quoi hésiter. C’était la porte à laquelle je devais me présenter. J’y suis allée.
Un texte fort sur la compassion et la gentillesse. Mots importants à notre époque.
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.
En savoir
