La sage-femme du roi

Maïeuticienne ayant publié Abrégé de l’Art des Accouchements, un ouvrage de référence, Angélique du Coudray est mise en lumière dans La sage-femme du roi. Cette bande dessinée d’Adeline Laffitte et Hervé Duphot revient sur son parcours capital et historique dans cette discipline.

La sage-femme du roi, De l’art des accouchements

France, XVIII siècle, règne de Louis XV. Angélique du Coudray est une sage-femme à la réputation sans faille, connue du tout Paris. Mais malgré des compétences qui ne sont plus à démontrer, cette dernière et sa congrégation doivent faire face à une concurrence féroce de la part des chirurgiens lorsqu’il s’agit d’accouchements. A commencer par André Levret, accoucheur de la Dauphine de France en tête, persuadé de la supériorité de son ordre.

Face au mépris ambiant quant à ses compétences et celles de ses consœurs, Mme Du Coudray fait le dos rond, peinant cependant à cacher son air moribond. Avec une mortalité infantile et maternelle croissante à travers tout le royaume, il y a pourtant fort à faire…

Partir vivre en province

L’arrivée inopinée du Baron de Thiers venu de son Auvergne profonde va pourtant changer la donne. Désireux de faire venir une sage-femme digne de ce nom en ses murs, l’aristocrate entreprend de convaincre Angélique de venir s’installer chez lui.

Aux abois dans sa profession et se sentent petit à petit acculé dans la capitale, Mme Du Coudray finit par accepter la proposition du Baron de Thiers et plaque tout, direction la province pour le meilleur… et pour le pire ?

Une femme en avance sur son temps

A l’instar d’une Olympe de Gouges, première femme à intégrer la Comédie Française, Angélique du Coudray fut la première sage-femme à dispenser en public ses connaissances en accouchements. Et au vue du portrait dressé par Adeline Laffitte et Hervé Duphot, on comprend pourquoi ! Le duo avait déjà mis en lumière des femmes fortes dans leur précédent album Le manifeste des 343, sur le droit à l’avortement.

Devant faire face en permanence tant à l’hostilité des chirurgiens que des matrones superstitieuses auxquelles Angélique du Coudray sera confronté en Auvergne, c’est avec la foi du charbonnier et une irréductible soif de transmettre que cette praticienne d’exception prend inlassablement son bâton de pèlerine, n’hésitant pas à bousculer un ordre établi et façonné par les hommes.

Un siècle des lumières qui profite à toustes ?

Très documenté et admirablement mis en texte, La sage-femme du roi offre une plongée dans la France du milieu du XVIIIe siècle où l’obscurantisme et l’illettrisme font des ravages au sein d’une population conservatrice et peu encline à s’ouvrir au progrès scientifique quel qu’il soit.

Personnage au caractère trempé, Mme du Coudray dû faire preuve de persévérance pour faire bouger les lignes à une époque où le rôle des femmes dans la société n’était nullement associé au savoir. L’ouvrage pourra aussi rappeler Femme rebelle l’histoire de Margareth Sanger signé Peter Bagge consacré à la fondatrice du planning familial aux États-Unis, laquelle dû âprement se battre pour ses idéaux au cœur de l’Amérique puritaine des années 1920.

Deux destins de femmes à découvrir sans plus attendre !

  • Pour compléter cette lecture, nous vous conseillons également de parcourir notre chronique de L’herbe du diable de Benjamin Laurent et Claire Martin sur les sages-femmes.
Article posté le lundi 05 juin 2023 par Matthieu Morvan

La sage-femme du roi d'Adeline Laffitte et Hervé Duphot (Delcourt)
  • La sage-femme du roi
  • Scénariste : Adeline Laffitte
  • Dessinateur : Hervé Duphot
  • Editeur : Delcourt, collection Mirages
  • Prix : 17,95 €
  • Parution : 03 mai 2023
  • ISBN : 9782413045946

Résumé de l’éditeur : Sage-femme au XVIIIe siècle, Angélique du Coudray a révolutionné l’enseignement de son Art. Jusqu’à cette époque, les morts en couche étaient monnaie courante. Afin de résoudre ce problème de santé publique, elle mit au point une méthode pédagogique innovante qui lui permit de former nombre de sages-femmes mais aussi des chirurgiens, aussi peu experts en obstétrique que les matrones, aux pratiques superstitieuses…

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Matthieu Morvan

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