Les herbes sauvages

Oli embarque Milo et Alvin dans un périple pour rejoindre une communauté autogérée dans l’Ouest du Canada. L’adolescente tente ainsi de trouver des réponses à des questions existentielles. Les herbes sauvages est une très jolie quête initiatique contée par Adam de Souza aux éditions Gallimard BD.

“Rejoins la communauté d’Evergreen”

Vancouver. En 2002 et alors qu’elle est encore toute jeune, Olivia découvre dans la bibliothèque familiale une publicité pour la communauté d’Evergreen.

Chemin faisant, en 2007, Oli est sûre d’elle : elle veut rejoindre Evergreen à l’Ouest du Canada. Pourquoi ? C’est assez surprenant parce qu’elle n’a pas de soucis avec sa mère et s’entend à merveille avec Toby, son petit frère. C’est donc plus profond. Elle se cherche.

Fuir un amour toxique

Oli prépare son sac et après le lycée, elle partira. Mais cette journée ne se déroule pas de la meilleure des manières. Son ex-petit ami, Liam, lui demande encore pourquoi elle ne lui adresse plus la parole. Il faut souligner que l’adolescent a fait bruisser des rumeurs sur la jeune fille. D’où son énervement contre Liam.

Il lui touche l’épaule, elle se retourne et l’adolescent se retrouve par terre. Cet excès de colère ne passe pas inaperçu. Pire, Oli perd son sac. Rien ne va plus.

Fuir pour se découvrir

Olivia rejoint alors Alvin, son meilleur ami. Lui aussi est prêt pour l’aventure Evergreen. Avec sa petite caméra, il va pouvoir réaliser le film de ses rêves, là, en pleine nature.

Mais, Alvin a une petite surprise pour Oli : il a invité Milo pour ce grand périple. Adolescent un peu à la marge, c’est un pro du camping. Idéal pour le trio qui va devoir passer des nuits sous tente. Alvin ne l’a pas invité que pour cela, il a un plan en tête. Il est en crush sur lui.

Les trois ami.es montent alors à bord d’un ferry, direction Evergreen. Mais le chemin est long jusqu’à la communauté. Un trajet semé d’embûches…

Les herbes sauvages : un périple pour grandir

Si le but est Evergreen, une communauté utopiste autonome agricole, le périple est bien plus important que la destination dans Les herbes sauvages. Adam de Souza – dont c’est la première bande dessinée – imagine avant tout un road-movie de teenagers sensible et  intelligent. Le cheminement physique et intellectuel est donc plus important que la ferme autogérée.

C’est pendant cette épopée à travers les forêts canadiennes que Oli, Milo et Alvin vont se découvrir, s’apprécier, se détester, se ré-apprécier, se re-détester. Tels les mouvements ondulatoires de la vie. Les secrets, les amitiés, les inimitiés, les grandes déclarations au monde, les discussions franches ou les petites bassesses, tout est là.

Les herbes sauvages : l’adolescence comme déséquilibre

Les herbes sauvages aborde ainsi les grandes questions liées à l’adolescence. Adam de Souza y parle d’utopie, de rêves, de désillusions, de relations femme/hommes, d’homosexualité, de syndrome de Peter Pan (l’envie de ne pas grandir et donc de ne pas être adulte), de sa place dans la société ou encore de nature. Une nature, belle, immense et apaisante.

Oli, Alvin et Milo sont trois personnages différents, bien cernés, avec leurs doutes et les certitudes, leurs questionnements et finalement leur complémentarité. Chacun à leur manière aspire à une vie différente de celle qu’ils ont eut avant leur périple.

Adam de Souza réussit le pari de parler d’adolescence avec une belle justesse, comme le fait si bien Max de Radiguès (L’âge dur, Stig & Tilde…). Il y a souvent des tensions, des rebondissements dans Les herbes sauvages mais l’auteur lauréat du prix Cartoonist Studio pour son webcomic Blind Alley n’oublie jamais l’humour. Les dialogues sont savoureux, dans la drôlerie comme dans les moments de pure émotion.

Un trait plein de vie

Le trait semi-réaliste d’Adam de Souza fonctionne à merveille dans Les herbes sauvages. Les expressions sont bien restituées. Les lecteurs entrent vraiment dans la psyché des trois protagonistes. Les changements d’ambiance comme d’humeur de ses personnages sont rehaussé par une gamme chromatique faite de jaunes, de gris, de bleus ou de verts. On sera surpris par le nez proéminent de Milo, style humoristique, qui tranche avec les visages d’Oli et Alvin. Peut-être que ce nez montre aussi le changement physique de cet adolescent. Tout grossi et tout s’allonge pour ensuite se stabiliser.

Les herbes sauvages, c’est un superbe récit d’apprentissage, une histoire d’utopies, de rêves et d’adolescence, de rires, de pleurs, d’amitié et d’amour. Une très jolie surprise !

Article posté le mercredi 01 mai 2024 par Damien Canteau

Les herbes sauvages de Adam de Souza (éditions Gallimard BD)
  • Les herbes sauvages
  • Auteur : Adam de Souza
  • Traducteur : Emmanuelle Casse-Castric
  • Éditeur : Gallimard BD
  • Prix : 26€
  • Sortie : 13 mars 2024
  • Pagination : 240 pages
  • ISBN : 9782075193726

Résumé de l’éditeur : Une échappée existentielle drôle et émouvante par une étoile montante de la bande dessinée canadienne. Olivia, Milo et Alvin terminent le lycée et refusent les promesses absurdes d’une vie d’adulte standard. En quête d’autre chose, ils s’enfuient à travers les paysages de la côte ouest canadienne. De rencontres inattendues en engueulades, rien ne se passe comme prévu, mais l’urgence de vivre et de trouver leur place les mènera bien quelque part.

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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