Isaac ne veut qu’une chose : une vie normale ! Mais tout semble lui échapper. Il doit gérer son épilepsie, le fait que personne ne semble le croire. La solitude est de plus en plus intense pour cet étudiant qui ne veut que vivre… Mis(h)adra est un récit fort, puissant, porté par la plume de Iasmin Omar Ata aux éditions Bliss.

Vivre avec la maladie
Isaac est épuisé. Sa vie aurait pu être celle d’un étudiant normal, mais c’est loin d’être le cas. Depuis qu’il a été diagnostiqué comme épileptique, Isaac doit faire attention à tout : le bruit, le manque de sommeil, le stress, son alimentation… Tout peut être un déclencheur de crises. Mais plus dramatique encore, Isaac n’est pas cru : son neurologue le prend de haut, son père nie sa maladie… Il se sent terriblement seul.

Avec Mis(h)adra, Iasmin Omar Ata nous raconte une existence difficile, pleine de souffrances et de non-dits. La peur de déranger les autres affronte rapidement la peur des crises, ces couteaux translucides qui peuplent les pages et transpercent Isaac. Le traitement graphique est au centre du récit : la façon dont l’auteurice met en scène les crises, les hallucinations d’Isaac, etc. L’imminence de chaque crise est mise en images. A notre tour, tout comme Isaac, nous passons des pages à vivre ces situations, à comprendre sans saisir les images qui défilent pour finalement revenir au présent, dans une chambre d’hôpital ou au côté d’un ami.

Ces couteaux invisibles
Après Nayra et le Djinn, l’auteurice palestinien.ne nous livre un récit beaucoup plus personnel. En effet, iel est aussi atteint d’épilepsie, vit aux États-Unis. Inspiré de son quotidien, le ressenti d’Isaac ne s’en fait que plus puissant. Le traitement graphique accompagne parfaitement l’exploration du sujet. Les pages sur fond jaune font place aux crises sur fond noir et trait rouge, renversant les codes pour bien marquer le changement d’état.

Le sujet est relativement rare en bande dessinée. Il est difficile. Il pose la question de la représentation de la douleur, de la perte de connaissance, des hallucinations et autres symptômes de l’épilepsie. Iasmin Omar Ata y parvient avec brio. Les changements de couleurs, la mise en pages éclatées en éclats comme autant d’éclats de douleur… Tout est fait pour nous plonger dans la vie d’Isaac.

Au-delà de l’épilepsie, c’est aussi l’histoire d’une errance médicale. Toute personne vivant avec une maladie chronique, ou ayant fait face à l’incompréhension et au manque de considération du corps médical peut se reconnaitre entre ces pages.

Les éditions Bliss (Le chant de nos pas, L’île aux orcs, etc.) nous livre ici un titre de grande qualité. Le trait expressif d’Iasmin Omar Ata donne à Mis(h)adra une puissance qui retentit bien au-delà des pages de cette bande dessinée. Un récit à mettre entre toutes les mains !
- Mis(h)adra
- Auteur : Iasmin Omar Ata
- Dessinateur : Iasmin Omar Ata
- Editeur : Bliss
- Prix : 7,95 €
- Parution : 3 octobre 2025
- Nombre de pages : 288 pages
- ISBN : 9782375783641
Résumé de l’éditeur : Tout ce que veut Isaac, c’est mener une vie normale d’étudiant, mais gérer son épilepsie est une bataille épuisante pour sa survie. Il essaye de maintenir un équilibre entre son quotidien et ses crises, mais il trouve que rien, pas même son traitement, ne semble fonctionner. Les médecins ne l’écoutent pas, le travail s’accumule, sa famille nie sa condition et sa vie sociale tombe en ruine tant il se sent isolé par sa maladie. Même avec une nouvelle amie à ses côtés, les obstacles sont si nombreux qu’Isaac comment à penser que son épilepsie est peut-être insurmontable.
À propos de l'auteur de cet article
Bénédicte Coudière
Journaliste spécialisée en bande dessinée mais aussi en jeux vidéo depuis près de 15 ans, conférencière, autrice et plein d'autre chose encore ! Membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée), elle est passionnée d'art et de narration, d'exploration de papier et de pleins d'autres choses encore.
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