Pas de baiser pour maman

Pas de baiser pour maman, c’est le livre de Tomi Ungerer que préfère Mathieu Sapin. Pour Rue de Sèvres, il a décidé d’en faire sa version. Un merveilleux hommage au talentueux auteur strasbourgeois.

Sacré réveil !

Jo est un jeune chat. La nuit, il rêve qu’il pourchasse des souris. Mais hier, son réveil n’a pas du tout fonctionné. C’est décidé, Jo va plonger dans les entrailles de l’objet.

Les heures, les minutes et les secondes n’auront plus de secret pour lui. Il s’escrime à l’ouvrir mais n’y arrive pas. Tant pis, le réveil passe par la fenêtre.

Pas de baiser pour maman !

Comme il n’a plus de réveil, Jo continue de dormir. Dans sa cuisine, sa maman prépare le petit-déjeuner. Elle vient ensuite le réveiller par un doux baiser.

« Il a horreur qu’on l’embrasse. Être tiré d’un rêve aussi captivant par un baiser est pour lui la chose la plus énervante au monde. »

Alors Jo râle et râle encore. Avant d’aller manger, il passe par la salle de bain. Mais il n’aime pas non plus se laver. Il fait croire qu’il le fait mais en attendant, il lit des bandes dessinées.

Maman aimante, enfant non reconnaissant

Lorsqu’il franchit la porte de la cuisine, Jo continue de bouder. Le pâté de souris, les filets de harengs ou la friture de gésiers de pinson, rien ne plaît au chaton. Il en a marre que sa mère le prenne pour un bébé. Sa maman est triste.

« Un de ces jours, quand je serai partie pour de bon, tu regretteras mes bons petits plats. Tu resteras seul au monde, sans personne pour t’aimer et t’embrasser. »

Tomi Ungerer revisité

Né en 1931 à Strasbourg, Tomi Ungerer débute sa carrière d’illustrateur et auteur en 1956 à New York. Il travaille pour la presse. L’année suivante sort son premier livre, Les Mellops font de l’avion. Il est reconnu internationalement. Parmi ses best-sellers, notons Les trois brigands, Jean de la lune ou Le géant de Zéralda.

Pourtant, ce n’est aucun de ces ouvrages que choisit Mathieu Sapin pour rendre hommage à Tomi Ungerer. Sorti en 1973, Pas de baiser pour maman, lui rappelle avant tout son enfance lorsque sa maman le lui lisait dans son lit. Comme il l’explique – en bande dessinée – dans l’édition de luxe de sa version de Pas de baiser pour maman, il voue une admiration à l’illustrateur. Comme lui, Mathieu a habité à Strasbourg quelques années pour suivre les cours de l’école des Arts décoratifs de la ville dans les années 1990. La ville est d’ailleurs reconnaissante envers l’un des ses meilleurs ambassadeurs. Un musée sur son œuvre existe  depuis 2007. Il est dirigé par Thérèse Willer, une amie de l’artiste.

Pas de baiser pour maman, très jolie version de Mathieu Sapin

Si Tomi Ungerer a imaginé Pas de baiser pour maman en réaction à la publication de A Kiss for a little Bear de Maurice Sendak. En effet, l’auteur de Max et les Maximonstres était un ami du Strasbourgeois depuis ces années à New York mais il a voulu le taquiner car il n’aimait pas trop ce livre.

Toutes ces anecdotes ne pouvaient que titiller Mathieu Sapin. C’était décidé, il pouvait donner sa version de Pas de baiser pour maman. Si les illustrations en noir et blanc d’Ungerer sont magnifiques et dessinées sur du calque, les pages de l’auteur d’Akissi le sont par ordinateur. Autre temps, autre technique. Pourtant, cette histoire est belle sous les pinceaux de l’auteur du Château.

Comment se dire que l’on s’aime ?

Pour se dire qu’on s’aime, il n’y a pas que les bisous de ses proches. Pourtant, c’est en faisant la grève des baisers que Jo Chattemine signifie à sa mère qu’elle l’étouffe de trop. Elle est beaucoup trop aimante. Lui veut s’en affranchir. Il lui explique qu’il n’est plus un bébé, mais elle continue à lui offrir toute son affection. Jusqu’à ce qu’elle explose. Comme le souligne Aria Ungerer, la fille de Tomi, la mère de Jo est la propre mère de l’illustrateur. C’est donc une histoire très personnelle que livre Ungerer.

Jo est un bon élève mais il aime se faire remarquer et embêter camarades et professeurs. Rien ne lui résiste. Quant à son père, il est plus compréhensif. Tomi n’a pas connu son père puisqu’il est décédé alors qu’il avait trois ans. Rêvait-il son père ainsi ?

Je suis content de lire cette version de Pas de baiser pour maman, un livre d’Ungerer que je ne connaissais pas. Une très belle surprise !

Article posté le dimanche 02 octobre 2022 par Damien Canteau

Pas de baiser pour maman de Mathieu Sapin d'après Tomi Ungerer (Rue de Sèvres)
  • Pas de baiser pour maman
  • Auteur : Mathieu Sapin, d’après le roman de Tomi Ungerer
  • Éditeur : Rue de Sèvres
  • Prix : 15 €
  • Parution : 12 octobre 2022
  • ISBN : 9782810202898

Résumé de l’éditeur : S’il y a quelque chose que Jo n’aime pas, c’est d’être embrassé par sa tendre mère – Madame Chattemite – surtout si c’est devant les copains. « Des baisers ! Toujours des baisers ! » hurle Jo. « Je les déteste, je n’en veux pas ! Des baisers pour dire bonjour, bonsoir et merci ! Des baisers humides et poisseux, toujours des baisers ! » Comment Madame Chattemite s’y prendra-t-elle désormais pour témoigner sa grande affection maternelle ? En adaptant Pas de baiser pour maman en bande dessinée, Mathieu Sapin revisite un classique de la bibliographie de Tomi Ungerer, et rend hommage à une œuvre ayant le plus marqué son enfance et orienté sa carrière.

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

En savoir