The Nice House on the Lake 02

Walter a isolé ses amis dans une magnifique demeure. Et juste après, il a déclenché l’apocalypse sur Terre. Walter a fait cela car il aime ses amis. Mais dans ce deuxième tome de The Nice House on The Lake, James Tynion IV et Álvaro Martínez Bueno nous rappellent que l’amour est amer, tout comme le lac d’ailleurs, aussi beau soit-il.

The Nice House on the Lake : on reste amis quand même ?…

En les enfermant dans une somptueuse demeure au bord d’un lac, Walter a sauvé ses amis de la fin du monde. Il ne voulait que leur bien… Après tout, c’est vrai : qui n’a jamais rêvé de vivre indéfiniment dans un lieu paradisiaque, entouré de ceux qu’il aime ?

Pour Walter, la réponse est évidente. Pour ses amis, elle l’est un peu moins. Et bien vite, les réactions des convives poussent le maître du jeu à leur effacer la mémoire. À tous, sauf un…

Excès de confiance ? Faiblesse de cœur ? Nouvelle machination ? Ce qui est certain, c’est que le mystère s’épaissit.

On reprend…

Le second tome reprend l’histoire là où James Tynion IV (The Department of Truth) l’avait laissée. Et immédiatement, on est replongé dans cette ambiance feutrée où le malaise des personnages est tel qu’il semble palpable. Dès la première page, on a l’impression à nouveau de se retrouver à l’intérieur de la villa. Et c’est avec un sentiment mêlant curiosité et appréhension qu’on attend les révélations. Mais le scénariste joue avec son lecteur autant que Walter avec ses convives. Ainsi, chaque information ne sera dévoilée qu’au bon moment, afin de nous maintenir en éveil, à l’affût du moindre indice, qu’il soit narratif ou visuel.

The Nice House on the Lake : Une partition virtuose jouée à quatre mains.

Particulièrement à l’aise pour raconter son histoire, James Tynion IV utilise tous les outils à sa disposition pour maintenir la tension et développer le suspense. Ainsi, analepses et prolepses s’entremêlent sans que jamais le lecteur ne perde le fil du récit. Et à ce titre, Álvaro Martínez Bueno joue pleinement sa partition. En effet, la qualité de ses dessins, proches d’un photoréalisme glaçant, est indiscutable. Mais par-dessus tout, ce qui frappe, c’est sa capacité à créer des ambiances qui nous projettent immédiatement dans un passé heureux ou dans un futur apocalyptique. La formidable colorisation de Jordie Bellaire sublime ces effets avec une justesse remarquable.

Un choc visuel.

Ainsi, par exemple, on garde longtemps en tête les scènes qui présentent le futur des protagonistes. L’association d’une palette de couleurs rouge sang et des images dignes de la fin du monde est un exemple du genre. Indéniablement les deux artistes recherchent à développer une esthétique de l’insoutenable, en représentant les peurs et les angoisses ultimes.

On se laisse alors guider à travers ces tableaux suscitant le malaise et l’effroi, exactement comme le font les protagonistes, pris bien malgré eux dans la toile de Walter.

La plaie et le couteau, la victime et le bourreau.

Et définitivement, ce personnage, qui d’ailleurs est bien plus présent dans ce second tome, fascine. En véritable démiurge de la jolie maison qui surplombe le lac, il crée et défait à l’envie. En un claquement de doigt, il isole les uns et réunit les autres, tout en faisant en sorte, et c’est ce qui est glaçant, que la décision finale vienne du protagoniste lui-même. Et malgré tout, on ne peut s’empêcher d’éprouver une certaine forme de sympathie pour Walter. Lui-même victime de la situation qu’il a créée, il porte en lui une souffrance et un mal-être qui nous empêchent de le détester.

Du grand art.

On le comprend, The Nice House on The Lake est bien plus qu’un simple huis clos horrifique. Portée par une narration virtuose et des dessins d’exception, cette œuvre nous invite à réfléchir à la place que nous occupons dans la société, comme sont poussés à le faire les convives. Tous ont des aptitudes, des qualités. Et c’est pour cela que Walter les a choisis. Mais est-ce une raison suffisante pour avoir le droit de survivre, lorsque l’humanité entière a disparu ? Ce genre de questionnements a de quoi faire froid ans le dos si on l’applique à notre vie… Et pourtant, c’est bel et bien sur ce chemin que James Tynion IV nous conduit avec l’œuvre magistrale qu’est The Nice House on The Lake. Et il se pourrait bien que l’aventure se poursuive pour notre plus grand plaisir.

Article posté le vendredi 16 juin 2023 par Victor Benelbaz

The Nice House on the Lake 02 de James Tynion IV et Alvaro Martinez Bueno (Urban comics)
  • The Nice House on the Lake 02
  • Scénariste : James Tynion IV
  • Dessinateur : Alvaro Martinez Bueno
  • Coloriste : Jordie Bellaire
  • Traducteur : Maxime Le Dain
  • Editeur : Urban Comics
  • Collection : Black label
  • Prix : 20 €
  • Sortie : 31 mars 2023
  • ISBN: 9791026825029

Résumé de l’éditeur : Ils s’imaginaient passer un chouette week-end dans une somptueuse villa en bord de lac. Onze « élus », réunis par leur ami commun, Walter, à priori doux et sympathiques. Mais au terme de la première soirée, le scénario idyllique tourne au cauchemar éveillé lorsqu’ils assistent, impuissants, à la fin du monde… Depuis, chacun cherche à sa manière à déjouer les plans de leur ami-ravisseur, mais difficile de trouver un sens à l’impensable. Alliances, trahisons, pressions, crises existentielles… Pourront-ils seulement se libérer de leurs propres schémas, de leur prison intérieure ?

À propos de l'auteur de cet article

Victor Benelbaz

Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.

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