Zoc

Dans un village de campagne naît Zoc, une jeune fille dont les cheveux dreinent l’eau au moindre contact. Curieux pouvoir dont elle ne sait pas quoi faire. Jade Khoo nous raconte une histoire charmante doublée d’une réflexion sur soi, intime et vertigineuse.

Zoc, la fille-rivière

Lorsqu’il pleut, la pluie s’accumule au bout des cheveux de Zoc. Un « sac » d’eau se forme et elle le traîne comme une besace liquide. Tirer de l’eau avec ses cheveux, c’est son truc. Et vu que c’est assez encombrant au quoditien, elle ne sait pas trop ce qu’elle va faire de sa vie.

Elle voudrait que ce pouvoir étrange lui serve à quelque chose. Elle n’a pas d’autre envie, elle se laisse un peu porter par le courant.

Mais elle arrive à un âge où il va falloir qu’elle choisisse le métier qu’elle veut faire. On la presse un peu, son conseiller d’orientation, sa soeur, même ses voisins. Le seul qui la laisse faire son bonhomme de chemin à son rythme, c’est son père. Il accepte qu’elle commence à chercher du travail. Quelque chose comme tirer de l’eau avec ses cheveux. Même si en soit, c’est flou comme métier d’avenir.

Mais elle reçoit un appel. Le village de Nemours est innondé. Et les villageois demandent à Zoc de venir enlever toute cette flotte. C’est trop beau pour être vrai. Mais Zoc y va. Commence alors une longue marche, de Nemours à Marcier, où la jeune fille doit larguer l’eau qu’elle a draîné.

Et sur la route, des rencontres, le ciel, la campagne et des enjeux environnementaux qui la dépassent, mais auxquelles elle est pourtant mêlée.

Ce qui compte ce n’est pas d’arriver. C’est la Quête

Zoc est comme toutes les adolescentes. Elle ne sait pas ce qu’elle veut à un âge où on lui demande de tracer une route vers son avenir. Jeune fille atypique et isolée, elle cherche sa voie. Un chemin par lequel elle pourrait devenir une adulte qui lui ressemble. Où chercher quand rien autour de soi n’est comme soi ?

A l’image de celles et ceux qui sont perdu, Zoc prend la route. Un peu malgré elle, mais poussée en avant par l’incertitude.

Zoc, la bande dessinée, relate un voyage initiatique fait de grandes planches silencieuses. Jade Khoo nous emmène dans une randonnée thérapeutique à la quête de soi.

Le silence de la campagne et pensée environnementale

Zoc est une bande dessinée à la parole parcimonieuse. Rien ne trouble les pensées de son personnage. Des pensées que l’on entr’aperçoit dans son regard. A travers ce silence, Jade Khoo nous fait entrer dans le cocon familiale de Zoc.

Et c’est par le silence que les paysages prennent tout leur sens. Des paysages qui, parce-qu’il n’y a pas de bulle de dialogue, deviennent bruyants. Tout ce bruit qui n’est pas dessiné nous fait battre la campagne avec cette jeune fille aux cheveux-fleuve.

Cette même campagne malmenée par des aléas environnementaux mal géré.

Zoc arrive en sauveuse et dépêtre les habitants des inondations. Mais ce faisant, elle inonde le chemin sur lequel elle passe. Jade Khoo aborde des questions toujours plus d’actualité. Comment gérer les drames environnementaux ? Peut-on s’en occuper sans impacter un tiers ? En trame de fond, Zoc ouvre la porte à une foule de réflexions.

La solitude et  l’amitié, une histoire de vie en parallèle

Au fil de son voyage, Zoc fait des rencontres. Notamment celle de Kael. Un garçon qui, comme elle, s’est trouvé isolé des autres à cause de ses étranges capacités physiques. Car comme pour Zoc, elles sont sacrément handicapantes au quotidien.

Tous deux sur les routes, chacun de leur côté, ils tentent de trouver une place. Sans faire de blessé, sans entraîner de drame malgré eux, mais en vivant tout de même. Et ses chemins de vie parallèle finissent par converger.

Zoc et Kael partagent un bout de route, une solitude à deux qui mènera, peut-être, à quelque chose de plus grand.

Jade Khoo, la poésie dans le stylo

Jade Khoo est une jeune autrice née en 1998. Zoc a en partie été réalisé durant sa dernière année d’étude au Gobelins, école de cinéma d’animation, en 2020. Cette même année, Jade Khoo réalise un film de fin d’étude qui a eu son petit effet dans le milieu du court-métrage : Colza.

 

 

Déjà dans cet univers, on retrouve la poésie anodine du quotidien. La douceur d’un monde que l’on connait mais tinté d’un peu de fantaisie. Les habitants lézards, les avions musiciens, les chanteurs oiseaux et les cheveux-ruissaux. Ce monde nimbé d’une poésie qui coule de source nous charme à peine les premières pages et images aperçu.

Cet univers nous fait saisir la délicatesse du quotidien, tout en montrant les écorchures qu’il provoque. A travers ses traits doux, ce goût des grands espaces et du silence, Jade Khoo nous raconte la vie et Zoc qui grandit.

C’est un superbe ouvrage qui apaisera la plus torturée des âmes. Editeur de Zoc, Dargaud nous permet de nous délecter d’un récit touchant, et de découvrir une autrice bourrée de talent.

Article posté le jeudi 28 avril 2022 par Marie Lonni

Zoc - Jade Khoo - Dargaud
  • ZOC
  • Auteur : Jade Khoo
  • Editeur : Dargaud
  • Prix :  16,50 €
  • Parution : 18 mars 2022
  • ISBN : 9782205202786

Résumé de l’éditeur : Zoc est une jeune fille d’apparence normale. Elle ne sait pas quoi faire de sa vie, elle n’a pas de réelle passion, mais possède un drôle de pouvoir : capter et puiser l’eau avec ses cheveux ! Un pouvoir inutile et embêtant, dont elle va tout de même essayer de tirer parti.

Quand un village près de chez elle subit une vaste inondation, elle décide rendre service en évacuant l’eau…

Ce voyage lui permettra de faire une rencontre étonnante, et Zoc s’apercevra qu’en voulant aider des gens, elle peut créer…

À propos de l'auteur de cet article

Marie Lonni

"C'est fou ce qu'on peut raconter avec un dessin". Voilà comment les arts graphiques ont englouti Marie. Depuis, elle revient de temps en temps nous parler de ses lectures, surtout quand ils viennent du pays du soleil levant. En espérant vous faire découvrir des petites pépites à savourer ou à dévorer tout cru !

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