Une femme retrouvée morte à la fin des années 60 à San Francisco, un pentagramme inversé, et l’inspectrice Kimberly Tyler en protagoniste : C’est comme ça que démarre le premier tome de American Parano – Black House, mené par le tandem Bourhis et Varela. Pensé comme un récit en deux tomes, le scénariste prévoit cependant plusieurs suites à sa bande dessinée, incluant chacun une enquête différente jusqu’à la retraite de la protagoniste.
American Parano : fini Las Vegas, place à San Francisco
Dans une plongée au sein des années 60, l’inspectrice Kimberly Tyler doit mener l’enquête suite à la découverte d’un cadavre marqué par un pentagramme inversée, symbole satanique. Le récit nous mène alors dans les recoins bien connus des amateurs d’œuvres noires. Au menu, on retrouve fumées en lieux clos comme entrées, culte satanique en plats et remarques sexistes pour le dessert. Le tout est pimenté par les interventions divines de BTMV, la radio Bible Teen Music & News. Placez le tout à San Francisco et observez la protagoniste aux yeux bleus clairs et cheveux rouge mener sa barque.
Sympathy for the Devil VS God only knows
Sympathie pour le diable, l’héroïne semble bien en avoir au travers de tout ses secrets. Le dessinateur et coloriste Lucas Varela nous l’indique lui-même en légende de ses esquisses, désignant les cheveux de Kimberly qui « symbolisent le diabolique qui se cache en elle ». Néanmoins, ce dernier semble bien décidé à faire comprendre à son lectorat qu’il ne s’agit que d’une légère inclinaison en lutte avec celle du bon, cachée dans les yeux bleus clair de l’inspectrice.
L’avenir nous dira sans doute si, dans American Parano, ce sont les yeux ou les cheveux qui se font reflet de l’âme. Nous pencherons de notre côté pour la tradition des yeux, au vu de l’importance de la couleur dans les pupilles (bleus, jaunes, rouges) des autres personnages. A cet argument s’ajoute également le partage de la couleur bleus des yeux de Kimberly avec le fond des bulles bleus de BTMV, en plus de déteindre sur ses habits.
Happy together, vraiment ?
A travers l’enquête de Kimberly, Hervé Bourhis semble prendre un certain plaisir à penser la galerie de personnages l’entourant. De l’affabulateur qui se servirait de la vague satanique pour se faire de l’argent au collègue plus âgé et plus gradé, les dessins de Lucas Varela rendent bien hommage aux idées de l’autre moitié du duo. On se plait alors à s’interroger sur les véritables motivations et potentiels secrets que peuvent cacher ses personnages secondaires. Le tandem échappe ainsi au danger de se focaliser seulement sur leur protagoniste, au dépit des êtres occupant son enquête. Les interactions entre les uns et les autres ne fait que donner plus de crédibilité à leur American Parano.
American Parano est donc bien un récit noir, et les auteurs se saisissent sans soucis des codes du genre. Les personnages, comme vu juste avant, répondent parfaitement aux archétypes de ce genre de récit. Les lieux dans lequel nos regards se baladent, eux, sont tout droits issues de ce genre d’œuvres. La génération hippie est représenté en décor, membre du trio communautaire des années 60 avec catholiques et satanistes bien présents. Les trois groupes face aux héros policiers qui ne manquent pas de vices. On regrettera cependant l’absence de personnages représentant de vive voix (bulles ?) la jeunesse hippie, du moins dans ce premier tome.
American Parano – Premier du titre
Au final, American Parano – Black House 1/2 tient ses promesses d’introduction, sans pour autant offrir une œuvre transcendante. Hervé Bourhis s’amuse à lâcher quelques premières pistes pour saisir le passé de sa protagoniste. Lucas Varela, lui, offre d’agréables dessins collant au récit, dans son style hérité de la ligne claire.
Il restera à découvrir la suite du récit pour pouvoir mieux apprécier l’aventure de Kimberly Tyler. Cependant, ce premier tome n’en reste pas moins une lecture agréable par un travail réussi de Bourhis et Varela !
- American Parano, tome 1/2
- Scénariste : Hervé Bourhis
- Dessinateur : Lucas Varela
- Éditeur : Dupuis
- Prix : 16.50 €
- Parution : 22 mars 2024
- Pagination : 64 pages
- ISBN : 9791034765850
Résumé de l’éditeur : San Francisco. 1967. La jeune inspectrice Kim Tyler et le lieutenant Ulysses Ford – un vieux de la vieille – enquêtent sur l’assassinat d’une étudiante retrouvée près du Golden Gate. Signe particulier sur le cadavre : un signe satanique gravé au couteau sur le ventre… Un indice qui pousse Kim et Ford à s’intéresser de près à Baron Yeval, le gourou de « l’Église de Satan ». Intriguée par Yeval, Kim va vite mener l’enquête en solo, au risque de brûler son âme au contact du troublant gourou…
Bourhis, qui connaît par cœur la société et la musique sixties, donne un crédit total à la toile de fond de ses enquêtes, auxquelles Varela apporte une élégance graphique à la fois rétro-pop et moderne.
À propos de l'auteur de cet article
Hippolyte Girier
Il est né en même temps que le Printemps, il ne jure que par le Hawkeye de Matt Fraction et le Grand Vide de Léa Murawiec. Il croit dur comme fer à la prise de pouvoir artistique de Zoé Thorogood, autant qu'il renie l'existence de roman graphique. Bref, cet article vous est offert avec plaisir, mais surtout par Hippolyte Girier.
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