Même les dieux et les super-héros ont un jour été enfants. Et il faut bien qu’ils apprennent à jouer leur rôle un jour ou l’autre. Pour Battling Boy, ce jour est arrivé: il a 13 ans, et part pour sa première mission: protéger une ville appelée Arcopolis des monstres qui l’envahissent. Sauf qu’il ne sait pas par où commencer…
Jolie contre-pied au mythe du super-héros à l’américaine que ce Battling Boy. Un petit blondinet qui sait depuis son plus jeune âge qu’il devra un jour être un dieu protecteur, mais qui en même temps aurait bien envie de se réfugier derrière son père dès que les choses deviennent un peu trop sérieuses. Un mélange improbable de héros prédestiné à faire de grandes choses et à qui tout réussi, et de gamin qui manque de confiance en soi et auquel le lecteur s’identifiera lui-même. Un héros plutôt intéressant, donc, et que l’on prend plaisir à suivre.
Ce premier tome ne fait, au final, que poser les bases de l’aventure. On pourra même lui reprocher d’être long à démarrer, et un brin confus sur ses premières pages: on passe d’une situation à l’autre sans comprendre ce qu’il en est, qui sont les héros et ce qu’ils font. Mais l’histoire trouve finalement son rythme quand elle se met enfin à suivre le Battling Boy promis, et arrivé à la fin de son tome 1, on regrette qu’il ne soit pas plus épais. L’univers créé, à la croisée des mythes américains, est aussi une bouffée d’air frais dans le genre, et une bel réussite. L’auteur a lâché la bride à son imagination, et dessine sans se poser trop de questions, nous entrainant très rapidement dans le feu de l’action.
Graphisme indie, entre comics et manga
Le graphisme, aussi, surprendra. Une influence comics indéniable, un fort penchant vers le manga, mais un trait plus crade, plus tremblé, plus organique, bien plus vivant que les mâchoires et biceps tirés à la règle que l’on retrouve trop souvent dans les genres suscités. Des démarches et des postures crédibles, changeantes, réalistes. Une composition bien travaillée pour certaines images qui n’hésitent pas à prendre une double page entière. Un bel objet, en somme, même si on le lecteur devra faire l’effort de passer le chaos des premières pages. Mais un objet un peu inclassable, qui pioche dans tout ce que fait la BD au niveau mondial pour se créer son propre style, mélange improbable de BD américaine et japonaise.
Qui se cache derrière cet ovni de la BD, au fait? Paul Pope, auteur américain très connu sur la scène indie, qui pioche ses influences autant dans Métal Hurlant que chez les éditeurs japonais (pour qui il a travaillé), et qui s’est fait une sérieuse réputation dans le milieu avec Teenage Sidekick (qui avait remporté un Eisner Award en 2006) et surtout la mini-série Batman année 100 (deux Eisner Awards supplémentaires en 2007). Battling Boy est son retour au roman graphique. Et les amateurs du genre risquent fort d’adorer. Même s’il leur faudra attendre un moment avant de lire la suite, qui n’est toujours pas sortie…
- Battling Boy
- Auteur: Paul Pope
- Editeur: Dargaud
- Prix: 17.95 €
- Date de sortie: 11 octobre 2013
Résumé de l’éditeur: « Ce premier tome de Battling Boy signe le grand retour de Paul Pope, star du comic book… Au programme, un superhéros et des monstres ! Dans ce premier épisode, un dieu guerrier expédie son fils, Battling Boy, dans un monde infesté de monstres assoiffés de sang. Il l’y laisse avec une carte de crédit magique et une valise pleine de tee-shirts enchantés. Ses instructions sont claires : ne pas rentrer à la maison avant d’avoir libéré la planète des monstres. C’est une mission difficile, et Battling Boy est persuadé qu’il n’est pas capable de l’accomplir. Mais s’il échoue, personne d’autre ne pourra sauver ce monde ! Premier volet des aventures de Battling Boy : 200 pages à la croisée du comic book, du manga et de la bande dessinée ; une histoire pleine de monstres, de fureur et de valeurs positives. »
À propos de l'auteur de cet article
Thierry Soulard
Thierry Soulard est journaliste indépendant, et passionné par les relations entre l'art et les nouvelles technologies. Il a travaillé notamment pour Ouest-France et pour La Nouvelle République du Centre-Ouest, et à vécu en Chine et en Malaisie. De temps en temps il écrit aussi des fictions (et il arrive même qu'elles soient publiés dans Lanfeust Mag, ou dans des anthologies comme "Tombé les voiles", éditions Le Grimoire).
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