Daruchan

Daruchan, ou la vie ordinaire de Narumi Maruyama, employé intérimaire, est un véritable recueil sur la différence. Lemon Haruna nous raconte la lutte quotidienne d’une jeune femme cherchant sa place. De métaphore en métaphore, l’autrice entre dans notre propre intimité.

Darumi Daruyama

Narumi Maruyama est une extraterrestre venant de la planète Daru Daru. Elle est née sur Terre, de parents humains, avec une fratrie humaine. Mais pas elle. Narumi n’est pas humaine. Elle s’appelle en fait Darumi Daruyama et elle ne sait pas trop ce qu’elle fait là. Elle essaie seulement de faire de son mieux pour être une employée intérimaire normale, serviable, tout ce qu’il y a de plus banale. En imitant les autres, elle a comprit certains codes et tente, tant bien que mal, de les mettre en pratique. Mais les humains, c’est compliqué, et certains signaux sont mensongés.

Alors la vie de Narumi n’est pas facile, incroyablement fatigante. Et elle n’est jamais à l’abri de se relâcher, et que quelqu’un découvre qu’en fait, elle vient de Daru Daru et qu’elle n’est pas tout à fait comme les autres.

Métaphore

Ceci n’est pas de la Science-Fiction.

La nature d’extraterrestre de Darumi Daruyama est une métaphore. A chacun son interprétation, dit l’adage. Alors, ici, je ne peux que vous délivrer la mienne.

Ma première interprétation est que le mot « Extraterrestre », ici, est une métaphore de l’autisme. Mais au fur et à mesure de la lecture, d’autres éléments enrichissent cette première perception. Et peut-être que finalement, Daruchan est simplement une ode à la différence.

Comme un ouvrage qui ouvre sur toutes nos singularités, nos particularités, sans jugement aucun.

Bascule

Lézard Noir nous a habitué à cela. Des livres qui, dans la subtilité de leur scénario, de graphisme, d’univers, nous questionnent, nous dérangent, nous font réfléchir quant au regard que nous portons sur le monde. Comme si quelqu’un déplaçait l’angle de vue de notre caméra intérieur. Daruchan ne déroge pas à la règle.

En suivant un morceau de vie de Narumi Maruyama, nous découvrons une multitude de regard, circulons dans une forêt de point de vue différent. Amenant à la déconstruction et reconstruction du nôtre.

Avec toute la finesse et la douceur d’un manga Slice of Life – tranche de vie – Daruchan tranche dans le vif de nos mentalités.

Douceur

La douceur de Daruchan vient aussi de son graphisme. Un peu enfantin, propre et bien cadré. Il est minimaliste et en couleur. Celles-ci sont presque en aplat, avec quelques dégradés délicats, discrets.  Les personnages ont l’allure de petites poupées, entre chiffon et porcelaine. Le décors dans le cadre se tenant comme un mini-théâtre. Le style accompagne parfaitement l’originalité de l’histoire.

Daruchan est mignon. Même si l’injustice transpire parfois des pages, Lemon Haruna est tendre avec ses personnages. Je dirais même qu’elle les aime et qu’elle nous les fait aimer.

Collègues

Akiko Higashimura est devenue mangaka. Pour n’en citer qu’un, elle publie notamment Trait pour trait, dessines et tais-toi.  Elle avait une équipe. Et parmi les membres de cette équipe, il y avait des amies de son école de graphisme. Et parmi ces amies, il y avait Lemon Haruna.

On la connaît, Akiko Higashimura. Reine de l’autodérision, elle déclare même – dans les bonus de Trait pour trait T3, que Lemon dessine beaucoup mieux qu’elle. Soyons honnêtes Mesdames, vos styles ne sont simplement pas comparables. Il y a des points communs, mais certainement pas la même façon d’aborder les choses.

Lemon Haruna montre un style bien à elle. Un peu sérieux, doté d’un côté maternelle et d’une réflexion percutante. Et de cette plume finement cinglante qu’on retrouve – oui, c’est vrai – autant chez Haruna qu’Higashimura.

Daru Daru s’appelle Terre

A propos des points de vue : Par définition, quand on se déplace, ils changent.

C’est exactement ce que permet Daruchan. Avec ce livre, c’est comme si Lemon Haruna nous mettait une lunette déformante, ajustante, différente devant les yeux. Elle nous tape sur l’épaule et nous dit : « Tiens, regarde comme ça ». Et cela nous met la tête à l’envers. Comme si nous regardions la même chose que d’habitude, mais sous un angle complétement différent et que, tout à coup, nous remarquions un truc que nous n’avions jamais vu auparavant.

C’est un manga essentiel. Doux, tendre et révélateur, qui dérange un peu et nous rend surtout, un peu plus grand.

Article posté le vendredi 30 avril 2021 par Marie Lonni

Daruchan, Lemon Haruna - Lézard Noir
  • Daruchan
  • Auteur : Lemon Haruna
  • Editeur : Lézard Noir
  • Prix : 16€
  • Parution : 18 mars 2021
  • ISBN : 9782353482078

Résumé de l’éditeur : Daru-chan vient de la planète Darudaru, mais elle cache sa nature d’extraterrestre sous les traits de Narumi Maruyama, une employée intérimaire ordinaire de 24 ans. Il n’est pas question pour elle de révéler son vrai visage, alors elle s’efforce de maîtriser les règles de la société pour trouver sa place parmi ses collègues.

À propos de l'auteur de cet article

Marie Lonni

"C'est fou ce qu'on peut raconter avec un dessin". Voilà comment les arts graphiques ont englouti Marie. Depuis, elle revient de temps en temps nous parler de ses lectures, surtout quand ils viennent du pays du soleil levant. En espérant vous faire découvrir des petites pépites à savourer ou à dévorer tout cru !

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