Avec Dracula, l’ordre du dragon, les auteurs italiens Marco Cannavo et Corrado Roi revisitent chez Glénat l’histoire du célèbre vampire. Le dessin de Corrado Roi fait merveille.
Des caisses remplies de terre maudite
Cela commence par un drôle de voyage. Par une nuit de juillet 1890, un navire arrimé dans un port bulgare appareille pour l’Angleterre. Cap sur Brighton. Dans ses cales, des caisses pleines de terre… Étrange cargaison… Plus loin, en Hongrie, un certain Jonathan Harker arrivant de Londres se rend à un rendez-vous dans la demeure du Prince Vlad Dracula.
Celui-ci se montre à l’heure du dîner mais il laisse son invité se restaurer et boire seul. Étrange… Puis arrive le moment de parler affaires. Le clerc de notaire Jonathan veut faire signer au prince l’acte d’achat d’une propriété près de Londres, l’abbaye de Carfax…
La traque du monstre
Et c’est bien à Londres que va commencer une chasse non pas à l’homme, mais au monstre, impitoyable. Le prince a des vues sur Lucy, la jeune et belle fiancée de Jonathan, qui lui rappelle Ilona, son épouse morte près de 400 ans auparavant! Et il doit étancher sa soif. De sang. Vampire parmi les vampires, Dracula va tenter par tous les moyens d’arriver à ses fins.
Comment déjouer ses plans ? Le professeur Van Helsing, autre personnage de cette histoire, connaît bien cette créature maléfique qui dit-il « ne peut pas mourir du simple passage du temps. Il rajeunit chaque fois qu’il boit du sang. Il peut se transformer en loup, en chauve-souris ou se dissiper pour devenir brume ». Il sait aussi que « les balles sont inefficaces. Pour tuer le Nosferatu, il nous faut pourfendre son coeur avec un pieu de frêne béni ».
Une relecture originale
Les amateurs du genre retrouveront dans ce one-shot de 112 pages tous les ingrédients de la littérature gothique et horrifique. Même si le scénariste Marco Cannavo prend des libertés avec le roman épistolaire publié en 1897 par l’Irlandais Bram Stoker. Le rôle des femmes du vampire y est déterminant, la cruauté et la sexualité débridée y sont encore plus mises en avant.
Cette variation n’altère en rien la puissance de ce mythe qui a généré au fil du temps de multiples adaptations, tant littéraires que cinématographiques et bien sûr dessinées.
Éloge de la noirceur
Si le scénario proposé ici souffre parfois de légères incohérences, on retiendra surtout la formidable performance graphique de Corrado Roi. Avec ses lavis à l’encre de Chine d’une noirceur absolue, un dessin qui fait irrémédiablement penser à d’autres maîtres de la bande dessinée comme Alberto Breccia ou Dino Battaglia, ses alternances de plans généraux et de gros plans, Roi assène une véritable claque visuelle à ses lecteurs.
Yeux exorbités, lèvres exsangues, ridés étirées comme des toiles d’araignées, corps dénudés et sanglants parcourent cet album très très noir. Il est en outre doté dans ses dernières pages d’un important appareil critique et iconographique consacré au mythe de Dracula.
Des acteurs comme Bela Lugosi, Christopher Lee ou encore Gary Oldman, le comte sanglant a revêtu bien des costumes sur la pellicule. Celui qu’ont mis en scène Cannavo et Roi n’a rien à leur envier…
- Dracula – L’ordre du dragon
- Scénario : Marco Cannavo
- Dessin et couleurs : Corrado Roi
- Editeur : Glénat
- Prix : 22, 50 €
- Parution : 24 avril 2024
- Pagination : 112 pages
- ISBN : 9782344062715
Résumé de l’éditeur : Hongrie, 1890. Piégé par le prince Vlad Dracula, Jonathan Harker se retrouve emprisonné entre les murs lugubres de son cachot. Mais Greta, l’épouse répudiée de ce prince sanguinaire, décide de lui venir en aide. Elle lui apprend qu’au même moment, Dracula navigue vers l’Angleterre afin d’épouser sa fiancée, Lucy, et d’assouvir dans la capitale britannique sa soif de sang neuf. Lorsque le bateau accoste au port de Whitby, Dracula a déjà pris plaisir à décimer tout l’équipage, regagnant ainsi une bonne partie de ses pouvoirs. Quand Jonathan parvient à son tour enfin à rejoindre Londres, une impitoyable traque commence. Mais bien qu’affaibli, Dracula n’a pas encore révélé toute la puissance de ses pouvoirs… Retour aux origines du mal avec ce one shot librement inspiré de l’œuvre de Bram Stoker qui nous ensorcèle avec le dessin au lavis noir & blanc d’une grande beauté de l’italien Corrado Roi. À ses côtés, Marco Cannavò développe une relecture originale et audacieuse du roman.
À propos de l'auteur de cet article
Jean-Michel Gouin
Passionné par l'écrit, notamment l'histoire, la littérature policière et la bande dessinée, Jean-Michel Gouin a été journaliste radio et presse écrite pendant une trentaine d'années à Poitiers.
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