Hey Djo !

A 13 ans, passer ses vacances avec son père dans son camion : on rêve de mieux. Pourtant Djo va apprécier ces moments père/fils dans Hey Djo ! un très bel album de Marzena Sowa et Geoffrey Delinte, édité par Gallimard BD.

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)

“Il va s’ennuyer à  mourir dans le camion”

C’est décidé ! Djo va passer ses vacances dans le camion de son père André. Et on ne peut pas dire que cela l’enchante. L’adolescent de treize ans aurait préféré passer son temps avec Pierrot et Thomas à jouer à la console.

Il faut souligner que le père a peu de relations avec son fils. “Tu ne connais pas ton propre fils”, assène Mathilde son épouse. Et on ne peut pas dire qu’elle ait tort.

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)

Radio, voitures, routes interminables et cargaisons importantes

Djo monte dans la cabine. C’est le début d’un long trajet à bord du camion de son père. Les routes paraissent interminables. Alors les deux discutent. Pas facile de créer du lien lorsque l’on n’a pas pris le temps de le faire pendant ces 13 premières années. La faute à des journées à travailler loin du foyer familial et la pudeur.

Pourtant ce voyage est là pour briser le mur de glace entre Djo et André. Il y a la radio avec les copains camionneurs, les cargaisons importantes à récupérer et à transporter plus loin. Dans des villes entre France et Belgique. Il y a les attentes très longues de Djo dans des bars. Seul et surveillé par les employées pendant que son père gère des affaires mystérieuses.

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)

Hey Djo : tu t’ennuies ?

Marzena Sowa et Geoffrey Delinte se connaissent déjà. Ils ont réalisé l’un des plus beaux albums jeunesse de 2020 : La grande métamorphose de Théo (Pépite BD au Salon du livre jeunesse de Montreuil). Pour Hey Djo, point d’oiseau et point de rêve de voler mais un lien : l’adolescence et la quête d’identité.

Et on peut dire que les tourments de l’adolescence vont bien au duo. Comme nous l’avait expliqué Marzena Sowa lors de notre interview à Brussels, la scénariste s’est inspirée des souvenirs de Geoffrey Delinte dont le père fut conducteur de camions. Lui aussi ayant passé de nombreuses heures dans la cabine des véhicules de son père. Djo, c’est D’Geoffrey.

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)

 

 

Hey Djo : jamais je ne m’ennuie avec Papa

Ce récit intimiste se déroule ainsi beaucoup dans la cabine du camion. Avec des conversations au début assez délicates, parfois glaciales entre Djo et André. D’ailleurs, les premières pages semblent un peu poussives avec quelques longueurs. Mais c’est logique. Il le faut ce temps de mise en place pour comprendre les relations quasi inexistantes jusqu’alors entre les deux personnages.

Comment comprendre un fils qui grandit, qui devient un adolescent ? Comment se creuse le fossé entre les générations ? Alors ces petits instants se transforment en une belle passation, un héritage, des valeurs et de la tendresse.

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)

Hey Djo : la brutalité de la vie

Alors Hey Djo se transforme aussi dans la deuxième partie de l’album. Une histoire qui prend des accents très contemporains. Avec ses thèmes forts : la prostitution ou les migrants. Alors Hey Djo devient puissant. Et ces deux personnages anti-héros sont pris dans le tourbillon des affres de nos sociétés. La vie devient brute. Alors les liens se retissent face à ces bouleversements.

Marzena Sowa n’oublie ni l’humour ni les thématiques plus universelles comme l’amitié ou les premiers émois. Dans la veine des sublimes bandes dessinées de Max de Radiguès (Je le dis et je le répète : c’est l’auteur qui parle le mieux de l’adolescence).

Ce récit bénéficie du talent de Geoffrey Delinte. L’auteur belge né en 1989 réalise de très jolies planches. Son trait semi-réaliste fonctionne à merveille. Les courbes des personnages se fracassent sur les lignes droites des routes, des camions et des architectures. Cela donne un très bel équilibre. Sans parler des couleurs ! J’aime beaucoup les teintes de vert et de beige-ocre.

Hey Djo : un très beau road-trip intimiste entre un fils et son père camionneur. Un récit tendre et drôle sur l’entrée dans l’adolescence.

Article posté le mercredi 12 juin 2024 par Damien Canteau

Hey Djo ! de Marzena Sowa et Goeffrey Delinte (Editions Gallimard BD)
  • Hey Djo !
  • Scénariste : Marzena Sowa
  • Dessinateur : Goeffrey Delinte
  • Editeur : Gallimard BD
  • Prix : 22 €
  • Parution : 12 juin 2024
  • Pagination : 168 pages
  • ISBN : 9782075157247

Résumé de l’éditeur : C’est les grandes vacances pour Djo ! A 13 ans, il serait bien resté dans sa chambre à jouer au jeux vidéo, mais il est contraint de suivre son père, camionneur, sur les routes de France. Pas vraiment l’été rêvé ! Alors que les paysages défilent, Djo fait face aux aléas du voyage, entre rencontres incongrues, tensions familiales et découverte du premier amour. Peu à peu, il savoure l’expérience inédite, le goût de l’aventure et de la liberté. Un roadtrip intimiste, tendre et bourré d’humour, qui touche au coeur tant il dit justement le lien père-fils et le grand basculement qu’est l’adolescence.

 

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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