Urban T5 – Schizo Robot

Urban. Quatorze heures après le second attentat, les drames s’enchaînent dans la cité de Monplaisir. Pour reprendre le contrôle, Springy Fool envoie Narcisse faire un deal avec Zach. Profitant de sa notoriété, il lui confie la responsabilité de Chef de la Milice. Zach accepte et se retrouve devant les caméras pour remercier Springy Fool…

Game over

Et voilà, c’est fini. Voilà près de 12 ans que nous avons accompagné Zach, Ishrat, Springy fool et une galerie de personnages secondaires, il est temps pour Luc Brunschwig et Roberto Ricci (au dessin) de clore définitivement leur sombre série d’anticipation. Le nombre de tomes n’est certes pas astronomique, mais les ambitions, les conflits et les thèmes sous-jacents sont importants.

À la fin du tome précédent (voir les résumés des 4 tomes en fin d’article), Zach a entrevu la vérité qui se cache derrière le jeu mortel des Urban Interceptors. Dans ce temple du plaisir et du vice (ce nouveau Sodome), le jeune homme a vu ses rêves brisés. Lui qui rêvait de justice et non de vengeance (comme le promeut son héros de dessin animé Overtime), a compris que le meurtre du jeune Niels n’était pas du au hasard. Antonius Ebrahim l’a exécuté sur ordre de Springy Fool… car c’est son fils naturel….  Même à Monplaisir, cet infanticide ne peut pas être passé sous silence… à moins qu’on ait les moyens de tout effacer.

Reste à voir qui peut définitivement mettre hors-jeu le créateur fou et omnipotent de la cité du vice ? Zach, le jeune Urban interceptor ? Un des nombreux laissés pour compte qu’il a poussé dans la déchéance et qu’il amène souvent à la mort ? À moins que ce ne soit A.L.I.C.E, l’intelligence artificielle qu’il a créé pour construire et administrer la cité…

Fin de partie dramatique

Dans cet ultime tome, les personnages sont en fin de parcours. Springy Fool doit payer son dû, tout comme ses seconds couteaux (le tueur Ebrahim ainsi que Narcisse, le coach). Maintenant que les jeux sont faits, le passé et les fautes de chacun révélés, il est temps de passer à la caisse.

Il parait qu’on paie tous un jour nos vilaines actions… c’est bien la démonstration (quelquefois hasardeuse) que promet ce tome final d’Urban

Urban : une série de divertissement, mais aussi de questions sociétales

C’est cette capacité de Luc Brunschwig que j’aime dans ses différentes séries. Sous couvert de grand spectacle (sur Urban, sans aucun doute, Roberto Ricci assure comme un dieu !), il pousse le lecteur à se poser des questions en développant dans chaque tome des thématiques.

Dès le premier tome, il nous immerge dans cette Cité du Vice autogérée (Sin city), en pointant du doigt l’hyper-médiatisation. Avec Zach, le jeune Urban Interceptor, il aborde la question de la perte de l’innocence. Au fur et à mesure qu’il développe son histoire (j’ai compté 9 arcs narratifs), Luc s’interroge sur la justice-spectacle et les dérives de l’ultra-libéralisme.

Au fur et à mesure, ses personnages sont devenus plus complexes, plus sombres aussi. Aucun n’en sort vraiment intacts, excepté Zach, lourdaud mal dégrossi de la campagne. Poussé par une sorte d’innocence enfantine (et de mentor de dessin animé) il refuse la corruption et les menaces. C’est sans doute cela qui le rend digne, différent et attachant.

Dans ce dernier tome, Luc Brunschwig développe un nouveau thème. Au côté de Springy Fool, la belle A.L.I.C.E. intelligence artificielle hyper sexuée, gère l’ensemble de la cité, du réseau de communication jusqu’au moindre robot. Mais quel est vraiment son rôle ? Quelle est sa liberté ? Est-elle complètement asservie à son créateur, même quand ce dernier se joue de la vie et de la mort de ses clients ? Confrontée à ses décisions amorales, peut-elle devenir elle aussi responsable de la mort d’êtres humains ? C’ est une des trois lois de la robotique (formulées en 1942 par Isaac Asimov et John W. Campbell) que Luc Brunschwig aborde. Évitant le classique conflit intérieur de la machine pensante, il propose une version assez originale, que je n’ ai pas vu venir.

Roberto, maître des crayons et de l’ordinateur

Depuis le début de la série (et même avant avec sa série Les âmes d’Hélios), le dessinateur italien Roberto Ricci fait des merveilles. Il concrétise un monde complexe et immersif, qui conjugue tous les extrêmes. Violent, sombre, mais aussi fun (tous les clients sont déguisés en cosplay) Monplaisir est un mélange cohérent de technologie et de drames humains. Que ce soit dans les scènes de foule, la ville tentaculaire ou les scènes d’action, Roberto Ricci a un sacré sens du découpage/ Les planches sont des petits bijoux pour les yeux que je vous conseille d’admirer encore et encore pour en percevoir tous les détails.

De plus, il joue avec deux univers graphiques (celui du dessin animé d’Overtime et celui de Monplaisir), qui convergent dans un déchaînement de couleurs et de violence…  J’ai rarement pris autant de plaisir à relire une série, tant elle est riche par son scénario et son visuel (j’ai fait l’exercice pour chroniquer cet album).

Alors, ça valait la peine d’attendre ?

Sans aucun doute, ma réponse est oui, tant cette série de d’anticipation cumule les qualités. Oui aux 12 ans de patience depuis la parution du premier tome. Oui à la quinzaine de personnages que Luc Brunschwig développe avec précision et empathie. Oui aux scènes violentes (mais jamais gratuites), souvent perturbantes qu’il va vous falloir endurer. Oui aux questions que soulèvent le récit et auxquelles il faudra que vous trouviez Votre réponse.

Merci Luc pour cette série sombre et humaine qui m’a accompagné pendant 12 ans (plus de 20 ans pour toi, Luc). Merci Roberto pour ce dessin puissant et fouillé, qui a réussi à mettre en images les délires de maître Luc. A très bientôt les gars, en espérant qu’une belle intégrale sortira pour Noël et habitera de nouveaux lecteurs.

* C’est la deuxième version ( un reboot ), puisque Luc Brunschwig avait créé en 1999 une première série sur le même univers nommée “Urban Games”. Presque 10 ans après, Luc a remis le couvert en confiant le pinceau à Roberto Ricci avec une nouvelle version plus dense, sombre et complexe.

Article posté le mercredi 16 juin 2021 par jacques

Urban de Luc Brunschwig et Roberto Ricci (Futuropolis)
  • Urban tome 5
  • Scénariste : Luc Brunschwig
  • Dessinateur : Roberto Ricci
  • Editeur : Futuropolis
  • Prix : 16 €
  • Parution : 5 mai 2021
  • ISBN : 9782754817592

Résumé de l’éditeur : Le dernier tome d’une grande série d’anticipation : nommée à Angoulême en 2017 et menée de main de maître par Luc Brunschwig et Roberto Ricci. L’ultime confrontation : les révélations et les coups de théâtre s’enchaînent jusqu’au dénouement final, amer et inquiétant ! Dans un futur pas si lointain, nous sommes conviés à Monplaisir, le dernier lieu de loisir offert à une humanité en train de se reconstruire. Tout y fait l’objet d’un jeu… même la mort. Sur 300 000 hectares, avec deux niveaux d’accès et près de 18 millions de visiteurs quotidien, Monplaisir est le plus grand parc d’attraction de la galaxie, imaginé par Springy Fool, un génie de l’informatique et entièrement géré par A.L.I.C.E., l’I.A. qu’il a créée ! Mais Monplaisir n’attire pas que des visiteurs en mal de divertissement. Voleurs, assassins, violeurs y viennent pour tenter leur chance. Et, parce que tout se finit en jeu, les arrestations sont filmées en direct et font l’objet de paris. Zachary Buzz vient justement d’intégrer la brigade des Urban Interceptors, qui combat ces criminels. Il va découvrir une police qui ne ressemble en rien à l’idée qu’il se fait de la justice, et un monde qu’il n’est pas prêt d’accepter. Avec Urban, comme dans Le Pouvoir des innocents, Luc Brunschwig pointe du doigt les dérives de notre société, où le divertissement fait des fortunes et devient un enjeu sociétal. Roberto Ricci donne corps et vie au monde d’Urban dans un style qui rappelle le meilleur Gimenez !

Résumé du Tome 1 - Les règles du jeu

Le jeune Zachary Buzz quitte la ferme familiale pour Monplaisir. Il est recruté pour devenir Urban Interceptor, la milice du complexe de loisirs tentaculaire. Grand et costaud, il est pris sous l’aile du coach, au milieu de cette ville vouée à toutes les formes de plaisir, créée par Springy Fool. Ignorant de ses usages, il découvre le rôle particulier des Urban Interceptor qui doivent combattre des meurtriers aguerris. Ces jeux de cirque modernes donnent lieu à des paris.
Insuffisamment préparé, il n’est sélectionné pour le prochain round, qui revient à son collègue Isham. Devant les caméras omniscientes du complexe, les centaines de milliers de clients du centre de loisir assistent au meutre d’Isham par le terrible tueur Ebrahim. Pendant ce temps, Zach fait la connaissance (intime) de la belle Ishrat, dévouée à tous les caprices des habitants de l’hôtel où il réside.
Pendant le combat entre Isham et Antiochus Ibrahim, le jeune Niels Colton, âgé de 8 ans, s’enfuit de sa cage dorée et de sa nounou électronique, découvrant pour la première fois les rues de Monplaisir

Résumé du Tome 2 - Ceux qui vont mourir

Sur Néo Amsterdam, Le lieutenant-enquêteur Gunmar Carl Christansen présente ses condoléances à la mère du jeune enquêteur Al Bangé. Pour prendre la suite de son enquête, il doit se rendre à Monplaisir et en profitte pour se faire accompagner de sa femme.
Dans les rues, Niels est perdu. Il suit un vagabond, surnommé Magic, qui vit de petits tours dans les rues. Ce dernier se prend d’affection pour le gamin, et lui apprend le minimum pour rester en vie. Le système de la cité fait la vie dure à ces congénères. Ils doivent changer d’endroits pour dormir à heures fixes, car les arrière-cours sont dénucléarisés tous les jours. Comprenant que

l’enfant est le fils d’une famille aisée, il profite de son crédit illimité pour se faire payer de la nourriture et d’autres plaisirs charnels.
Zach, quant à lui, se prépare pour son combat contre Antiochus Ibrahim, et réussit même à faire passer un mot à Ishrat pour la revoir.

Le “jeu” mortel s’engage dans le Nirvana, le niveau aisé du parc de loisir. Ibrahim a, comme toujours, un coup d’avance, mais cette fois-ci, il est surpris par son adversaire. Dans le corps à corps qui s’engage, il tire un coup de feu qui tue un innocent en arrière-plan… le jeune Niels… Tandis que Zach pleure cette mort, d’énormes explosions ont lieu dans Monplaisir

Résumé du tome 3 - Que la lumière soit...

Après les explosions en série, toute l’infrastructure de Monplaisir est hors service. Blessé, Springy Fool laisse A.L.I.C.E gérer les réparations d’urgence, et décide de faire la chasse aux responsables de chaos. Mais ce qui l’effraie le plus, ce sont les investisseurs de Monplaisir, qui lui rappellent le cadre du contrat, ne jamais mettre en danger les clients fortunés qui résident au niveau 2, le Nirvana.

Ayant tenu le cadavre dans ses bras du petit Niels, Zach est complètement sonné.
A.L.I.C.E affirme que ce sont les déchus, les losers qui sont à l’origine de l’attentat et que la chasse va bientôt avoir lieu. Elle s’occupe de l’enquête, avec l’aide des Urban Interceptors en bras armés…

La belle Ishrat est approchée par Narcisse. Il lui promet de solder son compte (ce qu’elle doit à Springy Fool pour retrouver sa liberté), contre un peu de bon temps. Acceptant le deal, la jeune femme passe la soirée puis la nuit dans le lit de Springy. Mais pour toute récompense, elle est  enlevée par Narcisse, qui s’apprête à retirer ses organes reproducteurs, pour ne prendre aucun risque

Dans la ferme des Buzz, les robots qui font le travail quotidien sont devenus fous. Ils liquident tous les fermiers, et seule sa sœur, Julia, en réchappe…

Dans la rue, Zach doit intervenir. Magic, le vieil homme qui accompagnait Niel, a pété les plombs. Privilégiant la manière douce, Zach assomme le forcené et découvre la raison de sa fureur. Il avait parié sur la mort d’un inconnu pendant la traque contre Ibrahim, mais la mort de Niels n’est pas accidentelle…

Résumé du tome 4 - Enquête immobile

Pour concrétiser son projet pharaonique en 168 jours seulement, Springy Fool n’a pas eu le droit d’employer d’humains. Grâce à ses compétences d’ingénierie robotique, il a mis au point un premier Méca qui partage son savoir au suivant, et cie… Ainsi, en très peu de temps, une armée de robots s’attelle au travail.
Mais Mr Fool n’est pas à l’aise avec la gente féminine, il est même terrorisé par les femmes. Quand A.L.I.C.E. comprend les besoins sexuels de son créateur, l’I.A. envoie un robot qui répond en tous points à son idéal féminin. Mais ce dernier refuse le contact avec un robot.

Magic subit la torture de Narcisse. Après de nouveaux sévices, il crache le morceau devant les caméras du centre, donnant une liste de complices, qui sont immédiatement abattus sans préambules, ni procès… Puis il est froidement exécuté par Springy Fool
Pour n’avoir pas éliminé Magic, Zach est mis à pied et enfermé dans son appartement. Ressassant révélation sur le pari de Magic, il tente de rentrer en contact avec la mère de Niels, mais A.L.I.C.E. bloque sa demande prétextant que le “jeu” est fini.
Suivant la “petite voix” de Ovi, l’inspecteur de dessin animé qui lui sert de mentor, Zach fouille les archives vidéo de Monplaisir. Il apprend ainsi que Merenia Colton, la mère du jeune Niels est arrivée comme simple touriste avec son mari, et qu’elle a attiré l’intérêt de Springy. Ce dernier a piégé son mari au jeux, qui l’a laissé “en dépot”. Refusant la situation, Merenia a survécu dans la rue, puis elle a cédée à Springy, devenant sa compagne. Mais son futur accouchement a provoqué le courroux de Springy. Aidée par A.L.I.C.E., Merenia s’est enfuie pour accoucher dans une arrière-cours et confier son bébé à un robot-nounou.
Julia débarque au domicile de son frère, amenant avec elle Ishram, évanouie. Tandis qu’il prend soin d’elle, un nouveau drame se joue. Tous les visiteurs de Monplaisir déclarent des symptômes d’empoisonnement…

À propos de l'auteur de cet article

jacques

Designer Digital, je lis et collectionne les BD depuis belle lurette. Ex Rédacteur en chef d’Un Amour de BD, j’aime partager ma passion pour ce média, et faire découvrir les pépites que je croise. Passionné par la narration sous toutes ses formes, je suis persuadé qu’une bonne BD a autant de qualités qu’un autre produit culturel (film, livre, disque…) et me fais fort de vous l’expliquer.

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