Vincent Eches, directeur de la Cité BD d’Angoulême

« C’est une maison où l’on voit la bande dessinée dans ce qu’elle a été, ce qu’elle est et ce qu’elle pourra être. » Le 15 mars 2022, Vincent Eches était nommé directeur général de la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image d’Angoulême. Le successeur de Pierre Lungheretti nous présente son parcours et ses ambitions pour sa structure à travers une interview passionnante.

Picasso et la BD (Cité de la BD et de l'image Angoulême / Musée Picasso Paris / crédit Photo : Damien Canteau - Comixtrip)

Vincent Eches. Il y a seulement quelques mois que vous avez pris la tête de la Cité internationale de la BD. Avez-vous eu le temps de bien prendre vos marques ?

Oui, je pense. J’ai eu beaucoup de chance parce que j’ai reçu un excellent accueil de la part des équipes de la Cité, de la part des partenaires institutionnels et autres partenaires territoriaux.

J’avais surtout très envie de démarrer vite car il y avait une vacance du poste et qu’il fallait tout de suite être dans l’action.

En plus, je suis arrivé en juillet. Et Angoulême en été, c’est très agréable. De la ville, je ne connaissais que les quatre jours du festival pour lequel je venais depuis de nombreuses années.

« Je viens du monde du spectacle, du théâtre et des centres d’arts dramatiques. »

Avant d’être directeur de la Cité, vous avez travaillé pour la Ferme du Buisson. Qu’est-ce que cette structure ?

J’ai en effet été le directeur général de la Ferme du Buisson de 2011 à 2022. Cette structure s’étend sur deux hectares et mêle les arts du spectacle et l’art contemporain. C’est donc un lieu de pluridisciplinarité des arts.

Je suis un lecteur historique de bandes dessinées. J’ai une forte relation avec le 9e art. À La ferme du Buisson, j’ai imaginé le Pulp Festival qui fait se croiser les mondes de la bande dessinée avec les arts présents dans la structure.

Le fonds et les archives de la Cité de la BD à Angoulême (crédit photo : Damien CANTEAU / Comixtrip)

Comment concevez-vous votre poste de directeur de la Cité ?

La Cité est un lieu formidable de croisement des enjeux. C’est une maison qui permet la conservation, la valorisation, la création avec la Maison des auteurs mais également une maison de transmission avec le pôle de lecture public et le centre de documentation. J’aime cette multiplicité des enjeux, c’est un vrai tout. C’est une maison qui peut accompagner ce que peut devenir la bande dessinée.

Mon poste, je le vois comme un directeur d’ensembles. Un poste où je dois prendre en considération toute la bande dessinée. Je dois aussi faire vivre toutes les unités, tendre vers de la cohésion. Je veux être à l’écoute de tous. Sans oublier que la Cité à une dimension nationale et internationale. Je veux poursuivre ainsi ce qui a été mis en place par mon prédécesseur Pierre Lungheretti.

Pour mener à bien votre mission, sur quoi allez-vous vous appuyer ?

D’abord sur la force des celles et de ceux qui travaillent à la Cité. Ce sont des personnes engagées et passionnées par le médium bande dessinée. Elles ont une solide connaissance du 9e art. C’est un socle important pour moi. Tous ont envie de défendre la bande dessinée.

Le deuxième atout, c’est l’accompagnement institutionnel. Cet écosystème territorial, ce maillage, qui fonctionne bien entre nous. Mais également du monde de la bande dessinée locale mais également nationale. C’est un accompagnement cohérent.

Le troisième atout, c’est ce capital artistique qui est au cœur de la Cité. Les collections de planches et d’imprimés qui forment un socle stable et important.

Le quatrième atout, c’est que la Cité est et continuera d’être un lieu, un lien important avec la création. Par exemple, pour l’exposition temporaire visible actuellement Pop Rock Wizz, nous avons fait appel aux autrices et auteurs actuel.les ou ancien.nes de la Maison des auteurs pour la création des animations dans la partie « boîte de nuit ». C’est important de garder ce lien avec ces artistes.

Il ne faut pas aussi oublier la librairie qui fonctionne bien et qui se porte bien économiquement. Le cinéma permet aussi d’élargir le spectre autour de la bande dessinée. Le centre de documentation, quant à lui, permet de toucher les acteurs de la recherche fondamentale.

Quant aux chiffres de fréquentation du musée, ils sont en hausse et nous en sommes très heureux.

« L’année prochaine, la future exposition mettra en lumière la bande dessinée et la nourriture. »

De Popeye à Persépolis : bande dessinée et cinéma d'animation à La cité de la bande dessinée Angoulême (crédit photo : Comixtrip / Damien Canteau)

Quels sont les axes que vous allez poursuivre et ceux vers lesquels vous souhaitez aller ?

Je souhaiterais continuer la politique d’acquisition des collections (planches et imprimés). Il faut aussi poursuivre la stratégie des dons et des legs qui sont une part importante de notre fonds. Mais surtout pouvoir les valoriser avec des expositions produites seules ou avec d’autres structures.

J’aimerais que l’on mette en lumière autant les expositions monographiques sur un.e artiste, ce qui permet de le placer dans l’histoire de la bande dessinée, mais aussi développer les expositions thématiques ou comment la bande dessinée s’en empare. D’ailleurs, l’année prochaine, la future exposition mettra en lumière la bande dessinée et la nourriture.

Il serait intéressant lors de nos prochaines expositions, de se tourner vers des œuvres nouvelles ou les relations avec les œuvres numériques, et pourquoi pas de montrer des créations originales réalisées spécialement pour cela.

Enfin, un enjeu important pour moi, c’est la scénographie. Il faut revoir le rapport au corps du visiteur afin qu’il soit plus acteur de sa déambulation.

« Nous avons répondu à un appel à projet commun avec des Finlandais et des Polonais autour du Webtoon. »

En dehors des expositions, y a-t-il d’autres axes à développer ?

Ce qui m’intéresse également, c’est de relier le pôle de lecture publique avec le musée, continuer d’inventer des outils de médiation en ce sens.

Il faut poursuivre et augmenter les liens entre les publics du territoire avec le musée. Créer des événements entre le public, l’œuvre et l’artiste. Comme par exemple, ce que nous avons mis en place pour l’inauguration des expositions lors du festival avec Corto Maltese et l’illumination par des bougies d’un dessin. Il faut plus de communion artistique, une manière populaire et joyeuse de créer du lien.

Le fonds et les archives de la Cité de la BD à Angoulême (crédit photo : Damien CANTEAU / Comixtrip)

Je veux aussi que la Cité développe plus son soutien à la création, notamment par la Maison des auteurs mais pas uniquement. Nous pouvons être force de propositions et être au carrefour des disciplines avec la création d’œuvres transmédias.

Enfin, il faut continuer à renforcer notre dimension internationale. C’est en ce sens que nous avons répondu à un appel à projet commun avec des Finlandais et des Polonais autour du Webtoon.

Vincent Eches, si vous aviez à présenter la Cité à quelqu’un qui ne la connaît pas, qu’en diriez-vous ?

La Cité est un endroit où l’on peut rencontrer la bande dessinée dans toutes ses dimensions. Un lieu où on peut lire de la bande dessinée, on peut y voir des planches, des expositions, un endroit où la bande dessinée se crée au quotidien. C’est le lieu qui synthétise le mieux tout le 9e art. C’est une maison où l’on voit la bande dessinée dans ce qu’elle a été, ce qu’elle est et ce qu’elle pourra être.

Entretien réalisé le 1er février 2023
Article posté le vendredi 17 mars 2023 par Damien Canteau

La cité internationale de la bande dessinée d'Angoulême

121 rue de Bordeaux – Angoulême

+33 5 45 38 65 65

Site : cité internationale de la bande dessinée

Horaires :

  • du mardi au samedi de 10h à 18h ; dimanche et jours fériés de 14h à 18h
  •  en juillet et août : du mardi au samedi de 10h à 19h ; dimanche et jours fériés de 14h à 19h
  • pendant le Festival international de la bande dessinée (fin janvier), ouverture pendant les horaires du festival et accès uniquement avec le pass festival
  • fermeture annuelle de la Cité 1er janvier, 1er mai et 25 décembre

Tarifs :  musée et expositions temporaires

  • plein tarif 10 €
  • groupe adulte 5 €
  • tarif réduit 6 € (sur présentation d’un justificatif)
  • Gratuité (voir le site)

 

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

En savoir