Notre avis : Les éditions Misma rééditent en intégrale les trois albums de Yoon-sun Park : En Corée, En France et Encore en Corée, sous le titre En Corée.
Née en 1980 à Séoul en Corée-du-Sud, Yoon-sun Park dévoile sa vie dans ce bel album de 212 pages. Alors toute petite, elle apprend le décès de son jeune cousin d’un accident de voiture alors qu’il est enterré depuis plusieurs jours. Et ce sera ainsi toute son enfance et adolescence : mise de côté par sa mère, peu aimée. D’ailleurs, elle lui dira avec un étonnant sang-froid : « Tu n’es pas sociable, comme les autistes. Si tu n’as pas de spécialité comment tu pourras gagner ta vie ? Deviens designer ».
Son père décède d’une crise cardiaque à 56 ans, comme son père. Le lecteur découvre ainsi les coutumes liées aux funérailles en Corée, notamment les rituels des personnes qui viennent rendre hommage au défunt. Il faut souligner que Monsieur Park était professeur d’arts et que de nombreux élèves se prosternèrent alors devant sa photo.
Elle prend des cours de dessins mais est accidentée en marchant sur un passage-piétons (vertèbre fêlée) qui la laisse sur un lit engoncée dans un plâtre immense en 1998. L’année suivante, elle débute donc des études de design…
Etonnament c’est à chaque fois qu’il y a un enterrement que la vie de Yoon-sun Park change de direction. Elle a consigné en dessin ces changements fréquents. Cette autobiographie permet aussi au lecteur de découvrir la vie en Corée, ses us et coutumes et son histoire; notamment la Guerre de Corée et la séparation en deux pays si douloureuse dans sa famille (ses aïeux).
L’auteur du Club des chats (Misma) fait ainsi une belle chronique sociale de son pays. Très loin de ces précédentes publications – L’aventure de l’homme-chien, Sous l’eau ou Le jardin de Mimi – son style graphique est différent. Fait d’un lavis gris, son dessin est léger et aérien.
- En Corée
- Auteure : Yoon-sun Park
- Editeur : Misma
- Prix : 20€
- Parution : 21 mars 2017
Résumé de l’éditeur : En Corée, lorsqu’on rêve que l’on perd une dent, cela signifie que quelqu’un va mourir dans la famille. Peu de temps après avoir fait ce rêve, Yoon-Sun reçoit un coup de téléphone qui l’avertit du décès de son cousin dans un accident de voiture. À ce moment-là, elle est en France, loin de son pays natal, et l’annonce de cette disparition va réveiller des souvenirs enfouis. En premier lieu celui de son père, emporté dix-sept ans plus tôt par une crise cardiaque au volant de sa voiture… Né d’un besoin presque vital d’extérioriser ses émotions, Yoon-Sun Park se lance dans l’écriture d’un journal dans lequel elle convoque ses souvenirs en Corée du Sud. Chaque enterrement est alors le point de départ d’une chronique où sont décrites non seulement les coutumes et traditions coréennes, mais aussi les querelles de famille et les non-dits. Sans jamais tomber dans le pathos, elle aborde le thème de la mort avec une infinie délicatesse et une immense pudeur et parvient à rendre son expérience universelle. Dans ce journal, elle dévoile un style beaucoup plus abouti, tout en retenu, pour coller au mieux aux émotions de son sujet. Son dessin subtil, souligné de légers lavis de gris, immortalise d’émouvantes tranches de vie et tente de figer les souvenirs évanescents de ces douloureuses épreuves. Sans doute une façon pour elle de faire face à la mort et de mieux la défier.
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une trentaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée) et co-responsable du prix Jeunesse de cette structure. Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip. Damien modère des rencontres avec des autrices et auteurs BD et donne des cours dans le Master BD et participe au projet Prism-BD.
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