Fondu au noir

Notre avis :  Automne 1948. C’est là, dans un état qu’on imagine aisément alcoolisé que nous faisons connaissance avec Charlie Parrish, personnage principal de Fondu au noir. Le scénariste de cinéma cuvant dans une baignoire ne se souvient que par bribes  de la soirée qui a occasionnée son état. Rien d’extraordinaire en soi, à la différence près que ce traumatisé de la guerre comprend rapidement que de gros ennuis se profilent pour lui. Il vient de se réveiller chez la star hollywoodienne du moment, Valeria Sommers, et la découvre gisant sur le sol, étranglée. Pris de panique, il s’enfuit de ce qui est potentiellement le lieu du crime. Potentiellement, car Charlie apprendra rapidement que ce meurtre a été maquillé pour devenir officiellement un suicide.

Ainsi, tout au long de ces plus de trois cents planches, Charlie va mener sa propre enquête. Accompagné d’une quinzaine de protagonistes, tous aussi torturés que lui, il va lentement, mais sûrement, plonger dans une ambiance aussi noire que les films du genre de l’époque. Fondu au noir est à l’image du procédé utilisé dans la technique du septième art. Sans cesse, sera donné un indice qui disparaîtra au profit d’un autre… C’est à l’intérieur d’une énorme firme du cinéma hollywoodien (le Victory Street) que seront mis en lumière corruption, violence, sexe, trahisons et manigances. Autant d’éléments qui vont entraîner les personnages dans les méandres d’une époque où tous les coups bas sont légion. Et où il sera bien difficile de trouver la bonne porte de sortie.

Ed Brubaker, Sean Phillips et Elizabeth Breitweiser. Respectivement scénariste, dessinateur et coloriste, ce trinôme est ce qu’on peut appeler une valeur sûre dans le monde du neuvième art. Velvet, Fatale ou le très récent Kill or Be Killed  sont leurs séries communes, synonymes de succès. Avec Fondu au noir, qui devrait être une trilogie, Ed Brubaker prouve, s’il en était encore besoin, cette aisance narrative qui fait de lui un auteur estimé. Avec son acolyte Sean Phillips, il nous entraîne dans un polar à l’air irrespirable qui maintient en haleine jusqu’à la dernière planche. Qu’importe la fin de cette histoire qui pourrait paraître « facile », l’intrigue étant tellement bien ficelée qu’après tout, elle peut tout à fait se conclure par une explication des plus évidentes.

Avec le trait sombre et dynamique du dessinateur, associé à la colorisation parfaite d’Elizabeth Breitweiser, Fondu au noir devient un véritable bijou graphique et scénaristique. On imagine le travail colossal qui a dû être fourni pour restituer cette Amérique de la fin des années quarante baignant dans une traumatisante et longue guerre froide. Rien que pour ça, il ne faut surtout pas passer à côté de cette histoire habitée par des héros attachants parce que tous dotés d’une profonde fragilité.

Article posté le mardi 06 mars 2018 par Mikey Martin

Fondu au noir : formidable polar d'Ed Brubaker et Sean Phillips, décrypté par Comixtrip le site BD de référence
  • Fondu au noir
  • Scénariste : Ed Brubaker
  • Dessinateur : Sean Phillips
  • Coloriste : Elizabeth Breitweiser
  • Éditeur : Delcourt
  • Prix : 39,95 €
  • Parution : 29 novembre 2017

Résumé de l’éditeur : Un film noir dont les scènes doivent sans cesse être retournées Un scénariste de cinéma traumatisé, alcoolique et détenteur d’un terrible secret La mort suspecte dune starlette Un directeur de studio hystérique prêt à tout pour boucler ses films avant l’effondrement de l’âge d’or du cinéma. «  »Fondu au noir » » est un thriller hollywoodien où il est question de course à la célébrité, de sexe et de mort !

À propos de l'auteur de cet article

Mikey Martin

Mikey, dont les géniteurs ont tout de suite compris qu'il était sensé (!) a toujours été bercé par la bande dessinée. Passionné par le talent de ces scénaristes, dessinateur.ice.s ou coloristes, il n'a qu'une envie, vous parler de leurs créations. Et quand il a la chance de les rencontrer, il vous dit tout !

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