Notre avis : Gentleman cambrioleur, Alexandre Jocob était un vrai voleur anarchiste non-violent. Sa vie, digne d’un roman, est contée dans Le travailleur de la nuit, un album de Matz et Léonard Chemineau.
1905. Le procès d’Alexandre Jacob se tient à Paris. Il est accusé d’avoir tué un gendarme. Une occasion pour le juge de retracer son parcours de cambrioleur.
Dès ses 11 ans, Alexandre s’engage comme mousse dans une compagnie maritime de Marseille. La vie à bord est délicate et après une avance trop pressante de son supérieur, il déserte. Arrivé à Sydney, il enchaine les petits boulots et se retrouve sur un navire qui s’avérera être un bateau pirate.
De retour chez lui, il découvre que sa mère a décidé d’accueillir Jules, un adolescent orphelin, très proche des milieux radicaux de gauche. Avec lui, il découvre les grandes figures extrémistes. Pourtant, Alexandre ne souhaite pas franchir le pas de la violence mais combattre les riches et les puissants en les ruinant. Sa vie est alors rythmée par les vols. Il regroupe des hommes et des femmes qui forment les Travailleurs de la nuit…
Alors que les éditions Sarbacane avaient publié Alexandre Jacob de Gaël et Vincent Henry en janvier 2016 (voir notre chronique), Rue de Sèvres leur emboitent le pas avec une autre version de la vie de ce cambrioleur d’un nouveau genre. S’appuyant sur les mêmes sources historiques et les mêmes ouvrages que leur prédécesseur (voir la bibliographie en fin d’album), les faits sont donc similaires. Le lecteur qui a découvert l’album des frères Henry n’apprend donc pas grand chose de plus sur le voleur. Le présent ouvrage apporte de la nouveauté et des informations sur l’enfance et les dernières années de sa vie.
L’existence très romanesque de ce Robin des Bois est parfaitement restituée par Matz. Ce qui frappe avant tout dans ce personnage c’est sa volonté farouche de ne jamais faire usage de la force dans son action, sauf en cas de légitime défense, mais aussi son rejet de toute forme d’autorité (police, gouvernement, justice) et des extrémismes.
Celui qui aurait servi de modèle à Arsène Lupin – le gentleman cambrioleur – même si Maurice Leblanc a toujours nié cette filiation, mérite que l’on s’y arrête. Ce personnage ayant existé a donc fait l’objet de nombreuses fictions.
Découvert par les publications de Les premiers, Les amis de Pancho Villa mais surtout Julio Popper (avec le même scénariste), Léonard Chemineau poursuit le début de sa carrière de dessinateur avec une grande intelligence, choisissant des projets forts. Comixtrip apprécie beaucoup le travail de ce jeune auteur pétri de talent. Comme pour ses précédents ouvrages, il réalise des planches très belles aux couleurs lumineuses et les visages de ses personnages sont de véritables trognes. A lire !
- Le travailleur de la nuit
- Scénariste : Matz
- Dessinateur : Léonard Chemineau
- Editeur : Rue de Sèvres
- Prix : 18€
- Parution : 19 avril 2017
Résumé de l’éditeur : Retrace l’histoire d’Alexandre Jacob, qui avec son gang de cambrioleurs a écumé la France et défrayé la chronique, laissant à ses victimes sa carte avec un mot humoristique et distribuant ses énormes butins aux nécessiteux. Il aurait inspiré à M. Leblanc le personnage d’Arsène Lupin.
À propos de l'auteur de cet article
Damien Canteau
Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une trentaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée) et co-responsable du prix Jeunesse de cette structure. Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip. Damien modère des rencontres avec des autrices et auteurs BD et donne des cours dans le Master BD et participe au projet Prism-BD.
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