Montana 1948

Avec l’adaptation du roman éponyme de Larry Watson, Montana 1948Nicolas Pitz signe une bande dessinée très réussie. Voyage au cœur d’une adolescence dans l’Amérique profonde de l’après-guerre.

DU ROMAN NOIR AU ROMAN GRAPHIQUE

C’est à travers le point de vue d’un gamin de douze ans aux grands yeux noirs que le romancier américain Larry Watson a choisi de raconter son histoire. Court roman de moins de 200 pages publié dans les années 1990 aux Etats-Unis, réédité tout récemment en France par les éditions Gallmeister, Montana 1948 est en passe de devenir un véritable roman culte. Aujourd’hui la bande dessinée s’en empare avec cette belle adaptation graphique signée du dessinateur Belge Nicolas Pitz aux éditions Sarbacane.

LE SHÉRIF ET LES INDIENS

L’intrigue proposée par Montana 1948 est relativement simple: deux frères, l’un shérif de sa petite ville , Mercer County, l’autre médecin. Le shérif Hayden est droit, honnête mais sans relief véritable; c’est le père du narrateur, le jeune David. Quant à l’oncle, Franck, dont viendra le mal, c’est un homme sûr de lui, auréolé de ses exploits réalisés pendant la Seconde Guerre mondiale. En cet été 1948 dans le Montana comme dans bon nombre d’Etats d’Amérique, la société reste très compartimentée; les blancs détiennent les manettes tandis que les Indiens, à de rares exceptions près, vivent encore relégués dans leurs réserves ou sont au service de la classe dominante. C’est le cas de Marie, une jeune femme Sioux, entrée au service des Hayden. Tout semble aller pour le mieux quand celle-ci tombe malade et doit voir un médecin…

L’HEURE DU JUGEMENT

Le problème, c’est Franck. Le médecin charmeur respecté de tous en ville est-il si respectable ? On découvre peu à peu que pèsent sur ce dernier de lourdes accusations. Attouchements, agressions sexuelles, viols ? Il ne fait bientôt plus de doute que le beau docteur considère plus les jeunes femmes indiennes comme objets de ses pulsions que comme de simples patientes…

Quand cette réalité fait brutalement irruption dans la famille Hayden, c’est évidemment un tremblement de terre. Le jeune David, aux premières loges du drame, même si on fait tout pour lui cacher la vérité, découvre avec ses yeux de jeune adolescent les contradictions et les incohérences des adultes. Ecartelé entre la soif de vérité et de justice et la loyauté qui le lie à sa famille, il ne pourra choisir et assistera impuissant à la fin tragique de ses illusions.

Oscillant sans cesse entre chronique sociale, polar et drame familial, cette histoire toute en tension donne aussi à voir sous le stylo de Larry Watson de beaux portraits psychologiques. Les crayons et les pinceaux de Nicolas Pitz lui donnent une autre force. Le dessinateur, malgré quelques petites maladresses de perspective, réussit à restituer avec ses couleurs chaudes la moiteur de cet été-là, fait respirer son lecteur avec quelques pleines pages sans texte où s’exprime son amour des paysages et des intérieurs de cette Amérique profonde de l’immédiat après-guerre.

Article posté le mercredi 19 avril 2017 par Jean-Michel Gouin

Montana 1948 de Nicolas Pitz d'après Larry Watson (Sarbacane) décrypté par Comixtrip le site BD de référence
  • Montana 1948
  • Auteur: Nicolas Pitz
  • Editeur : Sarbacane
  • Prix: 19, 50 €
  • Parution : 1er mars 2017

Résumé de l’éditeur. « De l’été de mes douze ans, je garde les images les plus saisissantes et les plus tenaces de toute mon enfance, que le temps passant n’a pu chasser ni même estomper.» Ainsi s’ouvre le récit du jeune David Hayden. Cet été 1948, une jeune femme sioux porte de lourdes accusations à l’encontre de l’oncle du garçon, charismatique héros de la Seconde Guerre mondiale et médecin respecté. Déchiré, le père de David, shérif de cette petite ville du Montana, doit alors affronter son frère aîné. David assistera, impuissant, au conflit entre les deux frères et découvrira la difficulté d’avoir à choisir entre la loyauté à sa famille et la justice.

Montana 1948 raconte la perte des illusions de l’enfance et la découverte du monde adulte.

 

 

À propos de l'auteur de cet article

Jean-Michel Gouin

Passionné par l'écrit, notamment l'histoire, la littérature policière et la bande dessinée, Jean-Michel Gouin est journaliste à Poitiers.

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