Echolands 01

Le jour où Hope Redhood vola une pierre magique au terrible sorcier Teros Demonds, elle ne se doutait pas qu’elle entamait une aventure aussi dangereuse qu’extraordinaire, au-delà des mondes et des univers. Dans Echolands, paru chez Panini comics,  Haden Blackman et J.H. Williams III nous guident à travers cette épopée hors du commun.

Echolands : oubliez tout ce que vous saviez.

Il y a fort longtemps, Hope Redhood était une enfant adorée de ses parents. À l’abri du chalet robuste que son père avait construit de ses propres mains, elle s’épanouissait, entourée d’amour et d’un chaperon écarlate.

Mais un jour, elle tomba dans le Rouge. Alors, elle dut s’enfuir pour tout oublier. Car le Rouge était dans sa chaire, dans son sang.

Mais tout ceci est une autre histoire… Celle qui nous intéresse commence par une course poursuite.

In medias res.

Elle met en scène une mystérieuse jeune fille encapuchonnée de rouge, tentant d’échapper à la police locale. Dans les rues bondées du quai des pêcheurs d’un San Francisco aussi hétéroclite que méconnaissable, elle court à en perdre haleine. Le fait est qu’elle connaît le sort réservé aux voleurs.

« Teros Demonds exige qu’on leur coupe la main et qu’on leur brûle un gros V sur le front. »

Tout ça, elle le savait lorsqu’elle a volé une gemme magique au terrible sorcier. Et pourtant, face au danger, elle arbore un sourire espiègle. Tout semble n’être qu’un jeu pour elle. Car elle le sait, quand bien même elle serait attrapée, elle a un avantage indéfectible : pour le meilleur et pour le pire, elle possède le Rouge.

Echolands : promenons-nous hors des sentiers battus.

À la seconde où on a en main l’épais volume de 272 pages, on est interpelé par son format hors du commun. Il faut dire qu’en matière de comics, le format à l’italienne n’est pas des plus répandus. Et immédiatement, 300 de Franck Miller, le modèle ultime, nous vient à l’esprit. Hé bien disons-le sans détour, le défi est relevé haut la main grâce à un virtuose : J.H. Williams III.

Une merveille.

En effet, il convient de souligner tout d’abord le génie de ce dessinateur. Rarement on a pu observer des traits aussi soignés, des cases s’imbriquant dans une telle harmonie. Dans un dynamisme effréné, l’artiste parvient à guider l’œil d’un lecteur-spectateur abasourdi. Jonglant avec les doubles pages avec maestria, J. H. Willimas III réalise une copie d’exception. Mais ce n’est pas tout, car pour couronner son ouvrage, il propose une gageure ultime. Elle consiste à multiplier les styles graphiques tout en les entremêlant avec une justesse rarement égalée. De cette manière, de page en page, les univers et les ambiances se succèdent avec un point commun : la perfection de la réalisation.

Une fluidité déconcertante.

Alors il est vrai qu’au premier abord, cet assemblage graphique donne le vertige, mais en réalité, on est surpris par sa fluidité et la logique de sa narration. Alors même que J.H. Williams III innove sans cesse, explorant le champ des possibles, il parvient à guider son lecteur au milieu de dessins aussi labyrinthiques que poétiques. Dans cette entreprise, il est par ailleurs parfaitement secondé par un Dave Stewart étincelant (Une étude en émeraude, Basketful of heads). Sa colorisation est d’une justesse exceptionnelle. C’est bien simple, le talent conjugué des deux artistes donne une impression telle qu’on jurerait que certaines compositions sortent des pages.

On l’aura compris, les qualités graphiques d’Echolands sont indéniables et forcent le respect. Pourtant, aussi belle fût-elle, une bande dessinée doit conter une histoire pour ne pas être qu’un simple recueil de dessins.

Là encore, Echolands s’en sort haut la main.

L’aventure, c’est l’aventure.

Portée par son titre, l’œuvre raconte la fuite de Hope Redhood à travers des mondes tous plus différents les uns que les autres. Accompagnée de compagnons fidèles, elle va tenter de survivre à la traque menée par la surpuissante fille du sorcier Teros Demonds. L‘intrigue est simple. Mais le scénario, fruit de la collaboration entre Haden Blackman et l’inévitable J.H. Williams, reprend les ingrédients de la partie graphique.

En effet, cette course effrénée permet de rencontrer tous les lieux imaginables. De la ville aux océans, en passant par de glauques égouts, Hope traversera nombre de paysages et rencontrera toute sorte d’individus. Et c’est précisément cette variété qui donnera le dynamisme attendu à l’intrigue. Mais là encore, ce n’est pas tout.

Quand le terme de 9ème art prend tout son sens.

En effet, le « métacomic book » qu’est Echoland se nourrit de l’univers global de la bande dessinée. Ainsi, il fait se côtoyer les personnages et les univers les plus divers tout en conservant leurs identités. Il est alors amusant de repérer les clins d’œil aux plus grands. Lire Echolands, c’est aussi découvrir la rencontre de Jack Kirby, Bernie Wrightson, Moebius, Jean Tardi et tant d’autres dans une œuvre totale.

 

Echolands est une œuvre d’exception, portée de main de maître par les artistes virtuoses que sont Haden Blackman et J.H. Williams III. Et logiquement adoubé par les plus grands, tels Neil Gaiman et Kurt Busiek, Echolands figure dans la sélection pour le Prix Comics de la Critique ACBD 2023.

Article posté le mardi 12 septembre 2023 par Victor Benelbaz

Echolands de Haden Blackman et J.H. Williams III (Panini comics)
  • Echolands 01
  • Scénaristes : Haden Blackman et J.H. Williams III
  • Dessinateur : J.H. Williams III
  • Coloriste : Dave Stewart
  • Traductrice : Laurent Laget
  • Editeur : Panini Comics
  • Prix : 39.95 €
  • Sortie : 21 juin 2023
  • ISBN: 9791039114899

Résumé de l’éditeur : Dans un futur étrange qui a oublié son Histoire, la technologie la plus performante côtoie la magie. Dans ce lieu où tout peut arriver, nous suivons la quête de la voleuse Hope Redhood qui détient la clé du sombre passé de ce monde. Mais pour mener à bien cette mission, Hope et son équipe vont devoir survivre aux assauts répétés d’un sorcier et de sa fille. Ce projet imaginé par des auteurs multi-primés pour Batwoman, date d’il y a plus de 15 ans. Mais les emplois du temps chargés du scénariste Haden Blackman (Star Wars, Elektra) et du dessinateur superstar J.H. Williams III (Promethea, Sandman : Overture) ont sans cesse repoussé les retrouvailles du duo. Mais voici enfin l’oeuvre, dans un format unique qui permet aux illustrations de se déployer sur chaque double-page. Le style inimitable, ultradétaillé et la narration aussi complexe que maîtrisée de Williams III est un régal pour les yeux.

À propos de l'auteur de cet article

Victor Benelbaz

Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.

En savoir