Bloom est une association luttant contre la pêche électrique. Sébastien Girard met en lumière ce combat dans Fraude qui peut, un album instructif et passionnant. Une belle bande dessinée-reportage dans les coulisses de l’Union européenne.
La pêche électrique, un scandale politique
Sébastien Girard , qui nous avait déjà beaucoup séduit avec sa bande dessinée Chronique d’un kidnapping sortie en 2021 aux éditions Féles, nous présente dans ce très bon nouveau récit Fraude qui peut, l’histoire de la lutte sans relâche d’une petite ONG face à de puissants lobby industriels afin de
faire interdire la pêche électrique, hérésie écologique et scandale politique.
Bloom, une ONG de combat(s)
Bloom est une ONG dont les combats majeurs sont la lutte contre la destruction du monde marin. En 2017, l’association faisait campagne contre le chalutage profond lorsqu’une jeune étudiante en master spécialisée « forêt , nature et société » et qui assista à la conférence de Claire Nouvian fondatrice et présidente de l’association Bloom fut immédiatement subjuguée et passionnée par la lutte de Bloom. Suite à cela, elle écrivit à l’association à qui elle demanda si elle pouvait faire son stage de fin d’étude avec eux.
Sachant pertinemment les méfaits de la pêche électrique pour le monde marin mais n’ayant pas le temps de s’en occuper, Bloom proposa à Laetitia Bisiaux de s’en charger.
Le lobby puissant de la pêche industrielle
Débute alors une bataille lourde et continue de Bloom face à l’attitude sans aucun scrupule des industriels de la pêche électrique essentiellement néerlandais dont le lobbyisme persistant et les mensonges. Ces détournements de lois sont à peine camouflés afin de continuer à mettre sur les océans de plus en plus de navires de pêches équipés de filets électriques alors que son utilisation est restreinte puis interdite par l’union européenne à partir de 2021.
Sur un sujet de prime abord complexe et qui peut sembler loin des intérêt du citoyen lambda, Sébastien Girard réussit à captiver par un scénario qui met en exergue l’impunité que s’octroie les grands groupes industriels ainsi que les lobbyistes et certains élus en imaginant clairement que rien ne peut les arrêter.
Fraude qui peut, pluie de détournement de lois
Ce sont alors toutes les lois contournées, les changement d’appellation pour tenter de faire passer ce qui a été rejeté, les stratagèmes pour faire croire à de la recherche afin de pouvoir continuer à obtenir des chalutiers, le je-m’en-foutisme des rapports du CIEM (Conseil international pour l’exploration des mers) que Bloom tente de dénoncer à une commission européenne qui elle même fait tout trainer. Tout cela en se disant que de toutes façons personne n’a de quoi démonter ou contester les rapports fournis.
Bref, il y a une phrase que prononce l’homme en costard cravate représentant les industriels de la pêche électrique qui réussit à synthétiser le tout en clamant haut et fort à ses collègue de ne surtout pas faire l’erreur de négliger la naïveté des gens!
Et du coup cela parle à tout le monde, pour tous les combats auxquels se confrontent quotidiennement des ONG et qui grâce à leur acharnement lourd parfois à payer en prix de santé physique et mentale réussissent à faire bouger les choses pour le bien de toutes et tous.
Fraude qui peut, un travail en bichromie
Pour ne pas se perdre dans les différents partis prix, Sébastien Girard propose Fraude qui peut en bichromie, le jaune-orangé et blanc pour les industriels et le bleu et blanc pour l’association Bloom. Ce qui offre un découpage et une compréhension claire. Une troisième couleur (rouge) apparait pour illustrer leur propos d’exemple concrets.
Sébastien Girard est titulaire d’un master 2 Écologie biodiversité et Évolution et voulait trouver un sujet qui concernait sa spécialité, à savoir l’écologie. En contactant Bloom et en décidant de consacrer l’album aux respects des lois bafoués, il réussit brillamment à faire mouche.
Avec un trait faisant penser à Riad Sattouf qui là aussi rend la lecture facile, Fraude qui peut est un super album didactique qui s’adresse autant aux jeunes qu’aux
adultes.
Une issue positive ?
Une lecture captivante et non sans humour qui nous fait largement espérer à une issue positive et nous conforte une fois de plus dans la nécessité de soutenir ces ONG et de ne pas négliger notre propension à être naïfs!!!
Fraude qui peut est édité chez Delachaux Niestlé qui elle-même à une démarche éco-responsable, bénéficiant du label Yliga, une initiative portée par plusieurs maisons d’édition qui souhaitent faire de ce label une marque de fabrique et de traçabilité édité de façons la plus respectueuse possible de l’environnement.
Et pour parfaire le tout, Sébastien Girard a choisi de reverser tous ses droits d’auteur à l’association Bloom. Respect!
- Fraude qui peut ! Bloom face aux industriels de la pêche électrique
- Auteur : Sébastien Girard
- Éditeur : Delachaux et Niestlé
- Prix : 14,90 €
- Parution : 07 octobre 2022
- ISBN : 9782603029473
Résumé de l’éditeur : Cette bande dessinée raconte le combat titanesque d’une petite ONG contre un puissant groupe d’industriels, au sujet d’une pratique pourtant interdite par la loi européenne : la pêche électrique. Il s’agit d’une méthode de pêche très destructrice mais très efficace et rentable. C’est pourquoi les industriels de la pêche électrique ont constitué une armée de lobbyistes qui n’ont eut de cesse d’obtenir des dérogations à cette loi, par une intense activité au sein de la commission européenne et sur le monde politique. Face à cela, l’association Bloom, fondée par Claire Nouvian et dédiée à la préservation des océans, n’a pu compter que sur sa volonté sans faille de protéger la vie marine et de faire respecter la loi. Cette bataille ardue est relatée avec beaucoup d’humour et de pédagogie, dans cette bande dessinée où l’on ne s’ennuie jamais et qui dévoile les méthodes pas toujours très légales que les industriels mettent en oeuvre pour protéger leurs intérêts, et la perméabilité des institutions politiques, nationales et européennes, face aux pressions des lobbies.
À propos de l'auteur de cet article
Sofia
Atterrie un peu par hasard dans l'univers de la bande dessinée, Sofia coanime l'émission X-Bulles tous les lundis de 19h à 20h sur Radio Pulsar depuis maintenant une dizaine d'années. D'abord embarquée pour présenter le monde du manga qu'elle affectionne particulièrement, Sofia se laisse séduire par les bandes dessinées de tous genres avec un point faible pour celles qui questionnent, remuent, émeuvent pour en parler avec passion au micro. Elle partage ses coups de cœur sur la page Facebook d'X-Bulles : https://www.facebook.com/xbulles
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