La belle de mai

Dans La belle de mai – Fabrique de révolutions qui parait le 21 août chez Futuropolis, Mathilde Ramadier au scénario et Elodie Durand au dessin reviennent sur une des premières grandes luttes sociales et féministes de l’Histoire : la grève de 1887 à la Manufacture des tabacs de Marseille.

La belle de mai, cité ouvrière

Décembre 1886.  A la Manufacture d’État des tabacs de Marseille, dans le quartier de la Belle de mai, les ouvrières, dont de nombreuses immigrées italiennes, travaillent dix heures par jour dans des conditions difficiles. Mauvais matériel, retenues sur salaires, exclusions, fouilles intimes et brimades des chefs d’ateliers…

« Faut faire quelque chose. Mais quoi ? »

Une grève fondatrice

Suite à un long travail de documentation débuté en résidence à la Maison des auteurs de la Friche de la Belle de Mai, Mathilde Ramadier (déjà lue entre autres chez Futuropolis avec Laurent Bonneau dans Et il foula la terre avec légèreté, mais aussi Corps public avec Camille Ulrich) raconte la grève des cigarières en 1887. Une grève fondatrice qui, malgré des obstacles le plus souvent masculins (des femmes et en plus des étrangères !) sera couronnée de succès et ouvrira la voie au syndicalisme dans les manufactures d’État en France.

Un trait charbonneux

C’est passionnant et c’est superbement mis en images par Elodie Durand (La parenthèse, Wonder, Transitions chez Delcourt, Un monde si grand chez Bayard Graphic). Son trait noir (parfois bleu), est brut, charbonneux comme les fumées qui sortent des cheminées des usines et il marque les esprits. Ses personnages féminins sont dignes, fortes et elles vont dépasser leur condition, portées par le souffle de leur révolte.

Oubliée des livres d’Histoire

Dans un quartier (dit le « quartier rouge »), qui a évité la destruction et est devenu depuis un projet artistique et culturel (la Friche), on sent avec cet album dédié « aux femmes de chambre de l’Ibis de Batignolles et à toutes les autres » qui œuvrent dans l’ombre, à quel point cette grève a été un moment fondateur des luttes sociales et féministes, malheureusement oubliée des livres d’histoire.

 

A noter : Les femmes de chambres de l’hôtel Ibis de Batignolles ont lutté pendant 22 mois (8 de grève et 14 d’activité partielle) avant d’obtenir un accord., un combat emblématique de celles qu’on a nommé « les invisibles ».

La belle de mai - Fabrique de révolutions de Mathilde Ramadier et Elodie Durand ( éditions Futuropolis)

Article posté le mercredi 21 août 2024 par Jean-François Mariet

La belle de mai - Fabrique de révolutions de Mathilde Ramadier et Elodie Durand ( éditions Futuropolis)
  • La belle de mai – Fabrique de révolutions
  • Scénariste : Mathilde Ramadier
  • Dessinatrice : Elodie Durand
  • Editeur : Futuropolis
  • Prix : 22 €
  • Parution : 21 août 2024
  • Pagination : 144 pages
  • ISBN : 9782754834391

Résumé de l’éditeur : Marseille, Hiver 1887. Plus d’un millier de femmes sont employées à la manufacture des tabacs de la rue Bleue (aujourd’hui la Friche Belle de Mai), qui produit cigares, scaferlatis et cigarettes. Malgré une récente modernisation, les conditions de vie et de travail sont rudes pour ces immigrées italiennes. Sespo, Teresa et Rosa, trois jeunes cigarettières, décident de s’organiser, sans syndicat ni expérience, pour faire spontanément une grève sur le tas après que l’une d’elles a été sévèrement sanctionnée par la direction, suspectée injustement d’avoir volé du tabac. Leur première revendication : qu’on cesse les fouilles au corps à la sortie des ateliers. Petit à petit, il leur faut gagner l’opinion publique et la presse, trouver des locaux, tenir tête aux chefs d’atelier qui cherchent à les intimider, convaincre la direction puis le préfet, voir plus grand dans leurs revendications, vivre la solidarité… Et s’émanciper de leur condition. Tout va aller beaucoup plus vite et plus loin qu’elles l’imaginaient. À travers le destin de ces trois ouvrières d’origine italienne, Mathilde Ramadier et Élodie Durand racontent le quotidien difficile de ces femmes venues en France pour trouver du travail. Un combat féministe, syndicaliste et non-violent qui se termine avec une victoire retentissante. Une belle histoire de solidarité et d’émancipation !

À propos de l'auteur de cet article

Jean-François Mariet

De mes premières lectures avec Tif et Tondu à aujourd'hui, j'ai toujours lu de la bande dessinée. Très attiré par le noir et le polar, je lisde tout et je tente d'élargir mes horizons de lecteur avec de plus en plus de comics.

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