L’institut des Benjamines

Boris, le dictateur du pays du Marylène, fait régner la terreur sur son royaume. Mais Simone Michel est toujours là, en opposante. Elle décide de kidnapper des jeunes filles pour les en faire des alliées dans L’institut des Benjamines. Tout n’est pas rose dans cette école féministe. Anne Simon poursuit le développement de son merveilleux univers dans un cinquième volume toujours aussi enchanteur et intelligent.

Dans l’école, élite de la nation

Boris l’enfant patate est au pouvoir. Ce tout petit dictateur d’opérette n’en a plus pour très longtemps. La résistance se développe. Au premier rang des opposant.es, il y a Simone Michel, l’ancienne secrétaire d’Aglaé, la souveraine tombée par l’armée d’amazones de Boris.

Pour former les futures résistantes, Simone a créé l’institut des Benjamines. Dans cet école élite de la nation, la haine du tyran est portée au pinacle et les élèves en mangent du matin au soir.

Dans l’institut des benjamines, une Éducation stricte

Simone Michel, appelé le directeur, fait elle aussi régner l’ordre dans l’institut des Benjamines. Pour ce qu’elle pense être plus d’efficacité, les jeunes élèves doivent obéir sans réfléchir.

Avec Rita, sa fidèle assistante, le directeur arpente le pays du Marylène pour enlever de jeunes filles et les « dresser » pour en faire des soldates opposantes à Boris.

Pas de visites extérieurs, seuls les cours sont importants. L’école est fermée, recluse sur elle-même.

« Vos parents, mes pauvres enfants, oubliez-les, méprisez-les. Ils sont saouls du matin au soir. Ce sont des épaves. Vous ne pouvez pas leur manquer car ils sont morts. »

Simone Michel plonge vers une autoritarisme fort, celui qu’elle reproche à Boris. Se ressembleraient-ils dans leur pouvoir autocratique ?

Géniale pentalogie

Je suis toujours autant enchanté lorsque je découvre un nouvel album d’Anne Simon et encore plus lorsque c’est un nouvel opus des Contes du Marylène. L’institut des Benjamines forme une superbe pentalogie. Après La geste d’Aglaé, Cixtite Impératrice, Boris l’enfant patate et Gousse & Gigot, elle met en avant Simone Michel.

Tout s’imbrique avec intelligence et finesse entre les différents tomes de cet univers. L’un répond à l’autre. L’un enrichit l’autre. Et il faut un sacré cerveau et beaucoup d’organisation pour que les cinq volumes s’entremêlent. Et Anne Simon a tout cela : un plan d’écriture précis, une imagination et un réel talent de narratrice. Parce que oui, l’autrice d’Histoire dessinée de la France tome 9 avec Pascal Brioist est une formidable conteuse. Elle cisèle avec précision ses albums. Les contes du Marylène est une vraie fable fantastique pour adolescents et adultes.

L’institut des Benjamines : de l’opposition à la dérive autoritaire

Pour chacun de cinq tomes des Contes du Marylène, Anne Simon met en lumière le rôle d’un personnage. Mais ses protagonistes ne sont jamais manichéens, ils ont tous des doutes, des parts d’ombre et de l’humanité. Ils sont en cela avenant. Et les lecteurs ont forcément envie de les découvrir.

C’est encore le cas pour Simone Michel. De l’opposante misandre farouche à Boris, l’ex-secrétaire d’Aglaé se mue en une « directeur » autoritaire. Pas une tête ne doit dépasser. Elle forme des petites filles pour un seul but : renverser Boris. Le même moule pour plus d’efficience. Et peu importe si ses Benjamines sont tristes, elles ne sont qu’un instrument de la résistance. Pire, certaines deviennent des « ventres » pour enfanter de futures soldates et perpétuer la grande lignée des Benjamines.

Pourtant tout partait bien pour cette féministe, Simone Michel (la fusion de Simone Veil et Louise Michel, je suppose, deux grandes féministes dont l’une fut déportée et plus tard ministre soutenant la loi sur l’IVG et l’autre une institutrice révolutionnaire pendant la Commune). Elle était au service d’Aglaé, souveraine ayant fait bouger les lignes et fait prospérer son royaume. Tout cela est balayé par l’ivresse du pouvoir. Plus on en a, plus on en veut.

L’album est inspiré de nombreuses références littéraire notamment L’institut Benjamenta, le roman de Robert Walser ou encore les prénoms des trois demi-sœurs de Boris : Anne, Charlotte et Emily, du nom des sœurs Bronte.

Et dire qu’il reste encore des volumes à découvrir dans les mondes du Marylène. J’ai hâte comme bon nombre d’amateurs d’histoires d’Anne Simon !

Article posté le dimanche 15 mai 2022 par Damien Canteau

L'institut des Benjamines, les contes du Marylène d'Anne Simon (Misma)
  • Les contes du Marylène : L’institut des Benjamines
  • Autrice : Anne Simon
  • Éditeur : Misma
  • Prix : 16 €
  • Parution : 06 mai 2022
  • ISBN : 9782916254913

Résumé de l’éditeur : Boris est au pouvoir et Simone, qui le déteste, fulmine. Toujours aussi habitée, l’ancien bras droit et ex-secrétaire d’Aglaé est bien décidée à contrer ce fils despotique et misogyne qui s’est imposé à la tête du pays en le faisant sombrer dans l’alcool et la misère. Pour cela, elle va créer le grand projet de sa vie : L’INSTITUT DES BENJAMINES. Avec Rita, sa fidèle assistante, elles kidnappent les petites filles croisées sur leur chemin et les séquestrent dans un pensionnat caché au fin fond d’une forêt. Simone (qui se fait appeler « Le Directeur ») impose à ses disciples une éducation stricte sans aucun libre arbitre. Devenues adultes, les Benjamines formeront une armée rebelle et redoutable qui réalisera le fantasme de leur maîtresse à penser : renverser le dictateur. Mais une fois encore, l’avenir du pays Marylène est incertain. Qui, désormais, s’emparera de la couronne ? Cinquième volume de la série «Les Contes du Marylène», L’INSTITUT DES BENJAMINES est la suite directe de BORIS L’ENFANT PATATE. Le titre est inspiré du roman de Robert Walser L’Institut Benjamenta, où l’on suit Jacob von Gunter qui a quitté sa famille aisée pour entrer dans un pensionnat où l’on apprend qu’une chose : obéir sans discuter. Dans ce nouveau livre, Anne Simon met le personnage misandre Simone Michel au premier plan et raconte comment l’exercice du pouvoir peut pousser une femme révoltée à l’excès et à la déraison.

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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