Paris 2119

Le monde de demain. C’est ce que nous proposent Zep et Dominique Bertail avec Paris 2119. En faisant un bond d’un siècle, ils imaginent la capitale désertée de la population. Non pas qu’elle soit exterminée, mais les progrès technologiques sont tels que les habitants n’ont plus besoin de se déplacer. Exit les voitures, la pollution semble éradiquée pour laisser place à la téléportation. Grâce au Transcore qui permet d’aller n’importe où dans le monde en quelques secondes, nul besoin d’un quelconque autre moyen de transport. Pourtant, quelques uns subsistent comme le métro. Gardé en l’état pour satisfaire les nostalgiques du XXIe siècle dont Tristan fait partie. Ce rebelle de cette vie soumise à ces « voyages en cabine », va peu à peu se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond.

Un petit drone enregistre par reconnaissance faciale l’identité de Tristan Keys avant qu’il ne lui autorise à entrer dans le métro. Dès la première planche, l’attitude réfractaire du personnage principal est sans équivoque. Tristan vit dans un siècle qui ne lui correspond pas. Alors, même s’il ne peut éviter d’y croiser des personnes au comportement étrange, des tatous en guise d’animal de compagnie, ou de rares touristes hyper-connectés, il se réfugie dans la voie ferrée souterraine. Un endroit qui le réconforte.

PARIS 2119, UN MONDE À DEUX VISAGES

Le Transcore, cabine révolutionnaire qui permet à tout un chacun de se téléporter n’importe où dans le monde, Tristan la réfute, l’ignore voire l’injurie. Sur le chemin qui le mène à Kloé, sa compagne, la pluie tombe inexorablement en raison d’une purification de l’atmosphère…

Cette ambiance anxiogène et sombre vient trouver répit lorsqu’il retrouve Kloé à son appartement. La belle femme dégage beaucoup d’assurance et s’obstine à convaincre Tristan d’utiliser le Transcore. Elle-même adepte de la cabine à téléportation, Tristan n’en reste pas moins méfiant. À l’heure où la procréation laisse place à un visa de reproduction, le jeune homme n’est pas prêt. Au moment où les œufs à la coque se préparent grâce à un programme dédié, il est sceptique.

Ce refus d’accepter et d’accéder à ce nouveau monde permettra à Tristan de découvrir l’envers du décor. Une lucidité qui le conduira à sa propre enquête. Laquelle pourrait dévoiler une issue bien moins alléchante qu’on pouvait imaginer de cette année 2119…

LE PARI(S) DU FUTUR ?

Pour ce Paris 2119, Zep joue les visionnaires ! Oui, c’est bien évidemment invérifiable pour nous tous mais quand on creuse quelques situations dans cette bande dessinée d’anticipation, on peut au moins attester que certaines de ses idées futuristes sont tout à fait plausibles ! De la téléportation, fantasme insensé, à ce Paris complètement groggy par l’ère numérique. Ce qui pourrait paraître inimaginable aujourd’hui renvoie aux probables suspicions d’il y a un siècle. Aurions-nous cru à toutes ces spectaculaires inventions ? Pour cette histoire complète, Zep ne pointe pas forcément du doigt ces avancées technologiques. Il estime simplement que l’humanité peut et doit en garder le contrôle. Apprécier ce que la modernité nous offre, sans en être dépendant. Peut-être est-ce là que la nostalgie est salvatrice ?

Quant à la partie graphique de Dominique Bertail, elle est bluffante d’efficacité. Non sans rappeler l’univers de Bilal, le dessinateur est déroutant dans son approche de la capitale du XXIIe siècle. Car nous ne sommes pas dans un cadre méconnaissable de la Ville-Lumière. Les monuments célèbres sont là, certains sont accaparés, mais leurs édifices n’ont pas vieilli. Les avenues, les rues, les bâtiments se voient ajouter quelques éléments futuristes. Les drones et milices sont présents en nombre. Mais tout ceci est parsemé avec modération. Ainsi, Paris 2119 devient autant crédible en images que dans son contenu scénaristique.

SI ON S’DONNAIT RENDEZ-VOUS…

Voilà une histoire d’anticipation bien inspirée ! Qu’elle soit issue d’une imagination débordante ou qu’elle découle de ce que nous vivons concrètement aujourd’hui, Zep et Bertail donnent à Paris 2119 cette sensation que certaines situations pourraient s’avérer proches de la réalité. Reste à savoir si elles seront profitables aux résidents de ce monde. Rendez-vous dans cinquante ans pour en voir les prémices !…

Article posté le mercredi 16 janvier 2019 par Mikey Martin

Paris 2119 de Zep et Bertail (Rue de Sèvres) décrypté par Comixtrip, le site BD de référence
  • Paris 2119
  • Scénariste : Zep
  • Dessinateur : Dominique Bertail
  • Éditeur : Rue de Sèvres
  • Prix : 17,00 €
  • Parution : 23 janvier 2019
  • ISBN : 978-2369815839

Résumé de l’éditeur : Paris, nous sommes en 2119, l’ambiance est futuriste mais quelques éléments du XXIème siècle perdurent. Le métro existe encore mais la plupart des personnes préfèrent se téléporter via la cabine « Transcore «. Tout un chacun est systématiquement scanné et reconnu dans les espaces publics et privés. Les clones, les drones et les hologrammes sont monnaie courante. Tristan Keys vit dans ce monde dont il rejette le plus possible la numérisation. Tel un marginal, il continue à prendre le métro, à marcher dans les rues, à l’inverse, sa compagne Kloé est une adepte des déplacements inter-continents via le Transcore. Au cours de ses déplacements à pieds, il constate assez vite des comportements préoccupants, des situations anormales. Que se passe-t-il vraiment dans ce Transcore ? Est-ce une simple téléportation pour ses utilisateurs ?

À propos de l'auteur de cet article

Mikey Martin

Mikey, dont les géniteurs ont tout de suite compris qu'il était sensé (!) a toujours été bercé par la bande dessinée. Passionné par le talent de ces scénaristes, dessinateur.ice.s ou coloristes, il n'a qu'une envie, vous parler de leurs créations. Et quand il a la chance de les rencontrer, il vous dit tout !

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