Shadowman

Le Shadowman est de retour. Sous la plume d’Andy Diggle, Jack Boniface revient dans une intégrale haletante dont Bliss Comics a le secret.

Shadowman : UN ANTI-HÉROS TORTURÉ

Jack Boniface n’a pas eu une vie facile ; il a commis bon nombre d’erreurs et a du sang sur les mains. Les épreuves qu’il a affrontées, les choix qu’il a faits, ont fait de lui un homme seul. Même Alyssa Myles, son ancienne compagne, le déteste.

Tel est le fardeau d’un héros tourmenté : en se liant avec le loa de l’ombre, il est devenu le Shadowman.

Mais en renouant avec ceux qui croient encore en lui, il va tenter de trouver son salut ; si tant est qu’il le mérite encore.

L’approche est originale et même périlleuse car il est évident que Jack Boniface incarne l’archétype de l’anti-héros.

UN PARI RISQUÉ

Cette intégrale présente la suite des aventures du Shadowman que les lecteurs connaissent déjà, puisque ses origines ont été scénarisées par Peter Milligan (Britannia). Pourtant, nul besoin de les avoir lues puisqu’Andy Diggle soutient la gageure de présenter un arc narratif qui se tient et s’apprécie par lui-même.

Mais à jouer avec un héros qu’on déteste, on risque de ne pas trouver l’adhésion du lecteur.

On découvre alors qu’Andy Diggle, le talentueux scénariste de The Losers, a plus d’un tour dans son sac.

En effet, celui qui a aussi œuvré sur la série Hellblazer connaît les anti-héros et sait les rendre dignes d’intérêt.

D’ailleurs, les premiers éléments qui attirent notre attention sont les points communs qui existent entre Jack Boniface, le Shadowman, et John Constantine : l’antipathie, les mauvais choix, la détestation de tous et surtout l’ésotérisme.

UN UNIVERS ORIGINAL

C’est précisément sur ce dernier point que la série Shadowman trouve sa véritable originalité : en plaçant l’action à la Nouvelle-Orléans, le paranormal est omniprésent.

De fait, le vaudou sert de ciment à l’intrigue puisque tous les personnages y sont liés : mambos (les prêtresses vaudous), loas (les esprits vaudous), et monde des morts régissent les actions des personnages.

De la même manière, les nombreux ennemis rencontrés sont versés dans le célèbre culte : la sanguinaire Sandria Darque, la terrible confrérie et même le très attendu Baron Samedi se présenteront face au Shadowman.

Les défis sont de taille et pour les relever, Jack Boniface, le sixième Shadowman, va devoir découvrir qui il est vraiment.

Ainsi, il va plonger dans les origines de son loa, jusqu’en Afrique, sur la terre de ses prédécesseurs.

UNE AMBIANCE GRAPHIQUE

Mêler ésotérisme et action implique la création d’un univers visuellement aussi impressionnant que terrifiant.

Pour mener à bien cette tâche, Andy Diggle est secondé par des dessinateurs de grand talent.

Comme bien souvent dans l’univers Valiant, les points forts de chaque artiste sont exploités avec justesse pour créer des ambiances propres qui servent la narration.

Ainsi, Stephen Segovia (War Mother), très à l’aide pour dessiner les scènes d’action et les combats avec des monstres infernaux, illustre la partie actuelle de l’histoire. Les planches somptueusement réalisées trouvent un dynamisme remarquable dans l’usage très maîtrisé des jeux de plongés et contre-plongées.

Shawn Martinbrough est en charge du dessin de l’immersion dans l’Amérique des années 20 du Shadowman. Dans un style anguleux influencé par le cel shading, il parvient créer une ambiance sombre aux airs de polars. Son travail rappelle bien évidemment celui qu’il avait réalisé pour Marvel en illustrant la mini-série Luke Cage Noir.

Doug Braithwaite (notre interview) et son trait si caractéristique prend la suite dans une histoire courte mais particulièrement marquante qui a lieu pendant la guerre de Sécession. Le talentueux dessinateur montre alors son incroyable capacité à rendre les expressions torturées des personnages. Son trait est sublimé par la colorisation absolument formidable de José Villarubia.

Vient enfin la dernière partie de l’histoire : celle où le Shadowman remonte à ses origines tribales. D’un point de vue scénaristique, c’est le moment fort de l’histoire. Il fallait donc trouver un dessinateur de talent pour en assurer la partie graphique : il s’agit de Renato Guedes. L’artiste brésilien fait éclater tout son talent. Son style photoréaliste parvient à capter l’essence même de l’histoire et de l’âme d’un Shadowman plus charismatique que jamais. Il s’agit sans aucun doute là de la partie la plus marquante de l’œuvre tant on observe l’osmose entre la tension dramatique du scénario et des dessins d’une qualité rare.

Comme à leur habitude, les éditions Bliss Comics complètent cet imposant volume d’une galerie de couvertures en couleurs absolument somptueuses. L’occasion d’admirer des dessins de grands noms du comic book.

Ce second tome des aventures du Shadowman permet de découvrir les origines du loa, l’esprit vaudou qui a pris possession de Jack Boniface.

Ecrit par Andy Diggle et dessiné par des artistes talentueux, il respecte parfaitement l’esprit de l’univers Valiant qui veut que toute histoire peut s’apprécier par elle-même, tout en étant reliée à un univers qui s’étoffe d’aventure en aventure.

Article posté le mardi 24 décembre 2019 par Victor Benelbaz

Shadowman de Andy Diggle, Segovia, Braithwaite, Martinbrough et Guedes (Bliss / Valiant)
  • Shadowman
  •  Scénariste : Andy Diggle
  •  Dessinateurs : Stephen Segovia, Doug Braithwaite, Renato Guedes et Shawn Martinbrough
  •  Prix : 20 €
  •  Parution : 20 septembre 2019
  •  ISBN : 9782375781746

Résumé de l’éditeur : Orphelin, élevé aux marges de la société, Jack Boniface n’a jamais su quelle était sa place dans le monde. Jusqu’à ce qu’il la découvre, dans un lieu sombre, bien plus vieux que l’humanité elle-même… Sans le savoir, Jack était destiné à devenir le prochain d’une longue lignée de Shadowmen – des mortels liés à des loas, ces esprits vaudou aux pouvoirs immenses – dont le rôle est de protéger le monde contre les incursions venant d’autres dimensions. Pendant des années, Jack s’est battu pour contrôler les pulsions meurtrières de son loa… Un combat qu’il a finalement perdu. Mais aujourd’hui, celui qu’on appelait Shadowman rentre à la Nouvelle-Orléans, après le long exil qu’il s’était imposé. Et il est prêt à en découdre avec les démons qui habitent notre monde, et ceux au-delà… Shadowman est plus tourmenté et plus terrifiant que jamais, dans ce récit complet écrit par Andy Diggle, l’auteur culte de Green Arrow : Year One et The Losers, et illustré par Stephen Segovia (War Mother), Renato Guedes (Bloodhsot Salvation) et Doug Braithwaite (X-O Manowar) Contient la série complète Shadowman (2019) #1-11.

À propos de l'auteur de cet article

Victor Benelbaz

Tombé dans la marmite de la bande dessinée depuis tout petit, Victor est un vrai amateur éclairé. Comics ou récits jeunesse sont les deux genres préférés de ce professeur de français.

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