Chercheur en intelligence artificielle et pilier du magazine Fluide glacial, Daniel Goossens nous fait partager son humour toujours aussi décalé dans son dernier album, Combats.
DES HISTOIRES COURTES QUI EN DISENT LONG
On ne sort jamais indemne de la lecture d’un album de Daniel Goossens. Ce drôle d’oiseau longiligne qui vient d’aborder la soixantaine pratique la dérision et l’humour absurde avec un art consommé depuis quarante ans. Avec une vingtaine d’albums à son actif ( Citons entre autres L’encyclopédie des bébés, La vie d’Einstein, Route vers l’enfer, Passions...) ce pilier du magazine Fluide Glacial est aujourd’hui considéré par ses pairs et par la critique comme un des maîtres du 9 e Art.
C’est sans doute vrai, tant cet homme discret, Grand Prix de la Ville d’Angoulême en 1997, qui a mené en parallèle une carrière d’enseignant-chercheur en intelligence artificielle, sait nous mener sur les chemins du nonsense et du contrepied. Dans son dernier album, « Combats », publié chez Fluide Glacial, il récidive avec seize histoires courtes à la mécanique redoutable.
COMMENT ON DEVIENT MAÎTRE DU MONDE
Les lecteurs habituels de Goossens ne seront pas déçus. Ils retrouveront dans ce nouvel opus les personnages à gros nez et les tronches caractéristiques de quelques antihéros récurrents comme Georges et Louis, sortes de Bouvard et Pécuchet de la BD égarés dans un monde qu’ils voudraient à leur image… C’est le cas dans cette histoire ( p.9 à 11) intitulée Le maître du monde et qui voit Georges désireux de créer la vie, percer son secret, « égaler le créateur! ». C’est l’un des combats de ces personnages tous plus décalés les uns que les autres.
La marque Goossens, c’est aussi ce recours permanent aux grandes références culturelles, d’où qu’elles viennent (cinéma, littérature, sciences, religion) Ainsi avec Jésus Revient l’histoire qui ouvre l’album, on rencontre le messie à la terrasse d’un café qui confie à une vieille dame : » Cette fois-ci je ne laisse plus rien au hasard, j’ai potassé des livres et j’ai gambergé… J’ai été engagé comme consultant à la logistique d’une marque de grande distribution. Nous allons former une grande secte œcuménique internationale à l’export « .
Et c’est reparti pour un tour. Goossens manie sans cesse avec malice le contrepied, le détournement, triture et démolit joyeusement les faits, les théories, les clichés, les symboles et les idoles…
ENTRE DESPROGES, GOTLIB ET LES MONTY PYTHON
Cramponnez-vous. L’humour de Goossens, dont l’acteur Benoît Poelevoorde dit de lui qu’il est » l’homme le plus drôle du monde « n’est pas immédiatement perceptible. Second ou troisième degré, voire plus, diront certains. A peine se croit-on dans un univers familier, un bureau, une chambre, un bar que tout peut basculer d’une case à l’autre. Surgissent alors l’inattendu, le paradoxal, l’absurde des situations.
On compare souvent l’humour de Daniel Goossens à celui d’un Desproges ou des Monty Python qu’il dit apprécier. Il y a aussi du Gotlib chez cet homme, encore plus surréaliste peut-être. Avec des références pareilles, comment voulez-vous vous ennuyer? Vous l’aurez compris, ces « Combats » là valent évidemment d’être livrés!
- Le Grand Prix de la ville d’Angoulême 1997, Daniel Goossens, a répondu aux questions de Comixtrip dans un entretien exclusif à lire ici.

- Combats
- Auteur : Daniel Goossens
- Editeur : Fluide Glacial
- Prix : 14 euros
- Parution : août 2015
À propos de l'auteur de cet article

Jean-Michel Gouin
Passionné par l'écrit, notamment l'histoire, la littérature policière et la bande dessinée, Jean-Michel Gouin est journaliste à Poitiers.
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