Human Target

Christopher Chance est Human Target. Une cible humaine pour remplacer les personnes ciblées par des tueurs. En prenant leur place, il sauve leur vie. Mais une mission de remplacement de Lex Luthor contrarie ses plans. Tom King, Greg Smallwood, Kevin Maguire, Rafael Albuquerque et Mikel Janin dévoilent ses aventures dans un premier tome très réussi, édité par Urban Comics.

Tom King ressuscite Christopher Chance

Personnellement, je ne connaissais pas le personnage Johnny Double dont s’empare Tom King aujourd’hui. Il fut créé en 1968 par l’auteur Len Wein pour les récits bouche-trous (backups) de DC Comics. C’est en 1972 qu’il est rebaptisé Christopher Chance. Il fait alors des apparitions un peu erratiques dans les pages d’Action Comics, de The Brave and The Bold ou de Détective Comics.

Christopher Chance est Human Target

Christopher Chance, la cinquantaine élégante et grisonnante sur les tempes, a l’incroyable talent. Il le  perfectionne sans cesse. Il peut prendre l’apparence physique d’autrui.

Maître de l’usurpation d’identité, il va jusqu’à adopter les attitudes comportementales de ses clients. Empruntant leur voix, copiant même avec brio les moindres détails qui les définissent. Il est en mesure de prendre leur place en certaines circonstances. Plus particulièrement lorsque ceux-ci se sentent menacés d’agressions ou craignent que l’on attente à leur vie.

En ce sens il est à l’opposé de la figure du tueur à gages. Christopher Chance se fait donc payer très cher pour devenir ses clients. Il court ainsi tous les risques à leur place lorsque les menaces d’attentats se confirment. Il prend les coups, il prend les balles et toujours se relève.

Human Target devient Lex Luthor

Dans le récit de Tom King et Greg Smalwood, Christopher Chance honore un contrat pour lequel il endosse l’apparence et la personnalité du mégalomane Lex Luthor, l’ennemi juré de Superman.

Il devient ainsi son client lors de l’assemblée générale de LexCorp . Pendant cet évenement un fou armé s’en est pris à lui. Christopher a pris la balle à sa place. Ce point de détail était prévu dans le contrat et donc anticipé par notre play-boy champion du travestissement. Mais ce qui n’était pas prévu c’est le poison mortel qui fût versé dans le café de Lex Luthor, que l’on proposa à Christopher et qu’il ingurgita juste avant de monter sur scène.

Douze jours à vivre

Le Doc de la Ligue de Justice, Dr Midnight, est formel, le poison est impossible à neutraliser. Il porte une infime trace de radiation, une signature infalsifiable que seules des créatures revenues vivantes de la dimension Ringbrak portent en eux.

C’est irréfutable, celui ou celle qui aurait préparé ou juste manipulé ce poison appartient à la célèbre Ligue de Justice Internationale, dont le membre le plus célèbre n’est autre que Batman. C’est là un point de détail sans vraiment d’importance puisque ce dernier ne sera évoqué pas plus de deux fois dans ce récit. Il ne jouera aucun rôle, pas même en coulisse.

Christopher Chance est prévenu, il ne lui reste que douze jours à vivre. Douze jours qu’il va consacrer à mener son enquête, à démasquer le coupable et ainsi savoir qui l’a condamné en lieu et place de Lex Luthor.

Un homme ordinaire sans super-pouvoirs

Et ces douze jours, c’est ce que ce que le lecteur vit dans ce récit aux côtés de Christopher dont la santé va aller en déclinant. Nous partageons sa vie, ses pensées tout du long de son enquête. Nous suivons les investigations d’un homme presque ordinaire, intelligent, flegmatique, séducteur aussi.

Christopher est un homme sans aucun super pourvoir, calme et résigné face à l’issue fatale qui l’attend. Il joue admirablement sa partie entre les personnalités complexes, et très tourmentés pour certaines, des membres de la Ligue de Justice Internationale.

Ice, Blue Beetle et Fire : tous suspects ?

C’est la très belle Ice qu’il approche pour commencer son enquête. Il pousse le flirte jour après jours jusqu’à la concrétisation d’une très belle romance sincère et réciproque. Il ne tarde pas à provoquer la jalousie maladive de son ex, Guy Gardner, un Green Lantern détenteur d’un anneau magique qui lui confère des pouvoirs quasi divins.

Durant ses deux petites semaines de sursis, Christopher et Ice assistent à l’inauguration du Booster Bagels. Le premier restaurant de la toute nouvelle franchise créée par Booster Gold, le super-héros voyageur temporel et limite boute-en-train.

Il sillonne également les États-Unis en tous sens et en 24 heures à bord du Carabe, le vaisseau de Ted le chic type, au sens moral irréprochable. Ted alias Blue Beetle qui aurait pu avec sa fortune financer la fabrication du poison. Il fait également la connaissance de Fire , la meilleure amie d’Ice qui elle aussi aurait pu avoir de très bonnes raisons de vouloir supprimer Lex Luthor.

Tom King transcende son enquête

Bref tout du long de son enquête, Christopher est amené à rencontrer une bonne partie des membres de la ligue de Justice Internationale. Des rencontres cordiales souvent, musclées parfois, au travers lesquelles il en suspecte certain et en disculpe d’autres. Je ne vous dévoilerais pas quelle sera l’issue de cette enquête vraiment passionnante, scénarisée au scalpel et à la dimension psychologique et psychanalytique remarquable. L’affaire n’est pas simple pour Christopher Chance, et Tom King parvient à transcender cette énigme au-delà de sa simple résolution qui nous révèle peut-être le nom du coupable.

La mort certaine de Christopher au bout de 12 jours l’autorise à repenser aux raisons profondes qui l’ont conduit à faire cette remarquable carrière de Cible Humaine. Un job vraiment pas à la portée de tous s’il en est. Des raisons qui le replongent dans le souvenir d’une ruelle sombre où gamin il vit son père vivant pour la dernière fois.

Le découpage du récit propose certes quelques scènes d’action. Mais l’essentiel se situe ailleurs avec la multiplication des passages plus contemplatifs où s’invite parfois une certaine tendresse. Ces moments révèlent l’énorme talent de Tom King à dresser des profils psychologiques d’une grande densité pour ses personnages.

Un superbe design 50’s pour Human Target

Graphiquement le travail de Greg Smalwood est juste splendide. On peut y déceler une sorte de filiation graphique avec le dessin du Canadien Darwin Cooke sur la série Parker.

Un design 50’s qui par bien des aspects rappelle immanquablement les génériques les plus réussis des films de James Bond. Des génériques avec la multiplication d’effets de jeux de lumières qui semblent artificiels parfois et qui font varier les teintes sur une même image selon des formes géométriques simples.

De bout en bout Human Target est inondé de lumière, y compris dans les scènes nocturnes ou en intérieur. Greg Smalwood s’arrange toujours pour placer une source lumineuse. En cela, jamais il ne nous laisse dans une obscurité, une noirceur source de tension et d’angoisse pour certain. Tant est si bien que dégage de ce récit une sensation de quiétude, de sérénité et de bien-être presque permanent.

Article posté le jeudi 15 février 2024 par David Lemoine

Human Target 1 de Tom King, Greg Smallwood, Kevin Maguire, Rafael Albuquerque et Mikel Janin (éditions Urban Comics)
  • Human Target, tome 1
  • Scénariste : Tom King
  • Dessinateurs : Greg Smallwood, Kevin Maguire, Rafael Albuquerque et Mikel Janin
  • Traducteur : Maxime Le Dain
  • Éditeur : Urban Comics
  • Collection : DC Black Label
  • Prix : 35 €
  • Pagination : 424 pages
  • Parution : 27 octobre 2023
  • ISBN : 9791026827443

Résumé de l’éditeurLa réputation de Christopher Chance n’est plus à faire. Il a gagné sa vie en devenant une cible vivante professionnelle, un homme engagé pour endosser l’apparence et la psychologie de ses clients afin d’inviter les assassins potentiels à tenter de le tuer. Un parcours remarquable… jusqu’à sa dernière mission en date, la protection de Lex Luthor, au cours de laquelle les choses ont dérapé. Une tentative d’assassinat que Chance n’a pas vu venir le rend vulnérable et l’oblige à essayer de résoudre son propre meurtre. Il a 12 jours pour découvrir qui, dans l’univers DC, haïssait Luthor au point de vouloir le tuer via un poison à action lente. Et les principaux suspects sont… la Ligue de Justice Internationale !

À propos de l'auteur de cet article

David Lemoine

Lecteur de BD depuis sa plus tendre enfance, David a fini par délaisser assez vite les classiques franco-belges, pour doucement voir ses affinités se tourner vers des genres plus noirs, plus grinçants, sarcastiques, trashs, violents, absurdes et parfois même décadents. Il grandissait en somme…. Fan de la première heure de Ranxerox et Squeeze the Mouse, il vénère aujourd’hui l’oeuvre d’auteurs Anglo-Saxon tel que Bendis, Brubaker/Phillips, Ben Templesmith, Terry Moore, Jonathan Hisckman, Ellis/Robertson, sans bouder son plaisir à la lecture des européens talentueux, francophone ou non, que sont Tardi, Ralf Konîg, Michel Pirus, Gess, les frères Hernandez, ou même Fred Bernard. La liste de ses amours dans le 9e art est loin d’être exhaustive, vous vous en doutez, et cela fait plus de 20 ans maintenant qu’il s’efforce de vous convaincre de les embrasser à travers ses chroniques radio qu’il vous livre chaque semaine dans l’émission XBulles sur les ondes de Radio Pulsar (http://www.radio-pulsar.org/emissions/thema/x-bulles/ / https://www.facebook.com/xbulles)”

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