L’ombre des lumières

Avec maestria, le scénariste de Garulfo Alain Ayroles s’est associé à Richard Guérineau pour signer l’œuvre romanesque de cette rentrée, L’ombre des lumières. Avec au centre de cette histoire un anti-héros pas comme les autres et résolument antipathique !

Le temps des Lumières, des vices et des plumes acerbes

France, mai 1745. Eunice de Clairfont a tout pour être heureuse ou presque. Un physique avenant, une tête bien faite et un appétit pour les sciences de toutes sortes, chose rare dans la France du XVIIIe siècle du « Bien aimé » roi Louis XV. Ajoutons à cela une demeure coquète mais un mari dont les obligations l’éloignent régulièrement du domicile conjugal.

Plongée dans les livres quand elle ne prend pas le pouls des petites gens qui l’entourent, son quotidien est chamboulé par l’arrivée inopinée d’un certain Corentin du Préau de Vazelles, baron de le Tournerie lequel s’immisce rapidement dans sa vie. D’échanges intellectuels en regards appuyés, leur relation finit par prendre une teinte des plus charnelles dévoilant par la même occasion la supercherie : le baron de la Tournerie et Justin Fleuri de Saint-Sauveur, chevalier de son état, ne sont qu’une seule et même personne.

Mais ne vous y trompez pas : sous couvert de disposer d’un patronyme à l’étymologie vertueuse, l’homme est un redoutable manipulateur doublé d’un flatteur invétéré, prêt à tout pour arriver à ses fins, Eunice n’étant qu’une ses nombreuses victime…

L’histoire avec un grand H…et un grand A(yrolles)

Basé sur la mystérieuse correspondance du Chevalier de Saint-Sauveur retrouvée dans des circonstances troubles, L’ombre des lumières démontre une fois de plus toute l’appétence d’Alain Ayroles pour l’Histoire avec un grand H. Après nous avoir plongés dans la période des conquistadors espagnols avec Les Indes Fourbes (et l’inénarrable Juanjo Guarnido au dessin), le scénariste de De capes et de crocs s’est tourné vers Richard Guérineau dont les talents graphiques ne sont plus à démontrer, ses dernières adaptations des récits de Jean Teulé parlant pour lui (Charly 9, Entrez dans la danse).

L’ombre des lumières : Grandeur et décadence au temps de Louis XV

Mettant en scène un freluquet portant le verbe haut et la vertu plus bas que terre, ce premier tome à des allures de Barry Lindon, notre chevalier et antihéros reflétant une époque d’inégalités et de coups bas n’ayant par bien des aspects rien à envier à notre époque contemporaine. Et que dire de ses dialogues et de cette narration ciselés !

Jonglant avec les secrets d’alcôves et ne reculant devant aucune manigance, notre anti-héros au pédigrée des plus mal intentionnés ne saurait pour autant susciter une constante détestation dans cette première partie de 70 pages menée tambour battant et n’a donc pas fini de nous dévoiler l’incroyable – et condamnable destin qui fut le sien. Un premier tome de haute volée qui devrait s’inviter très rapidement dans la cour des grands albums en l’an de grâce 2023.

Article posté le jeudi 14 septembre 2023 par Matthieu Morvan

L'ombre des lumières tome 1 de Richard Guérineau et Alain Ayroles (Delcourt)
  • L’ombre des lumières, tome 1 : L’ennemi du genre humain
  • Scénariste : Alain Ayroles
  • Dessinateur : Richard Guérineau
  • Éditeur : Delcourt
  • Prix : 22,95 €
  • Sortie : 13 septembre 2023
  • ISBN : 9782413078548

Résumé de l’éditeur : Vice d’un homme, vice d’un ordre, vice d’une époque. Découverte dans les tiroirs secrets d’un secrétaire à cylindre, la correspondance du chevalier de Saint-Sauveur court sur tout le XVIIIe Siècle et dessine l’effarant portrait d’un malfaisant. En exposant les turpitudes de l’infâme libertin et la constance de ses infortunes, la publication de ces lettres participera, espérons-le, au triomphe de la Vertu.

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Matthieu Morvan

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