Le plus célèbre des vikings de la bande dessinée fait son retour ! Avec une toute nouvelle collection, les éditions Le Lombard lancent Thorgal Saga, donnant l’occasion à divers auteurs de prendre possession de la légende thorgalienne. En reprenant un fait précis de sa vie, ils pourront développer un évènement et nourrir un peu plus le destin du fils de Varth. C’est Robin Recht qui est à l’honneur pour ce premier one shot. Avec son titre évocateur – Adieu Aaricia – l’auteur prend le pari du temps qui a passé et où l’on retrouve un Thorgal vieillissant et dévasté par la disparition de sa bien-aimée. L’occasion est belle pour l’un de ses pires ennemis d’assouvir sa vengeance en lui proposant de revoir une dernière fois Aaricia…
LA TRISTESSE OUVRE UNE FAILLE
La première page d’Adieu Aaricia pourrait sonner comme un bel hommage à celle dessinée il y a plus de quarante ans dans La Magicienne Trahie. Mais quoi de plus logique que de débuter cette aventure à l’endroit même où nous avions rencontré pour la première fois Thorgal dans une fâcheuse posture. L’anneau des sacrifiés a résisté à l’usure du temps. L’homme qu’on distingue assez pour attester son âge avancé, s’en souvient avec amertume. A bord de son bateau de fortune, Thorgal accompagne l’amour de sa vie pour son dernier voyage.
Alors qu’il regarde au loin s’embraser le cercueil flottant où repose Aaricia, Thorgal Aegirsson est soudainement perturbé dans sa douleur inconsolable par une mauvaise compagnie. Nidhogg n’est pas seulement de retour pour savourer la détresse de son plus fidèle rival. Le serpent à douze queues offre au viking une opportunité aussi attrayante que suspecte. Par la magie de l’anneau d’Ouroboros, Nidhogg propose à Thorgal de retourner dans le passé et ainsi retrouver Aaricia alors qu’ils étaient enfants mais surtout en vie. D’abord désintéressé, la tentation pour le vieux guerrier est trop forte.
THE STAR CHILD RETURNS
À peine eut-il enfilé l’anneau à son doigt que Thorgal se retrouva près de son village d’antan, celui des Vikings du Nord. Sur la plage, il rencontre un premier jeune visage familier, Solveig est la meilleure amie d’Aaricia. Blessée et inconsciente, il connait le chemin pour la ramener auprès de sa mère. En arrivant sur les lieux, Thorgal reconnait le peuple avec qui il vivait autrefois. Les retrouvailles avec Gandalf-le-Fou sont aussi tendues que la relation qui animait le roi et l’enfant des étoiles.
Méconnaissable pour les habitants du Nord, le Thorgal de plus de soixante-dix ans sera vite confronté à lui-même adolescent. Une nouvelle inquiétante vient s’ajouter au choc de cette rencontre : alors qu’elle était aux côtés de Solveig, Aaricia a disparu.
Enlevée par les Baalds, Thorgal n’a aucun souvenir de cette épisode de leur vie. Et pour cause, le vieil homme va comprendre que Nidhogg l’a envoyé dans cette lointaine époque afin de réécrire l’histoire et que, cette fois-ci, elle tourne en faveur du sournois serpent.
Ainsi sera la nouvelle quête des deux Thorgal, Accompagnés du roi Gandalf et de Skraeling-la-Noire, fille de Surtur, l’ardeur de l’un et l’expérience de l’autre devront s’unir pour délivrer leur amour commun. Et espérer rétablir le cours de l’histoire.
UN UNIVERS GRAPHIQUE DE HAUTE VOLEE
Ce que réalise Robin Recht dans ce nouvel album de Thorgal est une véritable prouesse à tous les niveaux ! À commencer par la partie graphique où le dessinateur d’Elric démontre, s’il en était besoin, une fois de plus sa maitrise à réaliser des récits d’héroic fantasy. Dans Adieu Aaricia, son identité graphique se mêle brillamment à l’univers créé par Jean Van Hamme et Grzegorz Rosinski. Tout en respectant l’habileté qu’avait Rosinski à donner beaucoup d’expressions à ses personnages, à faire ressentir les ambiances hostiles ou plus contemplatives, Robin Recht joue une partition similaire en apportant son trait qui nous avait déjà tant plu dans le tome 4 de Conan le Cimmérien. On ne peut passer à côté de certaines cases où se dégagent de belles émotions bonifiées par la colorisation raffinée de Gaétan Georges, habitué de la série.
LE BON VIEUX TEMPS
Le temps est le maître mot de cet album. Robin Recht a choisi un terrain où il pouvait jouer avec la vie bien remplie du Viking. Avec une particularité inédite : c’est la première fois que l’on voit un Thorgal aux cheveux blancs. Le risque était grand de toucher à l’image de ce héros que l’on a connu enfant, adulte et toujours vaillant. Mais le co-auteur de l’adaptation du roman la Cage aux Cons réussit brillamment la représentation vieillissante du personnage aux multiples aventures.
Dès la première planche, on ressent tout le poids du passé qui pèse sur les épaules du septuagénaire. Fatigué, usé et accablé par la douleur face à la disparition de l’amour de sa vie, seule la précision pour tirer sa flèche d’adieu rassure sur son habileté d’autrefois. Robin Recht présente ainsi un héros endeuillé et dont l’existence n’a plus vraiment d’importance sans Aaricia. Le net regain impulsé par le serpent diabolique ne va pas lui redonner sa jeunesse d’antan mais il aura l’occasion de s’appuyer sur le garçon fougueux qu’il était. S’ensuivront des échanges aussi riches que touchants. Ainsi, Robin Recht établit un équilibre permanent qui engendre une crédibilité totale de l’histoire. C’est superbement bien pensé et réalisé.
DES PERSONNAGES CONSISTANTS
L’auteur d’Adieu Aaricia prend également soin des autres protagonistes. De Gandalf-le-Fou (moins irascible qu’à l’accoutumée) à Hiérulf (le Sage du village intégré en toute finesse pour faciliter la rencontre entre les deux Thorgal), Robin s’autorise également un joli clin d’œil (une bonne occasion de (re)lire son Conan) en mettant en scène Skraeling-la-Noire, personnage inédit. La fille du géant du feu apporte une dimension mythologique chère à la série mère.
ADIEU AARICIA, PREMIER TITRE D’UNE SAGA PROMETTEUSE
Ainsi commence cette collection Thorgal Saga. Robin Recht offre une très belle lecture qui devrait assurément plaire aux fans de l’enfant des étoiles. Sans oublier celles et ceux qui ne se seraient jamais imprégnés d’une de ses aventures. Ils pourront se délecter d’Adieu Aaricia et plonger par la suite dans l’Œuvre fascinante de Jean Van Hamme et Grzegorz Rosinski. Le prochain one shot sera dirigé par Fred Duval et Corentin Rouge. Autant dire que cette nouvelle version du mythe thorgalien débute très, très bien.
- Thorgal – Adieu Aaricia
- Scénariste : Robin Recht
- Dessinateur : Robin Recht
- Coloriste : Gaétan Georges
- Éditeur : Le Lombard
- Prix : 23,50 €
- Parution : 03 février 2023
- ISBN : 978-2803679065
Résumé de l’éditeur : Le temps est le plus cruel des dieux… Couronnée de cheveux blancs, Aaricia a rendu son dernier souffle. Au crépuscule de sa vie, écrasé par la douleur, Thorgal se voit proposer l’anneau d’Ouroboros par le perfide Nidhogg. Qu’il le mette à son doigt, et il pourra retourner dans son propre passé, et revoir sa bien-aimée. Qu’importe le prix à payer, il est des tentations auxquelles même le héros le plus pur ne peut résister…
À propos de l'auteur de cet article
Mikey Martin
Mikey, dont les géniteurs ont tout de suite compris qu'il était sensé (!) a toujours été bercé par la bande dessinée. Passionné par le talent de ces scénaristes, dessinateur.ice.s ou coloristes, il n'a qu'une envie, vous parler de leurs créations. Et quand il a la chance de les rencontrer, il vous dit tout !
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