Une vie à Schtroumpfer

Pour fêter les 60 ans des Schtroumpfs, les éditions Daniel Maghen proposent Une vie à Schtroumpfer, une sublime biographie dessinée de Peyo signée Vincent Odin. Plongée dans l’univers poétique et délicat du génial auteur belge. Johan & Pirlouit, les Schtroumpfs et Benoît Brisefer sont au menu de ce somptueux recueil de 336 pages.

« C’est dans les albums d’Hergé et dans les comics américains que j’ai tout appris. Mais je ne m’imaginais pas  que je pourrais, un jour, me faire un nom dans la bande dessinée. Hergé est pour moi une sorte de demi-dieux… »

Né en 1928 Schaerbeek en Belgique, Pierre Culliford dit Peyo va devenir en 45 ans l’un des plus grands auteurs de bande dessinée notamment grâce à trois séries : Johan & Pirlouit, les Schtroumpfs et Benoît Brisfer. A travers les 336 pages de ce somptueux ouvrage de Vincent Odin, le lecteur découvre cette destinée hors du commun, faisant de ce petit belge, une star du 9e art.

Comme pour Mirages consacré à Will, le graphiste-illustrateur met avant tout en lumière les illustrations, croquis et planches de Peyo. Il parsème ses pages de nombreuses citations du dessinateur. Ainsi, c’est Peyo lui-même qui raconte sa propre histoire, et c’est ce qui est très agréable. Pas d’intervention de Vincent Odin, pas de commentaires, juste les paroles du maître. C’est donc aux lecteurs de faire les connexions et d’interpréter.

Comme il l’explique, Peyo était fasciné par le travail de Hergé sur Tintin et ne rêvait que de devenir lui aussi un acteur de la bande dessinée. Influencé aussi par Walt Disney, son trait sera plus proche de l’américain que du belge. Après une tentative dans le dessin animé (Studio CBA), il entre au journal Spirou en 1951 grâce à son autre maître Franquin.

Johan et Pirlouit : sa série préférée

Née dans le quotidien Le Soir en 1951 – L’attaque du château – la série Johan et Pirlouit prend son envol dans le journal de Spirou l’année suivante. Il réutilise son petit page dans Le châtiment de Basenhau. Il faudra attendre deux ans pour découvrir Pirlouit, le nouvel ami de Johan dans la célèbre histoire Le lutin du Bois Roches.

Il le confiera avec malice : « Mes amis me disent que c’est le personnage de Pirlouit que me ressemble le plus, et je l’admets volontiers. Inconsciemment, je l’ai doté de mes principaux traits de caractère. »

Ce duo est sympathique et très drôle. Il va vivre de nombreuses aventures dans un Moyen-Age fantasmé et très magique. D’ailleurs, il souligne aussi : « Johan et Pirlouit est vraiment ma série préférée, celle que je voudrais continuer. En fait, je crois que mon personnage préféré est Pirlouit, et Biquette aussi, dont Franquin m’avait suggéré l’idée. Et La guerre des 7 fontaines est peut-être l’épisode que je renierais le moins. » Puis arrivent les Schtroumpfs le 23 octobre 1958, un succès immédiat. Le public les plébiscitent.

« Passe-moi le schtroumpf »

Les Schtroumpfs apparaissent dans l’histoire La flûte à 6 trous qui sera rebaptisée ensuite La flûte à 6 Schtroumpfs. Comme le rappelle Vincent Odin dans Une vie à Schtroumpfer, c’est Franquin qui aurait trouvé le nom de lutins bleus après la célèbre phrase : « Passe-moi le schtroumpf ».

« Et pour leur couleur, c’est ma femme qui a choisi le bleu, par élimination : verts, ils avaient l’air malades ou extraterrestres, rouges, ils paraissaient en colère, et jaunes, ils étaient trop fades. Seul le bleu les rendaient distinctifs, optimistes, délicieusement irréels. »

Ils sont alors leur propre vedette dans la collection des Mini-récits. Pour le numéro 1000 du journal de Spirou était offert une histoire inédite à monter soi-même Les Schtroumpfs noirs. Viennent ensuite, Le Voleur de Schtroumpfs (1959), L’Œuf et les Schtroumpfs (1960), Le Faux Schtroumpf (1961), La Faim des Schtroumpfs (1961), Le Centième Schtroumpf (1962), et Le Schtroumpf volant (1963).

« Il faut être narrateur, conteur, comédien, il faut aussi être metteur en scène, dialoguiste. Ça demande à réunir quand même, disons-le, plusieurs dons. »

Dans Une vie à schtroumpfer, le lecteur découvre Peyo comme un vrai artisan, qui aime dessiner, aime mettre en scène. Il y aura aussi Poussy puis Benoît Brisefer créé dans le numéro 1183 de la revue Spirou en 1960.

Rapidement, tout se bouscule, les séries à succès se multiplient mais Peyo ne peut pas suivre. Il délègue alors les décors et autre à de jeunes auteurs : Will, Wasterlain, Derib, Leloup, Francis, De Geiter ou Gos. Sans jamais signer de contrat, il se font la main une, deux ou plusieurs années avant de voler de leurs propres ailes et de créer leurs séries. Ce que l’on appelle le Studio Peyo, l’auteur belge préfère le mot famille.

D’ailleurs en plus de son épouse Nine qui s’occupe des couleurs, son fils Thierry l’aide sur les scénarios et reprendra le flambeau à la mort de son père en 1992.

La dernière partie de Une vie à schtroumpfer est consacrée à l’animation à la télévision par Hanna-Barbera ou sur le grand écran par Belvision puis par des studios américains des Schtroumpfs. Cette opportunité se transforme en succès international : on connait les lutins bleus aux quatre coins du monde ! Smurfs, Schlumpfs ou Pitofos, ils sont partout !

Une vie à schtroumpfer : un livre à s’offrir, à offrir à Noël aux amateurs de Peyo, un bien précieux à conserver dans sa bédéthèque !

Article posté le samedi 10 novembre 2018 par Damien Canteau

une vie à schtroumpfer de Vincent Odin (Peyo / Daniel Maghen)
  • Une vie à schtroumpfer
  • Auteur : Peyo
  • Réalisation et conception : Vincent Odin
  • Éditeur : Daniel Maghen
  • Prix : 59€
  • Parution : 15 novembre 2017
  • ISBN : 9782356740588

Résumé de l’éditeur : Le succès des Schtroumpfs est tellement immense dans le monde entier qu’on en oublie parfois le secret de leur naissance : ces petits lutins bleus n’étaient que les personnages secondaires d’une bande dessinée de Johan et Pirlouit, La flûte à six Schtroumpfs, parue dans le journal Spirou en 1958. De la même façon, le succès des personnages a parfois éclipsé leur créateur, Pierre Culliford, dit Peyo, dessinateur de génie et raconteur d’histoires, qui créa pour l’hebdomadaire de Marcinelle, en plus des Schtroumpfs et de Johan et Pirlouit, les aventures de Benoit Brisefer. Une vie à Schtroumpfer est la biographie en images d’un géant de la BD franco-belge, créateur de trois grandes séries d’humour et d’aventure, et qui fut également, à partir des années 70, au centre d’un phénomène de société unique dans la BD européenne : le succès planétaire des Schtroumpfs, grâce aux dessins animés, au merchandising et aux super-productions hollywoodiennes. Sur le même principe que les précédentes biographies en images consacrées à Juillard, Cosey ou encore Tillieux, le livre est entièrement tourné vers le dessin, et l’on redécouvre au fil des pages l’immense talent artistique de Peyo. On y trouvera des dessins connus présentés sous un jour nouveau, de nombreux inédits, une présentation «carnets» et une qualité d’impression ordinairement réservée aux livres d’Art. Pour respecter la règle de la collection – donner la parole à l’auteur – les textes accompagnant les dessins sont extrait d’interviews accordées par Peyo tout au long de sa carrière.

À propos de l'auteur de cet article

Damien Canteau

Damien Canteau est passionné par la bande dessinée depuis une vingtaine d’années. Après avoir organisé des festivals, fondé des fanzines, écrit de nombreux articles, il est toujours à la recherche de petites merveilles qu’il prend plaisir à vous faire découvrir. Il est aussi membre de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée). Il est le rédacteur en chef du site Comixtrip.

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