George Sand

À 15 jours d’intervalle au mois d’avril, ce n’est pas un, mais deux ouvrages qui sont sortis pour mettre en lumière George Sand, une femme extraordinaire du fait de son parcours mais aussi de ses écrits.

Avec « George Sand, Fille du siècle », édité chez Delcourt, Séverine Vidal et Kim Consigny reviennent en noir et blanc sur une vie très liée à la vie politique de la France. Chantal Van den Heuvel et Nina Jacqmin ont elles choisi, avec « George Sand, Ma vie à Nohant », publié chez Glénat, d’ancrer, en couleur, la vie de la romancière dans un Berry cher à son cœur.

Aurore Dupin, une vie avant George Sand.

Pour emprunter une tournure chère à Victor Hugo, « ce siècle avait » quatre ans quand naquit Amantine Aurore Lucile Dupin de Francueil en 1804 à Paris. Ses parents n’appartiennent pas au même milieu social, mais s’aiment, au désespoir de sa famille paternelle.

En 1808, la famille quitte d’urgence l’Espagne, où le père d’Aurore était militaire, et se réfugie à Nohant (Indre), l’endroit qui deviendra le plus cher à ses yeux.

Une enfance avec sa grand-mère.

Quelques mois après l’arrivée à Nohant, le petit frère et le père d’Aurore décèdent. Sa grand-mère va profiter de la situation financière délicate de la mère d’Aurore, pour la renvoyer à Paris et garder sa petite fille avec elle. Elle se chargera de son éducation en compagnie de son précepteur Deschartres.

Aurore devient Baronne Dudevant.

C’est en 1822, à l’âge de 18 ans, qu’Aurore rencontre chez des amis celui qui va devenir son époux, François Casimir Dudevant, avocat de profession. Très rapidement les relations entre les époux tournent à l’orage. Casimir étant plus intéressé par la chasse et les femmes, Aurore va se plonger dans l’écriture et collectionner les relations extra-conjugales masculines et féminines.

Alternant une vie entre Paris et Nohant, l’écrivaine va, au fur et à mesure, prendre son indépendance jusqu’à obtenir la séparation d’avec son mari en 1836.

George Sand une renaissance.

À partir de 1831, Aurore s’installe avec son amant Jules Sandeau à Paris. C’est ensemble qu’ils vont commencer à écrire en utilisant un pseudonyme commun. Mais la jeune femme veut devenir un écrivain comme les autres. Elle décide de porter un costume d’homme, ce qui nécessitait une déclaration auprès de la Préfecture. Dorénavant elle se fera appeler George Sand.

Cette férue d’écriture, qui officiait la nuit, fera, tout au long de sa vie, des rencontres qui peuvent nous paraître incroyables encore aujourd’hui.

Alfred de Musset, auquel succédera Frédéric Chopin, seront même au nombre de ses amants.

Une femme active politiquement.

En 1835, en assistant à un procès politique, George Sand décide de mettre ses idées au service de la cause républicaine, pour le bien du peuple.

C’est avec la Révolution de 1848 que le régime monarchique de Louis Philippe prend fin. La romancière entourée de ses compagnons Ledru Rolin et Louis Blanc va participer, à travers ses écrits, à la mise en place de la Deuxième République.

Elle réclamera l’émancipation des femmes, pour qu’elles obtiennent l’égalité civile et dans le mariage.

« George Sand, fille du siècle ».

Séverine Vidal au scénario et Kim Consigny au dessin ont pris leur parti de faire un ouvrage vraiment très complet. Avec 334 pages, le scénario de Séverine Vidal est des plus conséquents. La vie de George Sand y est décrite avec moult détails à partir de son arrivée à Nohant à l’âge de quatre ans.

Les autrices ont choisi de suivre un ordre chronologique, ce qui permet de facilement se repérer dans la vie familiale de la romancière mais également dans les nombreux événements politiques de ce 19e siècle.
L’enfance et l’adolescence d’Aurore sont vraiment bien détaillées et permettent de mieux comprendre la femme qu’elle est devenue par la suite.

Un choix du noir et blanc.

Kim Consigny a choisi d’utiliser un trait fin et une absence de couleur. Cela permet de bien ancrer le lecteur dans le récit d’une époque, celle où les journaux étaient le seul moyen d’information.

Cette option souligne le côté très informatif du scénario faisant presque de cet album un documentaire. Comme si les mots de « Histoire de ma vie », les mémoires écrites par George Sand en 1847, avaient glissé sur les pages de cet album.

Ma vie à Nohant, une optique différente.

Chantal van den Heuvel commence son récit en 1836 alors que celle qui est déjà devenue George Sand s’apprête à demander la séparation d’avec son époux. Alors qu’elle a réussi à garder son Nohant, la romancière s’y réfugie et revient sur son passé en échangeant avec Ursule. George a grandi aux côtés de cette domestique, qui avait son âge, et les deux femmes resteront très proches.

La vie familiale de George Sand est beaucoup moins détaillée que dans le précédent album, mais le nombre de pages, 92, est moindre. La part belle est faite aux nombreuses personnalités qui gravitèrent dans le cercle de ses proches. C’est d’ailleurs très intéressant de voir évoluer tous ces grands de la littérature et de la musique du 19e siècle : Gustave Flaubert, Ivan Tourgueniev, Théophile Gautier, Franz Liszt… Le côté historique est beaucoup moins présent mais est tout de même suggéré, la vie de George Sand étant intimement liée à l’Histoire de la France.

« Une vie à Nohant » en couleur.

Le choix des dessins et des couleurs de « George Sand, Ma vie à Nohant » facilite la lecture de cet album et le rend nettement plus abordable que « George Sand, Fille du siècle ».

Ceci devrait permettre aux lecteurs moins férus de Littérature et d’Histoire de découvrir, avant tout une femme, qui décida avant beaucoup d’autres, de devenir libre. Une liberté qu’elle mit au service de la République, bien qu’étant issue d’une certaine noblesse.

Deux ouvrages complémentaires pour mieux faire connaissance avec George Sand, une femme de son siècle.

Si je devais conseiller un ordre de lecture pour ces deux albums, je confirmerais celui que j’ai choisi, c’est-à-dire débuter avec « George Sand, Fille du siècle ». En effet cet ouvrage pose des bases très solides et chronologiques qui permettent de mieux apprécier la lecture de « George Sand, Ma vie à Nohant ». En effet, ce dernier étant plus compact et plus condensé, il n’est pas toujours aisé de se repérer dans la vie foisonnante de notre héroïne.

Deux très belles lectures que je ne peux que vous conseiller et qui pourront vous donner envie, je l’espère, de lire ou de relire des romans phares de l’œuvre de cette grande romancière. « La mare au diable » (1846) et « La petite Fadette » (1849) n’attendent plus que vous.

Article posté le dimanche 06 juin 2021 par Claire Karius

George Sand de Séverine Vidal et Kim Consigny (Delcourt)
  • George Sand, Fille du siècle
  • Scénariste : Séverine Vidal
  • Dessinatrice : Kim Consigny
  • Editeur : Delcourt, collection Engrenages
  • Prix : 24,95 €
  • Parution : 28 avril 2021
  • ISBN : 9782413020127

Résumé de l’éditeur : 

La biographie tendre et dense d’une autrice d’exception. George Sand est une figure de l’émancipation des femmes, une vie de libertés, sociale, politique, amoureuse, littéraire… George Sand est née en 1804, à une époque où dans le code civil, les « débiles mentaux, les mineurs, les criminels et… les femmes » étaient privés de droits juridiques. Elle connut la gloire autant que Balzac ou Flaubert, eut des amants (Musset ou Chopin…) et des maîtresses, changea de nom, divorça, porta le pantalon… Elle aimait la vie, la nature, la politique, la musique et la littérature…

George Sand Ma vie à Nohant de Chantal van den Heuven et Nina Jacqmin (Glénat)
  • George Sand, Ma vie à Nohant
  • Scénariste : Chantal van den Heuvel
  • Dessinatrice : Nina Jacqmin
  • Editeur : Glénat 
  • Prix : 18 €
  • Parution : 14 avril 2021
  • ISBN : 9782344043745

Résumé de l’éditeur : 

Un refuge pour vivre et créer. Les frasques de George Sand sont fameuses : ses liaisons hors mariages, son rejet de la bienséance hypocrite, son accoutrement masculin, son retentissant et passionné combat en faveur de l’émancipation et des droits de la femme… L’autrice fait parler d’elle, résonner sa voix et, en s’adressant par l’écriture au monde, elle est aussi et avant tout célébrée pour son oeuvre prolifique. Dans ses textes, la campagne berrichonne a une place primordiale. Ses livres décrivent l’atmosphère campagnarde d’un monde qui n’existe plus mais qui fut le sien. George Sand, si elle a fréquenté Paris, a passé la majorité de son existence dans sa demeure de Nohant. Ce domaine familial, où elle a grandi et vécu à partir de ses quatre ans, lui a donné l’amour des grands espaces et de la liberté. C’est dans cette maison qu’elle s’est passionnée pour les histoires, c’est dans cette maison qu’elle a fait son éducation mondaine et paysanne. C’est là-bas qu’elle a vu mourir tant de ses proches, et c’est là-bas qu’elle-même, elle mourra. Lieu isolé, paradis rupestre, cette bâtisse accueillera Liszt, Balzac, Delacroix, Flaubert ou même Chopin pendant presque dix ans. Nohant est, pour George Sand et ses invités, un lieu où peut fleurir la créativité. Dans un album qui revient sur l’existence de la célèbre autrice, Chantal Van den Heuvel et Nina Jacqmin insèrent en toute subtilité un second personnage principal : le domaine de Nohant. Témoin essentiel de l’existence de tant d’artistes, ses murs contiennent l’écho de voix qui continuent à passionner les esprits du monde entier. Un album réalisé en partenariat avec Le Centre des Monuments Nationaux.

À propos de l'auteur de cet article

Claire Karius

Passionnée d'Histoire, Claire affectionne tout particulièrement les albums qui abordent cette thématique, mais pas seulement. Elle aime également les lectures qui savent l'émouvoir et lui donnent espoir en l'Homme et en la vie. Elle partage sa passion de la bande dessinée dans l'émission Bulles Zégomm sur Radio Tou'Caen et sur sa page Instagram @fillefan2bd.

En savoir