Merci Cécile Brun et Olivier Pichard d’avoir accepté notre invitation à venir nous parler de la sortie du deuxième tome de La fête des ombres.
Pouvez-vous vous présenter et nous dire qui se cache derrière Atelier Sentô ?
Cécile Brun : Nous c’est Cécile et Olivier, nous travaillons à quatre mains ensemble sur des projets autour d’un même univers, à la frontière du réel et du fantastique.
Est-ce que vous pouvez nous parlez de vos études, tous les deux à Bordeaux ?
Cécile Brun : C’est là qu’on s’est rencontrés.
Olivier Pichard : Moi j’ai fait Arts Plastiques.
Cécile Brun : Moi j’ai fait Japonais, langue et civilisation japonaises. Ce qui nous a permis de partir au Japon dans le cadre de mes études, d’habiter là bas. On y avait déjà voyagé, donc on a pu y aller plus en profondeur, dans les campagnes. C’est à partir de là qu’on a eu des projets autour du Japon.
Pourquoi ce nom d’Atelier Sentô et quelle est sa signification ?
Olivier Pichard : On cherchait un nom qui passait aussi bien en français, anglais et japonais. Atelier existe dans les trois langues. Sentô ce sont les bains publics japonais, de très beaux endroits avec de l’eau. Et une fresque peinte au fond du bâtiment, qu’on retrouve d’ailleurs dans La fête des ombres.
Actuellement comme les gens ont de plus en plus de salles de bain, ces bâtiments tombent en désuétude et ferment. Souvent ils sont réinvestis en café, galerie d’art. On imaginait un sentô qu’on pourrait réinvestir pour nous, pour y travailler. Il n’existe pas en vrai mais c’est un sentô imaginaire où on travaille.
Votre logo, que représente-t-il ?
Cécile Brun : Ça représente un personnage avec le dessin, dans le dos, d’une flaque d’eau avec des vapeurs. C’est le symbole des vrais sentô au Japon. Et tout ce qui est Onsen, dieux de bains, là où on peut se baigner. Quand on recherche un sentô, on trouve ce symbole dans la rue ou sur les cartes des villes.
Vous avez publié Onibi en 2016, pouvez-vous nous dire comment s’est construite cette histoire ?
Olivier Pichard : Onibi est un projet un peu étrange, à mi-chemin entre le carnet de voyage et le récit fantastique. Ça s’inspire de véritables souvenirs de voyage. Ils sont repris tels quels mais réorganisés sous forme d’une aventure à mi-chemin entre le monde des humains et celui des yokaï, des monstres du folklore japonais. On a repris de vrais souvenirs, tout est vrai, les lieux, les personnages qu’on rencontre sont des gens qu’on connaît véritablement. Tout ce qui se passe dans le livre nous est arrivé dans la vie. Mais on a tourné tout ça sous forme d’une quête étrange au pays des monstres.
Olivier est-ce que tu parlais japonais quand tu es parti au Japon la première fois ?
Olivier Pichard : J’avais déjà suivi un cours à l’université, donc j’avais quelques microscopiques bases pour comprendre et ne pas être trop perdu. Après je comprenais des conversations simples. C’est vrai que pour interagir, ce n’est pas aussi facile.
Cécile Brun : C’est un jeu. J’étais beaucoup dans l’interaction et Olivier dans l’observation. La première année, j’ai continué mes études là-bas et Olivier faisait du dessin. Ce qui nous a permis de ramener beaucoup de dessins d’environnement, de quotidien, qui nous ont bien servi dans nos projets futurs.
Le dessin est-il un moyen de communication important.
Olivier Pichard : Oui, quand je dessinais seul, les gens venaient voir, le contact s’instaurait autour du dessin, ça suffisait.
Cécile Brun : Les gens apportaient quelque chose à manger, restaient un moment.
Olivier Pichard : Le nombre de vieilles dames qui m’ont offert à manger pendant que je dessinais ! Au départ, elles me regardaient d’un air suspect en se demandant qui j’étais. Puis elles revenaient avec un sac en plastique et m’offraient une grappe de raisin, des chocolats. Et elles repartaient aussi sec.
Comment est-ce qu’on écrit à quatre mains dans un album comme Onibi ?
Olivier Pichard : Onibi c’étaient des souvenirs de voyage. J’ai écrit l’histoire mais je me suis basé sur des carnets que Cécile écrivait pendant le séjour. Chaque soir, elle consignait les événements rigolos avec des croquis. Je les ai réinterprétés sous forme d’histoire.
Sur les autres œuvres de pure fiction qui ont suivi comme Le songe du corbeau, on jette des idées et c’est moi qui vais écrire. Cécile va faire le storyboard.
Cécile Brun : En fait, Olivier écrit le scénario de A à Z, j’écris le storyboard. Je fais le crayonné et Olivier l’encrage et la couleur.
Olivier Pichard : Le travail à quatre mains, c’est plus une sorte de ping-pong. Il y en a un qui commence et qui donne la suite à l’autre. Chacun est maître de son étape.
Dans Onibi, on sent que la nourriture est importante ?
Olivier Pichard : Tous les gens qui ont voyagé au Japon, ont après une focalisation sur la nourriture. C’est une des choses les plus importantes quand on est sur place. Ce n’est pas cher, facilement accessible, il y en a partout. Chaque plat est une découverte complète.
Cécile Brun : Je pense aussi que les Japonais ont du mal à échanger sur certains sujets, car ils n’aiment pas trop entrer en conflit. La nourriture rassemble vraiment tout le monde. C’est un sujet de retrouvailles et d’échanges. Depuis, on est obnubilés par ça, que ce soit en France ou ailleurs, on adore dessiner la nourriture.
Est-ce que les Japonais sont des gens pudiques ?
Cécile Brun : Je ne sais pas si c’est le terme, mais ils n’aiment pas le conflit d’idées donc ils se retrouvent sur des thèmes de la vie quotidienne. Le beau temps est très important. Les saisons également.
Au Japon, il y a ce qu’on appelle les konbini, des petites supérettes ouvertes 24 heures sur 24, qui proposent des plats prêts à emporter. C’est toujours de saison.
Pourquoi avoir choisi Issekinicho comme maison d’édition pour ce projet ?
Olivier Pichard : C’est la maison d’édition qui nous a choisi. Delphine et Alexandre nous ont contactés sur un festival, après avoir acheté notre première bande dessinée autopubliée. Ils ont à peu près le même parcours que nous. Tous deux ont vécu au Japon, sont dessinateurs à la base et ont monté leur maison d’édition.
Ils nous ont envoyé un mail nous disant qu’ils avaient la possibilité de faire quelque chose avec nous. Nous devions envoyer un projet si cela nous intéressait.
Cécile Brun : Ça a été pareil pour La fête des ombres. Ils ne travaillent qu’avec des gens qu’ils connaissent et qui connaissent bien le Japon.
Olivier Pichard : Ils éditent très peu de livres chaque année, donc ce sont eux qui proposent.
Que signifie Issekinicho ?
Cécile Brun : Ça signifie « d’une pierre, deux coups” parce que Delphine et Alexandre sont un duo, comme nous. Ils ont voulu rassembler leurs talents pour créer quelque chose.
Ensuite vous avez publié Rêves de Japon, un artbook.
Cécile Brun : C’est un éditeur Omaké qui aimait beaucoup notre travail qui est venu nous proposer de faire un artbook. On a fait un travail de recherche dans nos archives et de reconstitution de notre vision du Japon à travers tout ce qu’on avait produit en aquarelle et illustrations. Notre vision du quotidien du Japon avec un côté fantastique.
Pourquoi cet album est-il en trois langues ?
Cécile Brun : On tenait à la version anglaise parce qu’on a une communauté anglaise importante sur Instagram. La version japonaise a été réalisée par la femme de notre éditeur. C’est un plaisir de travailler avec ces éditeurs qui sont devenus des couples d’amis.
On a besoin de cette confiance absolue en des gens honnêtes.
Vous avez publié plus tôt cette année Le songe du corbeau, mais cette fois vous étiez scénaristes, pourquoi ?
Olivier Pichard : Là encore, il s’agit d’une rencontre, en découvrant les dessins d’Alberto (MC) dans une petite galerie au Pays basque. On a été charmés par les portraits d’enfants japonais. On l’a contacté sur internet. Il avait déjà lu Onibi. On s’est retrouvés pendant une année à dessiner en extérieur, à beaucoup discuter. Puis on a lancé l’idée de faire une bande dessinée et c’est parti ainsi.
Cet album a été publié chez Delcourt, qu’est-ce que ça change des petits éditeurs ?
Cécile Brun : On a décidé dès le départ de publier chez un grand éditeur si c’était possible. On voulait que le rapport financier soit important pour le dessinateur. Il allait beaucoup travailler pendant une année. C’est différent quand on s’investit pour nous avec notre propre éditeur. On ne voulait pas que le dessinateur ait à gérer la commercialisation du livre.
Olivier Pichard : L’éditeur s’est occupé du scan. Et c’était tenter quelque chose de nouveau. Nos travaux précédents nous avaient été proposés. Donc en lançant nous-même un projet, il fallait le faire dans un circuit classique. On voulait voir, après Onibi, si c’était possible.
Cécile Brun : On nous a donné le contact avec la directrice de collection et tout de suite, ça s’est bien passé.
Olivier Pichard : On a eu plusieurs offres de plusieurs éditeurs. On est allés sur place et finalement ça s’est bien passé. Les locaux étaient à petite échelle avec pas beaucoup de monde. À échelle humaine.
Pour La fête des ombres, avez-vous tout de suite pensé à un récit en deux tomes ?
Olivier Pichard : On est partis sur quelque chose du même format qu’Onibi. Mais on voulait des pages plus grandes pour avoir plus de place pour développer les paysages. D’où l’idée du diptyque, parce qu’on ne voulait pas s’enfermer dans quelque chose de trop long.
Cécile Brun : On a écrit le scénario en deux tomes avec deux parties qui se répondent. Avec des saisons.
Olivier Pichard : Et la fin du tome un coupe bien l’histoire en deux.
Comment résumer l’histoire de La fête des ombres ?
Olivier Pichard : Il s’agit d’une histoire d’amour hantée. C’est comme cela qu’on l’a présentée à l’éditeur.
Cécile Brun : En tout cas, c’est ce qu’on voulait.
La vallée où habite votre héroïne existe-t-elle ?
Cécile Brun : Non c’est fictif mais c’est inspiré des endroits où on est allés. La maison de Naoko, redessinée pour l’histoire, est très inspirée d’une maison où on a logé à Kumano dans le sud de Honshu. C’est une maison qu’on a adorée. L’ambiance était très humide, très particulière.
Olivier Pichard : C’est une maison où logeaient une fille et sa mère, le même profil que Naoko. Il y avait même un vieux chat.
On a créé notre propre vallée inspirée par des choses qu’on connaît, dans un souci de réalisme, pour que ce soit crédible. On voudrait que les lecteurs aient l’impression d’y être.
Pourquoi avez-vous choisi d’écrire La fête des ombres en fonction des saisons et plus particulièrement sur une année ?
Olivier Pichard : L’idée était de faire ça autour d’un matsuri, un festival traditionnel japonais qui se passe tous les ans, traditionnellement l’été. Avant la récolte du riz, au moment de la fête des morts.
Les saisons quand on habite au Japon, on ne peut pas y échapper.
Les maisons sont mal isolées. L’été on a horriblement chaud et l’hiver horriblement froid. Les saisons sont très présentes même en pleine ville. Que ce soit dans les menus des konbini qui changent au gré des saisons. La culture du riz structure également les saisons. Elles changent tout le temps et sont vraiment mises en avant.
Cécile Brun : C’est un moyen de mettre un compte à rebours. Naoko vit avec cette ombre pendant une seule année. Mais cette relation est équivalente à une relation tissée sur un long terme.
Je voulais faire la saison des cerisiers qui est dans le tome deux. Les représenter comme quelque chose de symbolique.
Naoko est très proche de son ami Katsu, quel est son rôle dans l’histoire ?
Cécile Brun : Noako est tiraillée par son rôle d’être capable de voir les ombres, comme les femmes de sa famille. En même temps, comme beaucoup de jeunes, elle veut quitter la campagne pour partir en ville et écrire, une activité qu’elle aime.
L’ombre et Katsu sont les deux faces de Naoko. Katsu est l’idéal de la campagne, il aime son village et ça ne le gêne pas d’y rester toute sa vie. Il est très terre à terre. L’autre personnage est rêveur, peut-être même de choses impossibles.
Avez-vous prévu, dès le tome un, le nombre de pages de cette histoire ?
Olivier Pichard : Oui, quand on commence un projet, comme pour La fête des ombres, on se fixe un nombre de pages. On s’y tient pour ne pas avoir de surprises sur les délais. Si on rajoute des pages, c’est un problème pour l’éditeur, qui explose son budget.
Dès le départ j’imagine le nombre de scènes, ce qui me donne une estimation du nombre de pages.
Cécile Brun : On a toujours des pages bonus à la fin.
Dès les premiers échanges avec Issekinicho on fixe le nombre de pages, le format, la qualité du papier, le type de couverture. Le livre est également un produit et il faut être en phase avec le lecteur.
Ces deux livres sont deux beaux objets, en plus de ce qu’il y a dedans. C’est un très beau travail d’édition.
Dans le deuxième tome, on passe de la campagne à la ville, pourquoi avoir fait ce choix ?
Olivier Pichard : Comme toujours pour nous, c’est cette envie de changer de cadre. On voulait ce contraste entre la ville et la campagne. Tokyo est la ville japonaise qu’on préfère. Elle a une très grande variété de paysages, quand on passe d’un quartier à un autre. Du très moderne au très vieillot. Ça permet de s’amuser en dessin et en scénario.
On confronte Naoko au rêve de toutes les jeunes Japonaises de mener la grande vie. On peut imaginer que pendant toute sa jeunesse elle a rêvé de devenir autrice à Tokyo et avoir enfin le succès qu’elle mérite.
Cécile Brun : C’est une ville dans laquelle on se sent bien et qu’on a envie d’explorer. Quand on a signé le projet, on devait repartir au Japon pour faire du repérage, entre les deux tomes. On aurait aimé s’installer à Tokyo, pendant deux ou trois mois, pour y faire des photos et vivre le quotidien des gens. Mais ça n’a pas été possible à cause de la covid.
Dans La fête des ombres, on ne connaît pas l’âge de Naoko, quel âge peut-elle avoir ?
Cécile Brun : Au début de l’histoire, elle sort de l’adolescence. Elle grandit en accéléré par rapport à ce qui lui arrive. À la fin de l’histoire, on peut penser qu’elle a un peu plus de la trentaine.
Olivier Pichard : Le dessin change en fonction de son caractère, de sa maturité.
Cécile Brun : C’est l’histoire d’une évolution et d’une progression.
Quand avez-vous débuté ce projet de La fête des ombres?
Cécile Brun : Ça correspond à fin 2019, le début de la covid. Les premières pages, j’avais du mal à sentir l’intérêt de ce qu’on faisait dans une période pareille.
Les deux tomes de La fête des ombres sont sortis la même année, était-ce prévu ainsi ?
Olivier Pichard : La covid a tout décalé. On était censés avoir un délai rapproché entre les deux tomes mais il y a eu un embouteillage de livres en raison du confinement. Notre éditeur a tout décalé pour avoir plus de visibilité et éviter d’être noyés dans la masse des sorties d’octobre 2020.
Cécile Brun : On avait prévu de sortir les deux albums avec un délai de six mois entre les deux. Ça permet d’avoir le premier en mémoire, que ce soit assez frais.
Olivier Pichard : Il y a toujours une frustration en tant que lecteur, quand on ne se souvient pas du tome d’avant. Même s’il y a toujours le plaisir de se replonger dans le tome précédent.
Savez-vous à combien d’exemplaires est imprimé La fête des ombres ?
Olivier Pichard : Une réimpression est en cours pour le tome un. A priori 7000 exemplaires et 6000 pour le tome deux.
Cécile Brun : Ce qui est agréable avec Issekinicho, c’est quand ils sortent 7000 exemplaires, c’est parce qu’ils vont les vendre. Peut-être pas tout d’un coup, mais ils épuiseront le stock. Onibi continue à se vendre, il y a eu des réimpressions.
Issekinicho ne laisse pas tomber un album parce qu’il a deux ans d’existence. Ils sont dans la défense des titres et ça fait plaisir.
Qui a eu l’idée de ces deux couvertures qui se répondent ?
Cécile Brun : C’est quelque chose qu’on a vu avec l’éditeur. On a fait des centaines de croquis. Ça a été très très long. On voulait qu’elles n’existent qu’ensemble mais on n’a pas réussi à trouver quelque chose de suffisamment efficace individuellement. Les couvertures définitives sont quasiment des propositions de notre éditeur, qui nous a proposé la structure.
Que vous a apporté La fête des ombres ?
Cécile Brun : La fête des ombres nous a bien aidé pendant le confinement. Il nous a permis de voyager et de ne pas du tout penser à la covid. On était plongés dans cette histoire. Ce pari a été bon pour notre santé mentale. Il nous a maintenu dans une attitude positive et créative.
Quand la bande dessinée sort, c’est un gros stress car on y a mis beaucoup de nous. C’est beaucoup de questionnements mais les premiers retours nous permettent de respirer un peu.
Olivier Pichard : Quand on sort une bande dessinée, on part en tournée dédicaces. Avec le tome un, on n’a pas pu le faire, sauf à côté de chez nous.
Là, avec l’amélioration des choses, on va entamer une vraie tournée et on est impatients de rencontrer nos lecteurs.
Irez-vous au festival d’Angoulême en 2022 ?
Cécile Brun : Pour la première fois, Issekinicho a pris un stand à Angoulême, on est très contents.
Olivier Pichard : Du côté Manga city à cause du thème japonais.
Écrire une histoire au format manga, y avez-vous déjà pensé ?
Olivier Pichard : En France peut-être pas, ce serait plutôt au Japon.
Cécile Brun : Un éditeur nous a fait une proposition pour un magazine de mangas au Japon. On y a beaucoup réfléchi. C’est très stimulant de participer à l’industrie du manga, par contre les conditions de travail font un peu peur.
Olivier Pichard : Ce qui fait peur c’est la place de l’éditeur dans la création.
En France on est libres, au Japon le suivi est strict. L’éditeur apporte les idées et l’auteur les applique.
Les auteurs confirmés ont les mains libres mais les autres doivent se soumettre au diktat.
Avez-vous des projets en cours ?
Olivier Pichard : On va participer à un ouvrage collectif, une petite bande dessinée d’une quinzaine de pages qui sera entre l’Occident et le Japon avec des auteurs des deux côtés. Mais c’est un peu top secret.
C’est l’occasion d’explorer le noir et blanc, ainsi qu’un rythme rapide dans la création. Peut-être qu’on changera d’avis après ça.
Comme on a sorti trois livres en l’espace d’un an, on voulait prendre du recul, se poser, travailler sur des petites choses avant de se replonger dans un gros projet.
Cécile Brun : Et prendre des vacances !
Vous êtes très présent sur les réseaux sociaux, est-ce pour le travail ou pour le plaisir de partager ?
Cécile Brun : Ça fait une bonne dizaine d’années qu’on a commencé. Au début on n’était pas édités et on avait besoin de montrer notre travail, dans une optique d’autoédition.
Olivier Pichard : On vendait également des illustrations, des estampes.
Cécile Brun : Puis est venue l’édition avec Issekinicho et Onibi.
C’est devenu une façon pour nos lecteurs de suivre nos œuvres. Qu’ils se sentent impliqués. Une œuvre ce n’est pas juste quand elle est finie. C’est aussi quand elle est créée.
Ce moment est très fort et on a envie de le partager. De plus en plus, c’est une façon de nous soutenir dans notre travail. Notamment en l’absence de dédicaces. Avoir des petits messages, c’est vital pour nous pour garder confiance et de savoir que ça plait.
Olivier Pichard : Ça a été important pour la création du tome deux de La fête des ombres. Les gens montraient leur enthousiasme, boostaient notre création.
Cécile Brun : C’est également un lieu de rencontre avec des artistes. Une plateforme stimulante de création, que ce soit Instagram, Facebook ou Twitter. Ça permet d’établir des échanges qui durent depuis longtemps.
Pourquoi n’avez-vous pas posté beaucoup d’images du tome deux de La Fête des ombres ?
Olivier Pichard : Ce n’est pas facile de dire sans dévoiler. Si on montre un certain personnage, ça en dit vraiment beaucoup.
Cécile Brun : En plus c’est frustrant parce que le tome deux, on en est fiers. On s’est donnés à fond et on avait envie de partager. Mais on ne pouvait pas gâcher la découverte.
Vous communiquez à la fois en anglais et en français, est-ce pour avoir une communauté plus importante ?
Cécile Brun : Au début, on ne communiquait qu’en anglais. On faisait du jeu vidéo et ça intéressait surtout les Anglais. Avec l’arrivée d’Onibi, même si nos lecteurs faisaient l’effort de lire l’anglais, on voulait être proches d’eux.
Olivier Pichard : L’anglais est pratique comme on est souvent en voyage au Japon. Les gens qu’on rencontre ne sont pas forcément francophones.
Pourquoi ne pas ajouter le japonais ?
Cécile Brun : Les Japonais interagissent peu, j’ai très peu de retours quand je mets quelque chose en japonais.
Olivier Pichard : Et c’est beaucoup de travail. Écrire en anglais ça va, écrire en japonais ça prend du temps.
Avez-vous prévu de participer à des expositions avec vos travaux ?
Cécile Brun : On a gagné un prix À Tours de bulles, donc on y sera l’année prochaine (septembre 2022).
Olivier Pichard : On fera l’affiche et on aura une expo. On n’a pas encore de détails. Mais avec des aquarelles et des croquis, ça s’y prête vraiment.
Envisageriez-vous de vendre certaines de vos planches comme complément financier ?
Cécile Brun : On l’a fait beaucoup avec Onibi, pas vendre mais louer pour faire des expos. C’est un petit complément et on garde les planches.
Olivier Pichard : Expo vente, on reste un peu attachés aux originaux pour l’instant. Mais petit à petit les albums s’entassent et il faudra bien y réfléchir.
Aujourd’hui arrivez-vous à vivre de la bande dessinée ?
Cécile Brun : On vit de la bande dessinée selon les mois. À la fin du projet, comme on a touché l’argent au début, il y a des mois où on a des aides. On espère s’en passer définitivement d’ici quelques mois.
Pour clôturer cet entretien, voici la traditionnelle question. Quelle lecture vous a marqués dernièrement ?
Cécile Brun : Pour moi c’est un cadeau d’Olivier, Daru-Chan un manga qui a été édité chez Lézard noir. Une jeune femme qui travaille en entreprise et qui est plus ou moins extraterrestre. Quand on ne la regarde pas, elle se liquéfie. Elle essaie de cacher ça aux gens pour rentrer dans le moule. Elle va découvrir petit à petit comment devenir elle-même et le plaisir de l’écriture. C’est très beau, très épuré au niveau du trait et très émouvant.
Et pour toi Olivier ?
Olivier Pichard : Il y a Carbone et Silicium qu’on ne présente plus, un livre impressionnant pour beaucoup, surtout en cette période. Son ampleur, ses paysages, son nombre de pages, son ambition ont accompagné beaucoup de lecteurs ces derniers mois.
Cécile Brun : On a beaucoup aimé le système d’ellipses entre chaque histoire, ce qui donne cette impression de durée.
Un très grand merci à tous les deux, Cécile et Olivier, d’avoir pris de votre temps pour répondre à nos questions et pour nous parler de la sortie du tome deux de La fête des ombres.
CET ENTRETIEN ET SA RETRANSCRIPTION ONT ÉTÉ RÉALISÉS DANS LE CADRE DU LIVE QUI S’EST TENU MERCREDI 20 OCTOBRE 2021 SUR LA PAGE INSTAGRAM DE YOANN
DEBIAIS @LIVRESSEDESBULLES .
SI VOUS VOULEZ EN SAVOIR PLUS, N’HÉSITEZ PAS À REGARDER CI-CONTRE LE REPLAY DU LIVE.
- La fête des ombres, tome 1/2
- Auteurs : Atelier Sento
- Editeur : Issekinicho
- Prix : 16,90 €
- Parution : 23 février 2021
- ISBN : 9791095397120
Résumé de l’éditeur : Chaque été, dans un village isolé du Japon, on célèbre la Fête des ombres, un étrange festival pendant lequel les habitants accueillent les âmes errantes des morts qui ont tout perdu, jusqu’au souvenir de leurs vies passées.
Naoko, une jeune femme un peu rêveuse, a pour mission de guider l’une de ces ombres, un homme mystérieux hanté par un terrible secret. Si elle ne parvient pas à l’aider avant l’été suivant, l’ombre sera perdue à jamais.
Au fil des saisons naissent des sentiments qui les rapprochent et brouillent la frontière entre le monde des vivants et des morts. Mais à force de côtoyer un fantôme, Naoko ne risque-t-elle pas de passer à côté de sa propre vie ?
- La fête des ombres, tome 2/2
- Auteurs : Atelier Sento
- Editeur : Issekinicho
- Prix : 16,90 €
- Parution : 21 octobre 2021
- ISBN : 979-1095397137
Résumé de l’éditeur : Naoko, jeune Japonaise un peu rêveuse, vit parmi les ombres. Chaque été, dans son village, on célèbre une fête ancienne très particulière pendant laquelle les âmes errantes des disparus reviennent. Naoko aura pour mission de guider l’âme d’un homme privée de souvenirs, hantée par un terrible secret. Si elle échoue, au bout d’un an, l’âme sera perdue à tout jamais. Au fil des saisons, naissent entre Naoko et cette âme des sentiments qui brouillent la frontière entre le monde des vivants et des morts. À force de côtoyer un fantôme et de comprendre son passé, Naoko ne risque-t-elle pas de passer à côté de sa propre vie ? Suite et fin dans ce tome 2
À propos de l'auteur de cet article
Claire & Yoann
Claire Karius @fillefan2bd & Yoann Debiais @livressedesbulles , instagrameurs passionnés par le travail des auteurs et autrices de bandes dessinées, ont associé leurs forces et leurs compétences, pour vous livrer des entretiens où bonne humeur et sérieux seront les maîtres-mots.
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